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Rouge ou Mort, David Peace

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 21 Août 2014. , dans La Une Livres, Rivages, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman

Rouge ou mort (Red or Dead), traduit de l’anglais par Jean-Paul Gratias. 22 août 2014. 800 p. 24 € . Ecrivain(s): David Peace Edition: Rivages

 

« And you'll never walk alone...
You'll never walk alone. 
Walk on, walk on, with hope in your heart, 
And you'll never walk alone... 
You'll never walk alone. »*

 

Ce livre n’est pas un roman – bien qu’il soit romancé. Ce n’est pas non plus un récit historique, bien que tout y soit rigoureusement fondé sur la réalité vécue. Ce n’est pas enfin un grand poème, bien que la langue y soit l’objet d’un travail permanent de rythmique et de sonorités. Ce livre – ce grand livre – est une Messe solennelle, une suite de psaumes, un hymne sacré dédié au football. Au Liverpool Football Club. A son entraîneur historique Bill Shankly. A son public de supporters passionnés, les prolétaires de Liverpool. Ce livre est chanté à un million de voix pour la gloire éternelle des « Reds », les « rouges », ceux qui ne « marcheront jamais seuls »*.

Un homme au singulier, Christopher Isherwood

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Juillet 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Iles britanniques, Roman, Grasset

Un homme au singulier (A single man). Traduction de l'anglais Léo Dilé. Avril 2014. 175 p. 8,20 € . Ecrivain(s): Christopher Isherwood Edition: Grasset

 

Dire à chaque opus d’Isherwood qu’il s’agit d’un chef-d’œuvre va finir par paraître conventionnel. Et pourtant que dire d’autre en tout premier sur ce bijou de roman qu’est « un homme au singulier » ? Un condensé de vie, de douleur, de solitude et d’apaisement nous attend dans ce petit livre.

Une journée, une, dans la vie au crépuscule de George. Il est seul, envahi par le souvenir omniprésent de Jim, mort il y a peu et qui l’a laissé derrière, désemparé. La vie continue certes mais quelle vie ? Ecornée, étrangère à soi, orpheline. On ne se fait pas à la mort de l ‘autre, on vit autour d’une béance, d’un trou infini.

« Et c’est ici, presque tous les matins, que George, arrivé au pied de l’escalier, a cette sensation de se trouver soudain au bord d’une corniche à pic, brutalement creusée, aux arêtes vives – comme si la route avait été emportée par un glissement de terrain. C’est ici qu’il s’arrête pile et sait, avec une acuité à donner la nausée, presque comme pour la première fois : Jim est mort. Est mort. »

Les déserts de Jean-Marie Gustave Le Clézio (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 03 Juillet 2014. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

 

Je n’ai jamais éprouvé de grande passion à la lecture de Le Clézio. Tout au plus une sorte d’admiration froide pour la simplicité et le ciselage de son écriture. Mais je ne suis pas sûr que les livres de Le Clézio soient faits pour susciter de la passion. Ils sont a-passionnels, par une espèce d’évacuation parfaite de l’intérêt narratif. Il n’y a pratiquement pas d’histoires dans les romans de Le Clézio. Juste un cadre, un air, une mélopée, presque un assoupissement. On va dans un livre de Le Clézio comme on va se coucher le soir : c’est confortable, souvent voluptueux. Et puis on dort.

Le plus étonnant est que, quand on rencontre le personnage – je ne le connais pas personnellement, je veux donc dire à travers l’image et le son d’un plateau de télévision – on a le sentiment de continuer en quelque sorte la lecture d’un de ses livres. C’est sans passion, presque anodin, hors vie, mais impeccable, séduisant, précis, modeste.

Le petit déjeuner des champions, Kurt Vonnegut

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Samedi, 28 Juin 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, USA, Gallmeister

Le petit déjeuner des champions (Breakfast of champions), Traduction (USA) Gwilym Tonnerre, avril 2014. 312 p. 10,50 € . Ecrivain(s): Kurt Vonnegut Edition: Gallmeister

 

Disons-le d’entrée, peu importe l’histoire. Il paraît qu’il y en a une ! Mais on peut parfaitement l’oublier, dans tous les cas la mettre largement de côté ! Kurt Vonnegut ici ne raconte pas d’histoire ! Il règle ses comptes, avec l’Amérique, la modernité, le « progrès » ou plutôt la folie qu’on a affublée de ce nom.

Tout y passe : la publicité en tout premier lieu, cet affichage obscène, doublement obscène parce que vendant n’importe quoi à n’importe qui mais aussi avec des arguments qui tiennent à la une forme de pornographie permanente sous couvert de « communication ». C’est de cela que Kilgore Trout est censé parler lors d’un colloque.

« Il était supposé y participer à un colloque intitulé ‘L’avenir du roman américain à l’heure de McLuhan ». Il souhaitait déclarer lors de ce colloque : « Je ne sais pas qui est McLuhan mais je sais ce que c’est de passer la nuit avec une foule de vieux sagouins dans un cinéma new yorkais. Et si on parlait de ça ? »

La tante d’Amérique, Leonardo Sciascia

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 19 Juin 2014. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Folio (Gallimard), Italie, Nouvelles

La tante d’Amérique. Traduit de l'italien par Mario Fusco mars 2014. 85 p. 2€ . Ecrivain(s): Leonardo Sciascia Edition: Folio (Gallimard)

 

 

Avertissement au lecteur : ce tout petit livre est un pur moment littéraire ! Tout l’art de Leonardo Sciascia se retrouve condensé dans ce court récit de l’arrivée des troupes américaines dans un petit village italien. C’est à la fois un exemple limpide de l’écriture fluide et lumineuse de Sciascia – celle qui nous éblouissait dans le conseil d’Egypte ou Le Contexte – et un morceau savoureux de comédie italienne à la Vittorio de Sica ou Mario Monicelli, avec ses personnages déjantés, immoraux, bruyants, hypocrites, lâches et, finalement, furieusement attachants.

A commencer par le jeune narrateur, gamin type des rues villageoises du sud de l’Italie : dégourdi, un peu voyou, malin, qui adore repérer les imbéciles et les harceler. Sa rencontre avec les Gis est un vrai choc de civilisations !