Identification

Articles taggés avec: Talcott Mélanie

Mourir pour Kobané, Patrice Franceschi (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Mercredi, 21 Septembre 2022. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Mourir pour Kobané, Patrice Franceschi, éditions des Equateurs, 2015, 143 pages

 

« Quand les riches se font la guerre, ce sont les pauvres qui meurent », Jean-Paul Sartre

 

Mourir pour Kobané de Patrice Franceschi n’est ni un roman, ni un essai. Juste un témoignage d’un homme qui de 2013 à 2015, fut, sur le terrain, le spectateur volontaire d’une lutte farouche opposant un peuple, les Kurdes, à une organisation ultra-radicale sunnite, Daech, chacun prêt à mourir pour deux visions du monde aux antipodes l’une de l’autre. Un islam démocratique laïcisé, modernisé, réformé, prônant la liberté individuelle et collective, l’égalité entre les femmes et les hommes, le respect des minorités, la justice économique, modèle partagé par les Kurdes turcs et syriens face à un autre, d’une barbarie effroyable, Daech, ces « égorgeurs de Dieu ». Un islam laïc dont les islamo-conservateurs du Moyen et Proche Orient et également d’Europe, craignent la contagion lui préférant l’islam radical (1) dont l’inhumanité perverse et brutale signe l’irrationnel religieux, disposé au pire pour imposer leur foi. Awar Tamia, l’ami et l’interprète de Patrice Franceschi le résume fort bien : « Ils ont un projet et un rêve. L’exact contraire du nôtre. La charia contre le Code civil… ».

Anéantir, Michel Houellebecq (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Jeudi, 17 Février 2022. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Roman

Anéantir, Michel Houellebecq, Flammarion, janvier 2022, 736 pages, 26 €


Imaginez… Si l’on faisait des dégustations de livres comme on en fait pour le vin. Sans mention ni du nom de l’auteur, ni de l’éditeur, ni du titre. L’idée m’a toujours séduite, mais personne ne s’y est jamais risqué tant serait mise à mal la mythologie du Grand Ecrivain, sans parler de la médiocrité de beaucoup d’autres qui sont portés aux nues littéraires par une critique hypocrite et complaisante.

Si l’on soumettait à ce jeu le dernier Houellebecq, encensé avant même sa parution par une pléthore de journalistes et télévisions qui vantent sa couverture en carton martelé et le papier choisi par l’auteur pour « ne pas jaunir avec le temps », en supputent le contenu en se limitant à la quatrième de couverture et lui prédisent d’emblée un succès mondial (1), saurait-on que c’est du Houellebecq ? Pourrait-on encore fanfaronner que c’est notre « grantécrivain » hexagonal, « la star des lettres » « possédant la grandeur d’un Balzac » ? A mon avis, non. C’est du foutage de gueule, de la fake news marketing.

Enfant de salaud, Sorj Chalandon (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Mercredi, 06 Octobre 2021. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Grasset

Enfant de salaud, août 2021, 336 pages, 20,90 € . Ecrivain(s): Sorj Chalandon Edition: Grasset


« Si tu doutes de tes pouvoirs, tu donnes du pouvoir à tes doutes, et si tu ne connais pas tes blessures, tu leur donnes ton pouvoir. Si quelqu’un me guérit et me retire mon mal, j’entends aussi qu’il me hisse au niveau de conscience que j’aurais atteint si j’avais moi-même résolu ce que ce mal devait m’apprendre. S’il me laisse dans le même état de conscience après m’avoir retiré mon mal, il me vole l’outil de ma croissance que peut être cette maladie » (Taisha Abelar, Le Passage des sorciers)

Il y a des blessures intimes qui ne cicatrisent jamais. On a beau les enfouir dans un oubli mémoriel, conscient ou non, leur dénier l’évidence de nous avoir construit et nourri en nous une faiblesse passive, voire destructrice, ou au contraire un formidable appétit de vivre, elles continuent de suppurer sans jamais que l’on puisse se défaire de leur attrait méphitique. On y revient sans cesse, poussé par le besoin de comprendre ce qui échappe justement à notre compréhension et nous semble pour cela inacceptable. Ces fantômes que nous avons aimés, avant peut-être de les mépriser, voire de les haïr, hantent nos cimetières intimes.

Ayn Rand (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Vendredi, 20 Août 2021. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

Lire Ayn Rand, c’est pénétrer dans un ghetto intellectuel, un univers sulfureux, compliqué, fascinant, touffu, contradictoire et ambigu. La lecture de La Source Vive, de La Grève et de La vertu d’égoïsme, deux romans-plaidoyers, le premier écrit en 1943 et le second en 1957, et le dernier, une compilation d’articles publiés entre 1961 et 1964, n’est pas aisée, tant se mêle à l’intrigue une harangue apolégétique, parfois confuse, voire indigeste et souvent réitérative, des convictions de l’auteure. L’exercice ressemble à détricoter un pull sans jamais tirer un fil unique, d’autant plus qu’étant riches en digressions, il faut les lire et les relire pour s’imprégner du message d’Ayn Rand.

Pour saisir sa pensée, il faut d’abord la jalonner de quelques faits. Ayn Rand est née Alissa Zinovievna Rosenbaum, à Saint-Pétersbourg en 1905, au sein d’une famille de la petite bourgeoisie juive. Son père était propriétaire d’une pharmacie, et sa mère, femme au foyer, en charge de l’éducation de ses trois filles. Alissa avait douze ans lorsqu’en pleine première guerre mondiale, la Révolution Russe de 1917 renversa le tsar et le remplaça par le gouvernement provisoire d’Aleksander Kerenski, un régime parlementaire qui accorda l’égalité politique et juridique aux Juifs.

Ma Jian (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Vendredi, 13 Mars 2020. , dans La Une CED, Les Chroniques


« La vie : on croit avoir tout vu comme par la vitre d’une voiture qui roule à travers les villes, les foules, les campagnes, mais les choses n’ont fait que défiler ».

« La mémoire se fourvoie dans une histoire imaginaire qui ressemble à la vie. La petite enfance, l’âge amoureux, les jours malheureux : c’est le lot de tous. Pour nous qui menons des existences identiques, qui vivons dans les mêmes logements, avons les mêmes idées, les mêmes sourires, une crise de larmes ou un fou rire sont salutaires »

(Ma Jian, Nouilles Chinoises)

Journaliste, photographe, peintre, poète, être multifacette et turbulent, à l’allure peu orthodoxe, en rupture du monochromatisme dans lequel est enfermé le peuple chinois, Ma Jian est sommé en 1983 de faire son autocritique publique dans le cadre de la campagne contre la « pollution spirituelle » lancée par Deng Xiaoping (successeur de Mao).