En caricaturant de façon plaisante, on peut diviser les amateurs de littérature en deux catégories : ceux qui adorent Erskine Caldwell (1903-1987) et ceux qui n’ont jamais lu La Route au Tabac (1932) ou Le Petit Arpent du Bon Dieu (1933). Les premiers savourent des romans truculents où toute la bonne société bien pensante du Sud des Etats-Unis est écornée au passage ; les seconds ont tout le temps de s’y mettre, d’autant que les éditions Belfond ont décidé de donner à la bibliographie de Caldwell une seconde jeunesse, et que, après Le Bâtard en 2013, c’est au tour de Haute Tension à Palmetto d’entrer dans la collection Vintage de cette maison d’édition.
Ce roman, publié en anglais en 1950, bénéficie désormais, outre d’un titre digne de la Série Noire aux grandes heures de Marcel Duhamel, d’une couverture pop-art représentant une jeune femme aussi avenante qu’alanguie, le tout avec une forte dominante rouge ; plus attirant pour l’œil, on fait difficilement mieux. Reste à vérifier si le ramage vaut bien le plumage et, comme d’habitude avec Caldwell, on est servi : Haute Tension à Palmetto est une charge féroce contre la bêtise, n’épargnant personne, à commencer par son héroïne, Vernona Stevens, jeune institutrice portant un pullover jaune moulant un peu trop bien ses formes voluptueuses et attirantes pour tous à Palmetto, riante bourgade de cinq cent quarante-huit habitants dont les bancs des deux églises, méthodiste et baptiste, sont pleins chaque dimanche.