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Le mariage de Pavel, Jean-Pierre Milovanoff

Ecrit par Stéphane Bret , le Samedi, 12 Mars 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Grasset

Le mariage de Pavel, octobre 2015, 202 pages, 17 € . Ecrivain(s): Jean-Pierre Milovanoff Edition: Grasset

 

Le mariage de Pavel est un roman sur l’exil : ses motivations d’origine, ses conséquences attendues ou imprévues, ses conditions de survenance, ses traces sur les vies des individus un jour ou l’autre concernés par cet acte. Pavel, personnage principal, est un russe blanc ; il a fui à l’âge de quinze ans sa famille et son pays pour échapper à une mort quasi-certaine, lui le jeune bourgeois issu d’une école militaire tsariste et à ce titre « ennemi de classe ». Après avoir traversé l’Ukraine dévastée par la guerre civile, il parvient à Sébastopol, gagne Constantinople et parvient enfin en France, où il devient ingénieur dans les Cévennes. Il y rencontre deux sœurs, Rénata, institutrice, et Odine, danseuse chorégraphe. Il épouse Renata. Un soir d’été, il décrit à son fils Jean-Pierre ce qu’il a ressenti, vraiment, depuis son départ de Russie. Et c’est toute une série d’impressions, de réflexions, de constats que nous livre Pavel, pour arriver à un état des lieux de l’exil presque complet. Ainsi, il examine les conditions de décision, les circonstances qui déclenchent ce choix :

« On doit faire vite quand on vit sous la menace. Il n’y a pas de place pour les tergiversations. Ni pour les regrets. On s’exile par nécessité, souvent dans l’urgence, quelquefois avec enthousiasme ».

Kannjawou, Lyonel Trouillot

Ecrit par Stéphane Bret , le Mardi, 16 Février 2016. , dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Roman

Kannjawou, janvier 2016, 208 pages, 18 € . Ecrivain(s): Lyonel Trouillot Edition: Actes Sud

 

Le vocable « Kannjawou » signifie dans la culture populaire d’Haïti le partage, la fête, à l’occasion de réjouissances. Dans le roman de Lyonel Trouillot intitulé ainsi, ce dernier met en scène cinq jeunes gens, qui à la veille de leur entrée dans l’âge adulte, osent encore rêver de leurs avenirs : ils se nomment Sophonie, jeune serveuse au Kannjawou, nom d’un bar du quartier de l’Enterrement à Port-au-Prince, Wodné, Joëlle, Popol. Leur soutien quotidien, c’est man Jeanne, mère de substitution un brin protectrice, qui tente de sauvegarder des règles d’humanité et prodigue des conseils à ces cinq adolescents, peut-être déjà en danger de perdition. Un autre personnage, le « petit professeur », tente grâce à sa vaste bibliothèque de leur inculquer des bribes de connaissances, de l’éducation.

Mais comment cela est-il réalisable dans ce pays, Haïti, dont l’auteur nous rappelle, très opportunément, qu’il a été occupé une première fois par les Américains, de 1915 à 1934, et qu’il est occupé une seconde fois par les ONG, les organisations non gouvernementales, depuis le récent tremblement de terre de 2010. Ce que met en relief Lyonel Trouillot, c’est le décalage entre les bonne intentions de ces occupants, et la réalité haïtienne :

La nuit de Zelemta, René-Victor Pilhes

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 28 Janvier 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Albin Michel, Roman

La nuit de Zelemta, janvier 2016, 185 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): René-Victor Pilhes  Edition: Albin Michel

 

Trois personnages sont présents dans ce roman : Jean-Michel Leutier, élève au lycée Pierre-de-Fremat à Toulouse durant l’année 1953. Il est pensionnaire, originaire d’Algérie, de Ain-Temouchent en Oranie, localité située entre Sidi Bel Abbès et Béni Saf, d’où sa mère est native. Son père l’a envoyé en France où il retrouve à Albi une de ses sœurs, institutrice. Il tombe amoureux d’une jeune Albigeoise, Rolande Jouli, sœur de Jacques, son meilleur ami de lycée.

Le deuxième est Abane Ramdane, l’un des chefs historiques du FLN, qui a participé au déclenchement de l’insurrection de 1954, et a été emprisonné à plusieurs reprises dans différentes prisons en Algérie et en France, puis transféré à Albi en 1953.

Le troisième personnage est le « petit curé », sobriquet donné par Jean-Michel Leutier à l’aumônier de son régiment où il accomplit son service militaire, comme officier, en 1957 dans la région de Zelemta. Tout le roman est articulé autour des récits respectifs de ces derniers, avec retours en arrière, mises en perspective et en abyme.

Les chemins de la fraternité, Jean-François Nahmias

Ecrit par Stéphane Bret , le Jeudi, 21 Janvier 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Albin Michel, Roman

Les chemins de la fraternité, novembre 2015, 518 pages, 22 € . Ecrivain(s): Jean-François Nahmias Edition: Albin Michel

 

Le personnage central de ce roman est Frédéric Legendre, en rupture avec sa famille et sa condition d’origine : son père dirige avec beaucoup d’autoritarisme et de dureté vis-à-vis de ses salariés une entreprise de confection consacrée à la fabrication de boutons. Le différend familial prend sa source dans un accident de travail dont est victime une ouvrière de l’usine. Frédéric Legendre décide de partir pour Paris. Il s’agit du Paris du Second Empire, en l’année 1865.

Les premiers temps sont difficiles, marqués par une grande précarité matérielle, jusqu’à ce que notre jeune homme en recherche d’une nouvelle orientation à sa vie se mette au service d’un libraire nommé Amédée Silvestri, qui lui attribue comme tâche de ranger ses manuscrits par ordre alphabétique. Il rencontre également des personnages tels que Raoul Rigault, agent très officieux des milieux révolutionnaires de Paris, Augustin Grandier, autre militant, et aussi Eugène Varlin, alors chef du syndicat des relieurs qui jouera un rôle-clé dans la Commune de Paris.

Monarques, Sébastien Rutes, Juan Hernandez Luna

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 04 Décembre 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Albin Michel, Roman

Monarques, août 2015, 384 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Sébastien Rutes, Juan Hernandez Luna Edition: Albin Michel

 

Voilà un récit étonnant, riche en rebondissements, d’une puissance d’évocation rare ; et qui pose des questions essentielles au-delà de l’apparente superficialité de la trame.

Cette dernière s’appuie sur un échange de correspondances entre Jules Daumier et Augusto Solis. Ce dernier, homme du monde des arts mexicains, travaille pour le cinéma ; il est fasciné par une certaine Loreleï Lüger, actrice de son état, mais dont les suites du récit vont faire de plus en plus douter de son rôle et de son identité véritables.

C’est Jules Daumier, garçon de course au journal L’humanité qui lui répond en lieu et place de cette Loreleï pour lui indiquer son absence de Paris et promettre dans la foulée à cet interlocuteur épistolaire de la retrouver, de lui donner des informations sur son égérie dès que Jules Daumier le pourra. Il s’ensuit un échange de correspondances passionnantes : on y découvre ainsi le Paris des années 30, celui de la préparation du Front populaire, celui du Vel d’Hiv, lorsque ce lieu sportif n’était encore qu’un stade dans lequel on pouvait assister à des courses cyclistes, des matchs de catch qui font apparemment vibrer notre coursier :