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Articles taggés avec: Dutigny/Elsa Catherine

Monsieur Ladmiral va bientôt mourir, Pierre Bost (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 04 Décembre 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Gallimard

Monsieur Ladmiral va bientôt mourir, Pierre Bost, Gallimard L’Imaginaire Poche, août 2016, 103 pages, 8 € Edition: Gallimard

 

L’adieu à l’écriture romanesque :

Lorsque ce roman de Pierre Bost fut publié par les Éditions Gallimard en 1945, cela faisait plus d’une dizaine d’années que l’écrivain n’avait pas écrit de roman et que depuis 1940, il se consacrait essentiellement à l’écriture de dialogues puis de scénarios pour le cinéma en collaboration à partir de 1943 avec Jean Aurenche. Pourtant il fut dans l’entre-deux guerres un romancier précoce – son premier roman, Hercule et mademoiselle, fut publié alors qu’il n’avait que vingt-trois ans – très apprécié de ses contemporains et fort remarqué de Gallimard dont il deviendra un lecteur de manuscrits. En écrivant Monsieur Ladmiral va bientôt mourir, Pierre Bost, à l’évidence, savait qu’il faisait ses adieux à la littérature et l’on ne peut lire cet ouvrage sans avoir en permanence à l’esprit qu’il s’agissait pour lui d’une sorte de petit testament littéraire, comme l’analyse et le souligne avec sagacité François Ouellet dans la revue littéraire Nuit blanche.

Colombian Psycho, Santiago Gamboa (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mardi, 16 Mai 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Amérique Latine, Roman, Métailié

Colombian Psycho, Santiago Gamboa, Métailié, mars 2023, trad. espagnol, François Gaudry, 592 pages, 23 € . Ecrivain(s): Santiago Gamboa Edition: Métailié


Après Des Hommes en noir, traduit et publié aux Editions Métailié en 2019, Colombian Psycho est le second volet des enquêtes d’Edilson Jutsiñamuy, un procureur colombien originaire de l’ethnie indigène Huitoto et d’une journaliste d’investigation, Julieta, flanquée de son assistante Johana, une ex-guérillera des FARC.

« Une main solitaire émergeait de la terre, comme si elle s’était lassée de reposer au milieu des cailloux et des fourmis et voulait indiquer quelque chose. Ou dire simplement : Je suis là, maintenant vous devez m’écouter. /…/ Une sombre fleur au milieu de l’herbe et de la pierraille. Tels ces crabes noirs qui, sur l’ile de la Providencia, descendent pour pondre au bord de la mer et s’arrêtent en chemin, surpris par la lumière.

Une main abandonnée, poing fermé. Une tarentule immobile indiquant quelque chose ».

Imprécations nocturnes, Grégory Rateau (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Jeudi, 09 Février 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Poésie

Imprécations nocturnes, Grégory Rateau, Editions Conspiration, novembre 2022, 80 pages, 9 €

 

La note bleue

La nuit, l’insomnie, les cigarillos, la présence déchirante d’un Chet Baker puis quand revient le silence, du fin fond de l’obscurité, la brusque irruption des imprécations des fantômes familiers qui ne cessent de hanter le poète. La poésie peut célébrer la nature, chanter l’amour, comme elle peut explorer les ténèbres, celles que l’on porte en soi. Grégory Rateau a fait ce second choix. Mais est-ce un choix ou une nécessité vitale ? L’intensité des mots, des images, des souvenirs ébauchés, malaxés dans un maelstrom de sensations paradoxales, parfois antinomiques foudroie par l’authenticité qui s’en dégage.

Enfant de la nuit il veille

traverse la ville ivre de songes

un éclaireur pour ses frères

un maudit pour sa famille

De l’Assassinat considéré comme un des Beaux-Arts, Thomas de Quincey (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mercredi, 30 Novembre 2022. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Iles britanniques, Gallimard

De l’Assassinat considéré comme un des Beaux-Arts, Thomas de Quincey, Gallimard, Coll. L’Imaginaire, trad. anglais et préface, Pierre Leyris, 196 pages, 7,90 €

Cet essai de Thomas de Quincey fut écrit en trois fois sur des périodes différentes : une première partie publiée en 1827 dans le Blackwood’s Edimburgh Magazine, la seconde en 1839 et enfin le Post-Scriptum en 1854. Il faut sans doute situer l’époque où Thomas de Quincey écrivit ces trois articles avant d’aller plus avant. Avec un régime parlementaire le plus libéral d’Europe au XVIIIe siècle, la chrétienté anglaise a perdu de son pouvoir et a laissé une place vacante à l’art dans les occupations de la bourgeoisie britannique. Fin XVIIIe et début XIXe les ouvertures de galeries et les articles dans la presse se multiplient.

« L’art est devenu la forme suprême de l’activité humaine » déclare Tim Blanning dans son ouvrage The Romantic Revolution (Modern Library, 2011). Par ailleurs, depuis 1820 le romantisme dans la littérature anglaise a largement entamé son déclin. Pour ne citer qu’eux, Coleridge, l’un des proches de Thomas de Quincey a cessé d’écrire et Wordsworth, que l’auteur admire, est encore très connu et respecté, mais il ne produit plus de poésie ou très peu.

La vie sans histoire de James Castle, Luc Vezin (par Catherine Dutigny)

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 17 Octobre 2022. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Arléa, Roman

La vie sans histoire de James Castle, Luc Vezin, éditions Arléa, août 2022, 224 pages, 19 € Edition: Arléa

 

La démarche originale d’un historien de l’art

C’est en page 39 du roman de Luc Vezin que l’on découvre ce qui aurait pu être son incipit lorsqu’il écrit à propos de son projet d’écriture et de son personnage principal, James Castle : « /…/ manipulé plus que guidé par cette ombre insaisissable et changeante, je me suis laissé entraîner au gré des écritures, de l’épopée aux confessions sordides ou pleurnichardes ; j’ai fait balbutier un mutique et écrire un illettré ; j’ai tâté du pire journalisme, de la froide documentation ; j’ai ouvert des journaux intimes et violé une correspondance imaginaire. J’ai rapporté des légendes auxquelles je ne croyais pas et cédé aux slogans mensongers des réclames. J’ai chanté faux en écorchant l’anglais. Et, pour finir en beauté, j’ai voulu faire parler les murs d’une maison vide, derrière lesquels se cachait James, avant de sombrer dans la poésie, comme d’autres dans l’alcool ou le crime. Et, après tant d’années vagabondes, moi qui, comme disait mon père, “Cherchais une histoire”, je n’ai rien trouvé d’autre à écrire que “La vie sans histoire de James Castle” ».