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Cheyne Editeur


Cheyne éditeur est une maison d'édition française indépendante créée en 1980 par Jean-François Manier, spécialisée dans la poésie contemporaine. Si elle s'est fait connaître du grand public à la suite du succès de Matin Brun, la nouvelle de Franck Pavloff, elle cherche avant tout à faire entendre aujourd'hui et à travers des œuvres maintenant reconnues, « une tonalité poétique singulière, où l’expression d’une expérience intérieure rejoint volontiers le questionnement des formes1».

 


Vacance, Victor Malzac (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 16 Décembre 2022. , dans Cheyne Editeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie

Vacance, Victor Malzac, novembre 2022, 64 pages, 17 € Edition: Cheyne Editeur

 

Il y a, chez Malzac, que je suis depuis ses débuts éclatants, une urgence à dire et à se dire, avec vérité, acuité, nudité. Une urgence que relaie cette stylistique de l’énumération, assez ethnographique, pour puiser autour de lui tout ce qu’il est bon de prendre. Sans coupure, selon la fluidité de la mer, le poème enregistre, simplement ponctué de virgules tout ce qui se place sous le regard du poète.

Tantôt garçon, tantôt fille, le je qui parle énonce son désir puissant de l’autre, des autres, de lui, dans une jouissance irrépressible, gourmande, sensuelle. C’est toute la plage qui défile, avec ses peaux, ses maillots serrés, ses attentes, ses fièvres. C’est la vacance complète : le poème dévide tout, sel, foutre, mer, gens, sable. Ce temps des « vacances » d’un jeune de dix-huit ans, fou de désir, de danse, de corps, de l’autre.

Dans l’herbe, Victor Malzac (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 28 Janvier 2022. , dans Cheyne Editeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie

Dans l’herbe, Victor Malzac, décembre 2021, 64 pages, 16 € Edition: Cheyne Editeur

 

Ce second livre de Victor Malzac vient de recevoir le Prix de la Vocation 2021.

En quatre longs poèmes, le livre déploie une quête, une soif, une volonté de comprendre son corps, son âme, ses proches. On est dans le cœur-corps d’un jeune homme qui n’en finit plus de découvrir ses plaies, ses désirs, ses envies « dans un parc », « dans l’herbe ».

Il a des compagnons de fortune (ou d’infortune), des parents, il n’a pas d’âge, il multiplie les saccades de langage, il s’interrompt, il gère sa fatigue, ses pulsions, il ne gère rien du tout et sa langue beugue, beugle, gémit, ardente, improvisée, syncopée en diable.

C’est la langue juvénile et si mature d’un jeune poète flamboyant, qui flambe sa jeunesse à coups de vers nouveaux.

Cette langue de vrai poète – jaculatoire et forte – mime tous les assauts d’un cœur-corps qui se découvre, qui a la faim de tout, qui mange et veut manger, et veut « boire la mousse de mon nombril ».

Lao du placard, Loïc Demey, Cheyne éditeur (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 03 Décembre 2021. , dans Cheyne Editeur, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Jeunesse

Lao du placard, Loïc Demey, Cheyne éditeur, Coll. Poèmes pour grandir, septembre 2021, Ill. Clothilde Staës, 48 pages, 15 € Edition: Cheyne Editeur

 

Loïc Demey est professeur, écrivain, romancier, poète. Il est Lorrain. Le jeune auteur s’est fait remarquer de la critique par quatre livres depuis 2014. Le voici entré dans la collection destinée aux enfants, avec un très beau récit poétique. Tiré à 3000 exemplaires, l’ouvrage pourra séduire les plus réticents à cette littérature d’enfance. Ici respirent l’intelligence, la finesse, l’étonnement, et les mots de Demey ont trouvé un allié sans pareil avec les images très colorées, très vives et imaginatives de Clothilde Staës.

Ou comment en quarante-huit pages entrer dans le monde d’un enfant différent, Lao. Il ne parle pas mais comprend tout. Il s’invente des publicités au creux de son placard. Sa mère est triste. Son père l’a quittée. Il y a bien les grands-parents qui veillent sur lui et l’accueillent.

Dans cet univers feutré, triste, le pouvoir de l’imagination se donne les mots que l’enfant ne possède pas.

Livrés aux géographes, Jacques Vandenschrick, (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 22 Novembre 2019. , dans Cheyne Editeur, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Livrés aux géographes, Jacques Vandenschrick, 2018, 64 pages, 17 € Edition: Cheyne Editeur

 

Jacques Vandenschrick, né en 1943, signe son onzième livre de poésie. Romaniste, italianiste, chroniqueur de longue date à la Revue nouvelle, critique littéraire, il est le seul poète belge d’importance à n’avoir jamais été publié en Belgique, puisque toute l’œuvre a été publiée chez Cheyne, et ce, depuis Vers l’élégie obscure en 1986. Prix triennal de poésie en 1998, il a également reçu d’autres prix importants : le René-Lyr, le Claude-Sernet, le Louise-Labé. Ses titres évoquent élégie, nostalgie de la montagne, mélancolie foncière, dans le droit fil de la poésie d’un Rilke ou d’un Jaccottet.

Mais il y a chez ce Belge une densité rare d’aire poétique, un lexique particulier, un univers forcément identifiable : le gabarit de 40 poèmes pour chaque livre ; les lexèmes des territoires enneigés, entre bergerie et hauts sommets ; des morts proches gravées loin dans le vers. Voilà sans doute – depuis le décès de Schmitz, et avant, de Falaise, et de Kinet – notre plus grand poète, mais si longtemps méconnu à cause justement d’un ancrage éditorial qui fait fi de la Belgique.

Les Hautes Herbes, Hubert Voignier (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Mardi, 25 Juin 2019. , dans Cheyne Editeur, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Voyages

Les Hautes Herbes, 64 pages, 17 € . Ecrivain(s): Hubert Voignier Edition: Cheyne Editeur

 

Ce qui interpelle de prime abord est la très belle plastique du livre, soignée, relevée par des reliefs sur la couverture autant qu’à l’intérieur des pages, via les illustrations de hautes herbes (splendide travail dû à Estelle Aguelon) qui, à elles seules, savent nous emmener dans l’entremêlement infini des feuilles et des tiges qui peuplent l’ouvrage entier.

Il s’agit d’une progression en quatre mouvements : la référence au champ lexical de la musique se justifie pleinement, tant la langue d’Hubert Voignier est maîtrisée, riche, magnifiquement nuancée dans son rythme – il est impossible de résister au courant de sa prose poétique une fois que nous nous sommes lancés, tant l’immersion dans le monde végétal se fait le reflet d’une vie intérieure intense. Le déferlement de nature qui nous submerge et nous anime en même temps semble trouver son apothéose dans le troisième mouvement, avec l’arrivée des mauvaises herbes et leur « mouvement d’émancipation naturelle », leur « débordement de vie, anarchique et frondeur » [p.38].