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Soleil patient, Gabrielle Althen

Ecrit par France Burghelle Rey , le Mardi, 02 Mai 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Arfuyen, Poésie

Soleil patient, 142 pages, 14 € . Ecrivain(s): Gabrielle Althen Edition: Arfuyen

 

Dès le texte liminaire, les choses s’inversent : « Le mot arrive / puis il nous dévisage » au moment où la poète, dans l’appartenance à un groupe, réfléchit à une marche collective sans savoir « où va le temps » lui-même.

Des textes apparemment sans lien entre eux ne semblent obéir ni à une structure propre ni à une structure commune et offrent au rythme sa variété. On distingue, à ce sujet, une certaine obéissance au mètre et parfois également à la rime ; des surprises, d’autre part, sont ménagées comme, par exemple, quand deux versets se font face.

L’écriture, contemporaine dans la mesure où elle refuse de se plier au commentaire, ne renonce cependant pas à la beauté sincère de la métaphore : « Des perles manquent au chapelet de la parole » ou aux allitérations et aux assonances : « la foret verte égrène ses vertèbres », « Le val est vert et la saison profonde ». Rythme oblige. Ainsi lit-on encore des chutes qui chantent notamment à l’occasion d’interrogations récurrentes, de questions sur l’être, le temps, l’ailleurs.

Variations du visage & de la rose, Béatrice Bonhomme

Ecrit par France Burghelle Rey , le Jeudi, 20 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Variations du visage & de la rose, L’Arrière-Pays, 2013 . Ecrivain(s): Béatrice Bonhomme

 

Dès le début du recueil, à la lecture des versets qui évoquent la nature, la chatte, puis la statue d’un visage, celui du peintre qui a vécu dans la maison, comme le dit l’exergue en italiques, le lecteur est sensible au thème sous-jacent du temps. De ce fait, à la 3° page, sonnent, à la façon des quatre notes de la 5° Symphonie, les quatre syllabes d’un « Tu te souviens ». Le choc est d’autant plus grand que Béatrice Bonhomme n’hésite pas à écrire « beau » et à choisir notamment la plus belle des fleurs, la rose, qu’elle soit réelle ou imaginaire pour laisser l’émotion envahir son texte. On y retrouve les accents que la poésie de Lydie Dattas, dont l’œuvre revendique la « beauté », a offert en son temps dans Le Livre des Anges-II : « Les roses respiraient le parfum de ton âme / ces roses mouraient en même temps que toi ». Sauf qu’ici, il y a une rose qui « brûle » encore.

C’est à propos de cette rose, de son cœur et de sang qu’au texte 4 le symbolisme des couleurs allié aux triples répétitions et au rythme des versets honore le souvenir du père disparu. S’y rencontre aussi, dès la décision du titre, un parti-pris de musique composée de variations et de leitmotivs qui définissent les litanies.

Invention de la terre, Philippe Delaveau

Ecrit par France Burghelle Rey , le Vendredi, 07 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Gallimard

Invention de la terre, 128 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Philippe Delaveau Edition: Gallimard

 

Après le silence d’entrée de deux beaux haïkus, le recueil s’ouvre sur la quiétude du foyer et de la nature au moyen de la liberté chantante du mètre. Tout au long seront convoqués, notamment, les lieux chers et les visages des maîtres en vers brefs ou longs jusqu’à former des versets. C’est ceux-là qui occupent les distiques mimant le roulement du train du poème Transsibérien.

Le charme du texte réside à la fois dans la prégnance du réel et d’une forte spiritualité annoncée par les citations en exergue. Un panthéisme – « quel secret lie les peupliers à leurs fuseaux ? » – fête en quelque sorte l’ensemble que couronne la présence des anges. La voici liée à l’élément marin :

« Et cette baie resplendissante et calme où frémissent les anges ».

Même si cette présence est invisible elle est porteuse de vérité car c’est sur elle que ceux-ci veillent.

Ne peut-on pas supposer que ce sont ces anges invisibles qui aident le poète à inventer sa terre ? A la fin de l’ouvrage une note donne son explication au titre : « la poésie nous découvre-t-elle pas… le territoire sans limites qui s’étend hors de nous ».

Ma famille de cœur, Carole Weisweiller

Ecrit par France Burghelle Rey , le Jeudi, 09 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Biographie

Ma famille de cœur, éd. Michel de Maule, novembre 2016, 112 pages, 17 € . Ecrivain(s): Carole Weisweiller

 

La « famille » de Carole Weisweiller, fille de cœur de Jean Cocteau.

Le livre de Carole Weisweiller est, sur l’amitié, un modèle du genre. Il réjouira les plus anciens des lecteurs qui ont connu, du moins de noms, sa « famille de cœur », et ouvrira aux plus jeunes des horizons nouveaux sur le XX° siècle.

La vente de la Villa Santo-Sospir aux fresques peintes par Jean Cocteau a probablement amené Carole, sa propriétaire, qui « fermait un chapitre important de (sa) vie » à faire le récit des amitiés qui l’ont marquée après la mort du Poète.

C’est bien sûr Jean Marais, le bien-aimé de toute une génération d’adultes et d’enfants, son « grand frère » – son dernier lien avec Cocteau – qui est à l’honneur du premier chapitre. Jusqu’au cimetière de Vallauris où celui-ci repose et où elle lui a dit adieu, Carole raconte les spectacles, les fêtes, les émissions, tout ce qui a pu approfondir leur amitié.

Les Livres et la vie, Jacques Ancet

Ecrit par France Burghelle Rey , le Lundi, 20 Février 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Poésie

Les Livres et la vie, éditions Centrifuges, 2015, 130 pages . Ecrivain(s): Jacques Ancet

 

« La poésie, c’est le bruit que fait le monde quand je parle » (1)

« Le poème n’existe pas, seule existe la trace qu’il en reste » (2)

Pour le lecteur, surtout s’il est lui-même écrivain, l’essai de Jacques Ancet est un livre complet, une bible dans laquelle, avec une mémoire chronologique parfaite de son travail, celui-ci évoque tout ce que l’on peut attendre comme expériences poétiques, comme influences orales et écrites ou comme aventures éditoriales. C’est l’ouvrage que chaque poète ne peut que souhaiter réaliser un jour.

Après le « flot verbal », de nouveaux écrits naissent qui, au-delà du ton baroquisant, sous l’influence sans doute des traductions espagnoles, vont plus loin. C’est le moment aussi, après les récits d’une grand-mère et la lecture de Giono, pour « d’autres lectures essentielles » : Jaccottet, Paz ou Nietzsche, et pour la découverte du fait que la poésie est à la fois « quête de racines » et plongée dans l’ici et le maintenant.