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Les Livres

Revue numérique Possibles

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 12 Mai 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Revues

nouvelle série, numéro 5, février 2016

 

Le poète et critique Pierre Perrin (1950) a, il y a quelques mois, relancé sur internet une revue de poésie, du même nom que celle qu’il avait tenue dans les années 75 et 80, papier celle-là (21 numéros, dont des numéros consacrés à Jean Breton et Yves Martin). A la belle appellation de Possibles répondent toutes les attentes d’un genre souvent négligé, voire malmené aujourd’hui, quand il n’y en a plus que pour le roman de grande audience et que le lectorat de poésie se réduit à peau de chagrin. Belle initiative donc pour hâter, qui sait ? une résurgence heureuse.

Signoret ou la traversée des apparences, Chantal Pelletier

Ecrit par Pierrette Epsztein , le Mercredi, 11 Mai 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, Editions des Busclats

Signoret ou la traversée des apparences, septembre 2015, 128 pages, 12 € . Ecrivain(s): Chantal Pelletier Edition: Editions des Busclats

 

Au départ du livre Signoret ou la traversée des apparences, paru en 2015 aux éditions des Busclats, Chantal Pelletier nous avertit d’emblée : « Simone Signoret ne me passionnait pas… », en fait, ce livre est une commande d’une productrice de la télévision.

Répondant à cette demande, peu à peu l’auteur va se prendre au jeu avec des sentiments contradictoires, perplexité, agacement puis « une rêverie » a surgi en elle pour « cette femme puissante », figure féminine française du XXème siècle. Elle aurait même souhaité la rencontrer, en faire une amie.

Cette femme, finalement, l’entraîne dans son sillage. Lecteur, ne vous y trompez pas, Chantal Pelletier ne rédige pas une biographie, non pas du tout. L’écrivain se prend d’affection pour le personnage qu’elle donne d’elle à l’image et surtout pour la personne de cette « femme puissante ». C’est en tant que femme engagée qu’elle va la suivre. Et nous allons cheminer avec elle dans un portrait à facettes. Elle va nous dévoiler son parcours glorieux, chaotique, déchiré, déchirant, exaltant, celui d’une femme au parcours d’une femme « au cœur battant qui a bravé beaucoup de tabous, a osé ce que personne n’avait osé avant elle et que personne n’osa après elle ».

Landfall, Ellen Urbani

Ecrit par Guy Donikian , le Mercredi, 11 Mai 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Roman, Gallmeister

Landfall, mars 2016, trad. américain Juliane Nivelt, 298 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Ellen Urbani Edition: Gallmeister

 

Il faut le dire d’emblée, Landfall est un premier roman réussi à différents titres. La quatrième de couverture le présente comme un « roman haletant qui présente le destin croisé de deux jeunes filles ». Ces deux appréciations se révèlent judicieuses quand on entre immédiatement dans le livre. D’un chapitre à l’autre, l’envie de connaître la suite fait qu’on ne lâche pas facilement le volume, tant cette façon d’offrir aux personnages une épaisseur avec la narration progressive de leur histoire est captivante.

Deux femmes roulent en direction de la Nouvelle-Orléans pour porter secours aux sinistrés de l’ouragan Katrina. Nous sommes en septembre 2005, Rose, dix-huit ans, et Gertrude, sa mère, ont des rapports conflictuels comme dans beaucoup de familles. « Bien que Rose eût depuis longtemps oublié les contours du corps de Gertrude, elle soutenait, comme le font beaucoup de filles à dix-huit ans, qu’elle savait tout ce qu’il y avait à savoir sur sa mère. Tu es tellement prévisible ! lâchait-elle avec mépris lorsqu’elle était agacée, reprochant avant tout à Gertrude d’être aussi immuable ».

On ne Badine pas avec l’Amour, Alfred de Musset

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 10 Mai 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard), Théâtre

On ne Badine pas avec l’Amour, novembre 2015, dossier par Alain Guyot, 208 pages, 3,50 € . Ecrivain(s): Alfred de Musset Edition: Folio (Gallimard)

L’avantage de l’édition à objectif scolaire, c’est qu’elle ramène dans les rayons avec une belle régularité des œuvres parfois quasi disparues ou disponibles dans des volumes façon Pléiade, et le chaland, le commun des lecteurs à petite bourse ou habitudes de lectures voyageuses (bus, tram, train) peut se frotter à nouveau à ces œuvres. Va donc pour une réédition en FolioPlus de la pièce On ne Badine pas avec l’Amour (1834), d’Alfred de Musset (1810-1857), et une (re)découverte en règle – car chez FolioPlus, il y a le texte de l’œuvre à proprement parler et une documentation critique aussi bien pesée (point trop n’en faut) qu’exacte dans ses informations (après tout, le public visé est avant tout scolaire, il s’agit de ne pas raconter des bêtises).

D’abord, il y a la pièce, inchangée et toujours aussi percutante, dont l’histoire est digne de Molière multiplié par Marivaux : un Baron attend son fils, Perdican, et sa nièce, Camille, l’un diplômé de l’Université, l’autre sortant du couvent, les deux destinés par leur père et oncle à être mariés ensemble. Entre confusions, prises de position quasi hargneuses, quiproquos et autres considérations sur l’amour, cette brève pièce reste un festival de bons mots, hardiment lancés façon lances dans le cœur plutôt que flèches, certains d’une vigueur toujours étourdissante aujourd’hui, à l’exemple de cette mini-tirade de Perdican, qu’on ne peut que citer intégralement tant elle touche au sublime et refuse avec front de vieillir, de prendre la moindre ride :

Le Mort, Pascale de Trazegnies

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 10 Mai 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman

Le Mort, éd. Weyrich, Coll. Plumes du Coq, février 2016, Préface de Michel Host, 13 € . Ecrivain(s): Pascale de Trazegnies

Il arrive que des fictions soient des lettres d’amour qui ne s’écrivent pas. Et il existe dans ce cas quelque chose d’unique, d’autant qu’il s’agit là d’un amour filial contrarié. De son père comme de sa mère, Lou l’héroïne aura connu la cendre plus que les flammes. C’est pourquoi il existe chez Pascale de Trazegnies du Bettina Rheims et du Catherine Millet mais surtout du Bataille – auquel le titre de son roman (mais pas seulement) fait irrémédiablement penser. La comédie humaine tourne au-delà du drame. Le père qui vient de mourir n’a jamais été présent pour sa fille. D’où lors de cette mort – et le retour en amont qu’elle entraîne – la dérive finale dans (et entre autres) le stupre et la fornication comme ultime parade ou danse macabre. Cela fait penser à La Notte d’Antonioni et La Ronde de Max Ophüls. Le roman échappe à la simple narration pour atteindre une fonction supérieure. Ce n’est en rien une enluminure mais un envoi avec forcément fin de non recevoir par le principal intéressé.

Le roman crée un cairn avec ses pierres rapportées du passé et de la douleur. Il s’arrache à la procédure personnelle (expéditeur-receveur) pour atteindre une portée générale : beaucoup pourront se reconnaître dans une telle histoire sans suivre pour autant le « délire » terminal de l’héroïne.