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Antoine Blondin - quatre livres, par Didier Smal

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 19 Septembre 2017. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers

L’Europe Buissonnière (416 pages, 8,70 €), Les Enfants du Bon Dieu (272 pages, 8,70 €) et L’Humeur Vagabonde (208 pages, 7,10 €), Antoine Blondin, La Table Ronde/La Petite Vermillon, mai 2016

Blondin, Jean Cormier & Symbad de Lassus, éd. du Rocher, juin 2016, 204 pages, 16,90 €

 

On peut de bon droit être allergique à la manie de la commémoration culturelle en ce qu’elle est avant tout synonyme de commerce bien compris ; d’un autre côté, lorsque soudain réapparaît sur les présentoirs des librairies une partie de l’œuvre d’Antoine Blondin parce que celui-ci est décédé, à l’âge de soixante-neuf ans, il y a eu vingt-cinq ans le 7 juin 2016, on ne peut bouder son plaisir. D’une part, parce qu’on a regardé Un Singe en Hiver, le film de Verneuil avec Gabin et Belmondo dialogué par Audiard (1962), puis qu’on a trouvé au hasard des bouquineries (on était jeune et sans le sou) le roman annoncé au générique et qu’on s’est pris une seconde claque dans la figure : l’alcool, on le sentait d’instinct et le film le montrait magistralement, a sa noblesse, et celle-ci prenait corps dans ces quelque deux cents pages (mais Dieu que la nouvelle couverture chez Folio est moche et racoleuse !…).

Quarantaine, Jim Crace

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 13 Septembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Rivages poche, Iles britanniques, Roman

Quarantaine, mai 2016, trad. anglais Maryse Leynaud, 336 pages, 8,90 € . Ecrivain(s): Jim Crace Edition: Rivages poche

Jim Crace (1946), auteur anglais multi-primé, a publié en 1997 un curieux roman, à qui il a fallu douze ans pour trouver éditeur francophone et sept ans de plus pour aboutir dans une collection de poche ; ce curieux roman s’intitule Quarantaine et raconte ni plus ni moins qu’un épisode évangélique frappant, mentionné par Marc, Matthieu et Luc : le séjour de Jésus dans le désert et les tentations auxquelles le Diable se propose de le soumettre. Du moins Crace raconte-t-il l’histoire d’un pèlerin parmi d’autres se livrant à une retraite pénitentielle dans le désert de Judée assortie de jeûne diurne, la « quarantaine » du titre. Cinq personnages se retrouvent en même temps dans le désert, près de grottes dans lesquelles ils vont vivre et prier, trois hommes et une femme, et un cinquième, énigmatique par son silence et la distance qu’il maintient entre lui et les autres : « C’était un voyageur nommé Jésus, venu des vallées du Nord plus fraîches et cultivées, un Galiléen, peu habitué à ce genre de privations. Il avait passé la nuit dans la paille, hôte payant chez un berger, et ce matin il avait laissé sac, outre, sandales et bâton là où il avait dormi. Il accomplirait sa quarantaine sans le recours et les tentations des vêtements, de la nourriture et de l’eau. Il mettrait sa confiance en dieu, comme font les jeunes gens. Il allait rencontrer dieu ou mourir, point final. C’était pour ça qu’il était venu. Pour parler directement à son dieu. Pour laisser à son dieu le soin de lui fournir eau et nourriture. Ou laisser le démon accomplir son œuvre. Ce serait une épreuve pour tous trois »

La Ferme de Cousine Judith, Stella Gibbons

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 05 Septembre 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Belfond

La Ferme de Cousine Judith, trad. anglais Iris Catella, 352 pages, 15 € . Ecrivain(s): Stella Gibbons Edition: Belfond

 

 

L’œuvre de Stella Gibbons (1902-1989) n’est pas enseignée à l’université, et c’est dommage : on y rirait plus souvent. En tout cas, on rirait en lisant le premier roman de cet auteur anglais, La Ferme de Cousine Judith (1932), rencontre improbable entre les romans campagnards à la mode en Angleterre à l’époque, un rien misérabilistes, et la causticité de Jane Austen. Le ressort narratif est très simple : une jeune femme, Londonienne et orpheline depuis peu, décide de tenter de vivre aux crochets de sa famille, en apportant ses cent livres de rente, plutôt que chercher du travail. Après avoir envoyé quelques lettres et reçu des réponses peu encourageantes, elle décide de s’établir chez sa cousine Judith, dans le Sussex.

Fureur divine Une histoire du génie, Darrin M. McMahon

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 16 Mai 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, USA, Fayard

Fureur divine Une histoire du génie, trad. l’anglais (USA) Christophe Jaquet, 384 pages, 24 € . Ecrivain(s): Darrin M. McMahon Edition: Fayard

 

Nous vivons une époque géniale, où les génies se croisent au détour de la moindre page d’un magazine culturel, du moindre programme télévisé – cinéastes, acteurs, chanteurs, écrivains, sportifs, tous semblent s’être donné le mot pour nous abreuver de génie. Jusqu’à plus soif ou jusqu’à la nausée, au choix. L’esprit critique peut à tout le moins se montrer dubitatif face à cet assaut de génialité : il écoute, il voit, il lit, et se demande si tout cela est bien raisonnable.

C’est à ce stade de la réflexion qu’arrive à point l’essai de Darrin M. McMahon, historien américain spécialiste du XVIIIe siècle et déjà auteur d’un Happiness : A History (2006), dont la renommée anglo-saxonne appelle une traduction, surtout s’il est du même tonneau que le présent Fureur Divine. Une Histoire du Génie (2013, première publication en anglais), cet essai appartenant au genre peu couru en francophonie de l’histoire des idées. C’est-à-dire que l’essai de McMahon n’analyse pas une idée dans une époque donnée, mais en montre l’évolution au fil des siècles – en l’occurrence, de l’Antiquité grecque à l’époque actuelle, en sept chapitres d’une clarté limpide. Cet historique permet de comprendre comment ce mot, « génie », a pu passer de l’évocation du plus rare à celle du plus commun.

Petite Philosophie de l’Amour, Alain de Botton

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 06 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, J'ai lu (Flammarion)

Petite Philosophie de l’Amour, trad. anglais Raymond Las Vergnas, 318 pages, 7,10 € . Ecrivain(s): Alain de Botton Edition: J'ai lu (Flammarion)

A l’heure des réseaux sociaux, il est réjouissant de relire la Petite Philosophie de l’Amour (1993), premier roman de l’Anglais Alain de Botton (1969) : c’est comme s’offrir un bain de jouvence moderne dans une romance d’une époque qui semble à la fois tellement proche et tellement éloignée. Proche par certaines de ses préoccupations, par le mode de vie du narrateur et son aimée, Chloé ; éloignée par le temps et la façon dont il s’écoule, par la possibilité encore offerte de ne pas vivre dans l’instantanéité. Un roman serait à écrire sur l’amour au temps des communications fusant dans l’éther à toute vitesse ; ce n’est pas encore le cas pour cette histoire-ci.

Cette histoire-ci est donc narrée par un jeune homme moderne, qui prend l’avion pour se rendre de Paris à Londres et, contre toute probabilité (le calcul est effectué : une chance sur 5840,82), rencontre une jeune femme pour laquelle il a le coup de foudre. De cette rencontre inopinée naît une romance, racontée à la première personne en vingt-quatre chapitres aux titres programmatiques, puisque l’on va « Du Fatalisme Romantique » aux « Leçons de l’Amour » en passant par « De l’Authenticité », « Du Marxisme » (Groucho, pas Karl) ou encore « De la Peur du Bonheur ». Comme le montre l’intitulé de ces chapitres, cette romance est l’occasion pour Alain de Botton de poser quelques réflexions sur l’amour, sur le couple, sur l’attachement que l’on éprouve envers autrui.