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Les paradoxes du lampadaire suivi de A NY, Marc Tison

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 16 Mars 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Les paradoxes du lampadaire suivi de A NY, textes, collages et photos de Marc Tison (autoédition) . Ecrivain(s): Marc Tison

 

Un recueil élancé, format vertical sur papier lisse et luisant comme une ville la nuit, un remix/réécriture d’un texte publié dans la revue collective « Numéro 8 » en 2008 suivi de A NY, remix/réécriture d’un texte publié par « contre-poésie » en 2011.

« La ville est une arythmie (…) constance de la règle : l’urbain bruit ». Magistralement rendue ici par Marc Tison, la ville, sa schizophrénie jour/nuit, ses monstres, ses perditions et ses « fausses nostalgies des solitudes paisibles/ Dans l’indifférence speedée des changements de métro ». Une langue qui claque, qui swingue, qui râpe et dérape sur le béton, le bitume, aiguillonne le lecteur, le pousse, le bouscule de boulevards rutilants en « sombres chemins de rescousses », de fantasmes en sordides réalités, sans jamais céder à la facilité d’un hymne bidon à une urbanité trop souvent à la limite du bidon elle aussi, au contraire l’auteur, lucide, nous livre la désintégration des romantismes/ Ravalement des façades à l’heure du dégueuli.

Bleu éperdument, Kate Braverman

Ecrit par Cathy Garcia , le Mercredi, 11 Mars 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, USA, Quidam Editeur

Bleu éperdument, janvier 2015, traduit de l’anglais (USA) par Morgane Saysana, 245 pages, 20 € . Ecrivain(s): Kate Braverman Edition: Quidam Editeur

 

 

Elles sont plusieurs, et parfois elles semblent n’être qu’une, quelle que soit leur condition sociale, toutes ces femmes que l’on découvre au fil des pages de Bleu éperdument. Ces fragments de vie rassemblés comme autant de nouvelles nous plongent dans un état fiévreux, à grand renfort d’alcool, de drogues dures ou douces et d’échappées plus tropicales : Hawaï comme un appel, refuge autant que lieu de perdition au sens premier du terme. Des femmes, célibataires, divorcées, mariées, mères ou pas, et des hommes, absents, ombres fantômes ou tortionnaires, qui les retiennent, les plombent, les manipulent, les tyrannisent, souvent des ratés, des épaves qui les tirent vers le bas, ces mères souvent seules avec leur fille… D’ailleurs l’amour, s’il y en a, est principalement maternel. De cet amour béton qui fait tenir debout envers et contre tout.

Si nous vivions dans un endroit normal, Juan Pablo Villalobos

Ecrit par Cathy Garcia , le Mercredi, 25 Février 2015. , dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Amérique Latine, Roman

Si nous vivions dans un endroit normal, octobre 2014, traduit de l’espagnol (Mexique) par Claude Bleton, 190 pages, 17 € . Ecrivain(s): Juan Pablo Villalobos Edition: Actes Sud

 

« Va te faire voir chez ta salope de mère, connard, enfoiré de merde ! » Ainsi débute ce succulent roman, juteux à souhait, un jus plutôt amer, mais drôle, terriblement drôle. De cet humour typiquement latino-américain, qui permet de témoigner des pires travers de la société avec un pied de nez à l’humiliation et l’injustice. Ici il s’agit du Mexique des années 80, avec ses absurdités (un pays surréaliste, avait dit Breton), sa mélasse de corruption, de trafics, de dangereux bouffons politiques, de fraude électorale, abus de pouvoir et compagnie. Dans le village de Lagos de Moreno, entre bétail, prêtres, ouailles hallucinées, élus véreux et démagogues, nationalistes populistes et autres illuminés, vit la famille d’Oreste, dit Oreo, comme les biscuits du même nom. Ou disons plutôt que la famille vit au-dessus du village, au sommet d’une colline, la Colline de la Foutaise. Lui et ses six frères et une sœur, tous affublés de prénoms grecs, lubie du père professeur d’éducation civique, et la mère, dévouée à la préparation des quesadillas au fromage. Base quasi unique de l’alimentation familiale et dont l’épaisseur et le nombre oscillent comme le statut familial, entre classe moyenne et classe pauvre, avec une tendance à stagner dans cette dernière.

Barbarie 2.0, Andrea H. Japp

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 10 Février 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Flammarion

Barbarie 2.0, septembre 2014, 436 pages, 21 € . Ecrivain(s): Andrea H. Japp Edition: Flammarion

 

Quand Yann Lemadec, analyste de données, spécialisé en psychologie à la Brigade d’intervention secondaire, est discrètement recruté par Henri de Salvindon, grand patron de la DCRI, pour enquêter sur le meurtre sordide de Thomas Delebarre, un avocat général, Yann se doutait bien que les choses n’étaient pas très claires, pas plus que le rôle qu’on allait lui faire jouer. Il était trop fin limier sur le fonctionnement humain pour ne pas avoir senti l’opacité de l’affaire, mais il était loin d’imaginer qu’il venait de mettre le pied au cœur d’un affrontement d’une envergure telle, que le sort de l’humanité pouvait en dépendre. Il était loin d’imaginer à quel point cela allait le dépasser.

L’enjeu est de taille et les deux groupes qui s’affrontent en secret sont tout aussi impitoyables l’un que l’autre. Ce qui les différencie c’est que l’un lutte et complote pour défendre sa caste au mépris de tout le reste, avec cynisme et avidité, seul compte le profit, toujours plus de profit, et l’autre lutte pour préserver l’espèce, quitte à en modifier un peu les gênes pour être de taille à lutter. Yann quant à lui, breton, beau mec, intelligent, gentil, cultivé, fait partie d’un groupe en voie de disparition, celui des électrons-libres, philosophes, humanistes et un peu rêveurs, qui ne peuvent concevoir d’aussi extrêmes radicalisations.

Le septième jour, Yu Hua

Ecrit par Cathy Garcia , le Samedi, 31 Janvier 2015. , dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Asie, Roman

Le septième jour, octobre 2014, traduit du chinois par Isabelle Rabut et Angel Pino, 272 pages, 22 € . Ecrivain(s): Yu Hua Edition: Actes Sud

 

Le septième jour est un récit étrange, envoûtant, d’un humour délicat qui joue avec l’absurde et d’une grande tristesse, qui fait le va et vient entre les souvenirs d’une vie dans l’ici-bas et la douceur et la fantaisie poétique d’un au-delà. Sous cette apparence inoffensive, c’est surtout une façon de pointer les inégalités et les problématiques de la société chinoise contemporaine. Un récit découpé en sept chapitres, du premier au septième jour après la mort du narrateur, ce qui rappelle forcément les sept étapes de la création du monde dans le mythe biblique, mais s’inspire aussi de croyances traditionnelles chinoises à propos des sept jours pendant lesquels, après sa mort, l’âme du défunt erre autour de sa maison avant de rejoindre sa sépulture.

Yang Fei, le narrateur, meurt à la suite d’une explosion accidentelle dans un restaurant. C’est alors que la morgue l’appelle pour lui dire qu’il est en retard pour son incinération et qu’il doit se dépêcher d’arriver. Ainsi débute son errance dans cette nouvelle dimension, de l’autre côté de la très fine membrane qui sépare le monde des morts de celui des vivants.