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La Folie Almayer, Joseph Conrad, Éditions Autrement (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 30 Novembre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Iles britanniques, Autrement

La Folie Almayer, Joseph Conrad, Éditions Autrement, septembre 2021, trad. anglais, Odette Lamolle, préface Olivier Rolin, 352 pages, 12 €

 

Toutes les biographies l’indiquent : Joseph Conrad est un écrivain qui a choisi un jour d’écrire en anglais, lui, le Polonais, lui, le mousse parti de Marseille pour finir capitaine de la marine marchande britannique, lui, le voyageur d’une Asie aux langues multiples. Il écrit en anglais comme peu, il crée une langue d’une pureté rare, et celle-ci est à rendre en français vaille que vaille, avec plus ou moins de talent, avec plus ou moins de compréhension de cette langue à la fois souple et précieuse, et parfois aussi imaginative qu’imagée.

Partant, les traductions de son œuvre sont multiples, et l’on ne peut toutes les comparer ; on peut du moins en apprécier une par une simple comparaison entre la version originale et la version traduite d’un même paragraphe ; ici, ce sera le dernier du roman, en toute subjectivité :

« And as they passed through the crowd that fell back before them, the beads in Abdulla’s hand clicked, while in a solemn whisper he breathed out piously the name of Allah ! The Merciful ! The Compassionate ! ».

Contes philosophiques du monde entier, Jean-Claude Carrière (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 24 Novembre 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Plon

Contes philosophiques du monde entier, Jean-Claude Carrière, août 2021, 384 pages, 12 € Edition: Plon

Feu Jean-Claude Carrière avait la passion des histoires, celles qui, sans aucunes distinctions géographiques ou temporelles, nous fondent, nous les humains, qui nous disent qui nous sommes de façon symbolique, qui nous incitent à nous poser des questions auxquelles il n’y a pas nécessairement de réponses – peut-être les plus intéressantes parmi les questions, soit dit en passant – un exemple ? Pourquoi j’aime telle personne – aucune réponse, aucune certitude, juste le sentiment. Il suffit pour se sentir humain.

Le présent recueil, dans sa première édition datant de 2008, était sous-titré Le Cercle des menteurs 2, et donc présenté comme une sorte de suite au recueil Le Cercle des menteurs, publié quant à lui en 1998. Des menteurs ? Non, des diseurs de vérités, ces vérités simples que la psychanalyse moderne a dévoyées – le plus bel exemple étant le supposé « complexe d’Œdipe », auquel aucun helléniste ne comprend rien puisque toutes les histoires, de celle de la famille des Labdacides à celle de Blanche-Neige ou même d’une petite fille devant échapper à l’emprise de sa grand-mère-loup, disent ceci : le parent a toujours tort de chercher à empêcher l’enfant de grandir, de lui échapper, de le dépasser, de prendre sa place, alors que telle est pourtant la destinée commune.

Arsène Lupin, gentleman-cambrioleur & Arsène Lupin contre Herlock Sholmès, Maurice Leblanc (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 17 Novembre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Arsène Lupin, gentleman-cambrioleur & Arsène Lupin contre Herlock Sholmès, Maurice Leblanc, édition d’Adrien Goetz, Folio Gallimard, septembre 2021, 336 & 352 pages, 5,70 €

Arsène Lupin est, pour l’amateur de séries télévisées de 2021, l’inspiration d’un personnage incarné par Omar Sy, Assane Diop, dans une série à succès, Lupin ; pour qui se tient éloigné du téléviseur et a souvent suivi les recommandations de Francis Lacassin, c’est un personnage créé en 1905 par Maurice Leblanc, et dont les aventures se succèdent jusqu’à la mort de son créateur en 1941. C’est surtout un représentant d’une certaine élégance, d’un certain savoir-vivre, et un personnage paradoxal dans une catégorie du roman policier née depuis peu, celle dont le personnage principal est un surhomme face à une police dont Ganimard, l’ennemi juré de Lupin, pourrait être le parfait représentant : « Il a d’excellentes qualités moyennes, de l’observation, de la sagacité, de la persévérance, et même de l’intuition. Son mérite est de travailler avec l’indépendance la plus absolue » (Arsène Lupin contre Herlock Sholmès). Bref, du Chevalier Dupin créé en 1841 par Edgar Allen Poe à Arsène Lupin, il n’y a qu’une lettre qui change ; l’esprit, génial et quelque peu facétieux, est quasi inchangé, et tant pis si l’intention semble opposée, Lupin étant de l’autre côté de la barrière. Et certes, Lecoq (Emile Gaboriau) et Sherlock Holmes (Conan Doyle) font partie de sa généalogie ascendante – de même que Rouletabille (Gaston Leroux) fait partie de sa généalogie descendante.

Dictionnaire amoureux de l’esprit français, Metin Arditi (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 08 Novembre 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Plon

Dictionnaire amoureux de l’esprit français, août 2021, 688 pages, 13 € . Ecrivain(s): Metin Arditi Edition: Plon

Une logique se dégage de la présente chronique, relative à un Dictionnaire amoureux de l’esprit français : l’ouvrage est signé d’un écrivain suisse francophone d’origine turque séfarade, Metin Arditi, et la chronique est signée d’un Belge – c’est dire le pouvoir de fascination qu’exerce l’esprit français, fascination à certains égards plus puissante en dehors de l’Hexagone qu’à l’intérieur de ses frontières. Pour les Français, baignés de cet esprit, de cette recherche d’élégance, de ce désir de plaire, quoi de plus naturel, quoi de moins remarquable ? Dans quel autre pays un futur président de la République a-t-il publié une Anthologie de la poésie française toujours rééditée soixante ans plus tard ? (Remarquons au passage que Pompidou est absent de ce Dictionnaire amoureux, comme nombre d’hommes d’état – dommage, certains y avaient leur place aux côtés de Charles De Gaulle.) Certes, l’élégance, le désir de plaire semblent en voie de disparition – ou du moins n’ont-ils plus la même définition, le même sens, dans une société elle-même de moins en moins élégante ou plaisante, mais il suffit de gratter la surface moderne pour retrouver l’éclat de l’esprit français, ne fût-ce que dans des programmes scolaires qui font la part belle aux classiques, ou dans certaines élégances artistiques.

Le Pays des Celtes, Mémoires de la Gaule, Laurent Olivier (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Vendredi, 29 Octobre 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Histoire

Le Pays des Celtes, Mémoires de la Gaule, Laurent Olivier, Seuil Points Histoire, avril 2021, 448 pages, 10,80 €

À qui désire un livre sur les Celtes, leur culture, leur histoire, etc., le livre de Laurent Olivier ne s’adresse pas, ou du moins pas tout à fait ; on recommande plutôt les ouvrages de Venceslas Kruta, soit Les Celtes, aux Puf pour les amateurs de petits formats, soit Les Celtes, Histoire et dictionnaire, chez Robert Laffont pour les très curieux. D’ailleurs, le premier de ces deux ouvrages est mentionné par Laurent Olivier dans la riche bibliographie à la fin du Pays des Celtes, ce qui n’empêche en rien la critique du point de vue « ethnique » sur les Celtes de Kruta, qui confond « l’extension des productions de la culture matérielle » avec des « phénomènes de migration de peuples, pour ne pas dire de mouvements de conquête ethnique » :

« Selon ce schéma, les Celtes, finalement, reviennent occuper la place laissée vacante par les Germains de la “préhistoire allemande”, qui, l’un et l’autre, avaient été défaits en 1945. Sur un fonds aussi poreux aux interprétations de l’archéologie raciale allemande, il n’est guère surprenant de voir se greffer des thèses visant explicitement à la réhabilitation des “Indo-Européens” ou plus exactement des “Indo-Germains”, tels que les avaient célébrés les anciens chercheurs du régime national-socialiste ».