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Les Livres

Championnes, Lorraine Kaltenbach, Clémentine Portier-Kaltenbach

Ecrit par Jean Durry , le Mardi, 16 Août 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Flammarion, Histoire, Albums

Championnes, octobre 2015, 192 pages, 35 € . Ecrivain(s): Clémentine Portier-Kaltenbach et Lorraine Kaltenbach Edition: Flammarion

 

Des sentiments mêlés. C’est ce que l’on ressent en fermant ce livre attrayant, à la présentation très soignée, révélateur de certains destins trop ignorés, et riche en illustrations recherchées et peu connues.

Premier contact : très favorable. En sept chapitres – « vétérantes » (néologisme hardi auquel on aurait volontiers substitué « pionnières »), femmes du monde, filles du peuple, enfants de la balle, touche-à-tout, discriminées, militantes –, les deux auteurs – ou faut-il dire auteures ? – tressent vingt-neuf biographies, et fixent le processus du long combat mené par les femmes pour affirmer leur légitimité pleine et entière à vivre le sport de compétition, ce domaine si longtemps identifié comme quasi exclusivement « masculin ». Elles rendent ainsi hommage à des athlètes méconnues, aux fortes personnalités, qui ont fait contre vents et marées progresser la bonne course et changer la place et le statut du sexe présumé faible dans un univers pour le moins misogyne.

Histoire du silence, Alain Corbin

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Mardi, 16 Août 2016. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Albin Michel

Histoire du silence, avril 2016, 216 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Alain Corbin Edition: Albin Michel

 

Dans ce court essai d’une grande densité, Alain Corbin nous rappelle combien le silence nous constitue et pourtant combien nos sociétés, inondées d’images et de paroles, le fuient alors que par le passé « on en goûtait la profondeur et les saveurs ». Qu’il évoque l’intimité d’une chambre, celle d’une rencontre amoureuse, celle des instants partagés avec la nature, ou des rituels mystiques ou religieux, il est aussi emblématique de certains lieux (maisons, chambres, corridors, églises, prisons, bibliothèques, forteresses). Alain Corbin dresse une Histoire du silence comme un rappel de son importance dans l’Art et la Littérature, mais aussi dans nos vies, pour preuve son vocabulaire, ses mystères et ses tactiques, ses déplacements même de l’amour à la haine jusqu’au tragique qu’il transporte avec lui.

C’est dans la littérature surtout que Alain Corbin va puiser tout d’abord des références innombrables, et notre sensibilité frottée à celle des auteurs qui l’ont recherché et accueilli dans leur quête esthétique s’en trouvera confortée en puisant dans les très nombreuses citations rapportées par l’historien.

D’ombres et de flammes, Pierric Guittaut

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 09 Juillet 2016. , dans Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Roman, Série Noire (Gallimard)

D’ombres et de flammes, mai 2016, 299 pages, 18 € . Ecrivain(s): Pierric Guittaut Edition: Série Noire (Gallimard)

 

Il y avait eu cette Fille de la pluie, que la CL avait beaucoup aimée, déjà grandement marquée du sceau de l’originalité, et voilà ce D’ombres et de flammes. Pierric Guittaut n’écrit visiblement pas les polars de tout le monde ; fussent les impeccables productions de la Série noire Gallimard. Cet homme écrit de forts beaux et prenants romans, à part entière et constamment à part ; il se trouve qu’en plus, ce sont des polars.

L’homme vit en Berry, versant solognot ; pays des « jeteux de sorts ». Solitudes forestières, landes, bruyères, eau d’étangs improbables, et brume jusqu’à pas d’heures. Légendes et nature hautement inquiétantes, imbriquées forcément ; bêtes – peut-être, esprits – sans doute ; sorciers – toujours…

Le titre – sonorités d’un bon vieux western, ce qu’est aussi ce livre – aurait pu être un simple « part d’ombre », résumant le héros, major de gendarmerie, Remangeon, qu’une mutation quasi disciplinaire (et déjà maléfique) rabat pile dans son village natal de Sologne : « Treize années depuis sa dernière visite ; treize, comme pour confirmer le sort mauvais qui s’acharne sur moi… »

American Housewife, Helen Ellis

, le Samedi, 09 Juillet 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Nouvelles, La Martinière

American Housewife, juin 2016, trad. anglais (USA) Sophie Brissaud, 208 pages, 18 € . Ecrivain(s): Helen Ellis Edition: La Martinière

 

La première des 12 nouvelles qui composent ce recueil, Ce que je fais de mes journées, détaille d’emblée la frénésie de la journée d’une new-yorkaise résidente de l’Upper East Side. Courses, tâches ménagères, réceptions, banalités d’usage, photos et vacheries sur le physique de quelques autres invitées. Le ton est donné.

Les nouvelles suivantes nous dépeignent l’univers sombre de la domesticité. Univers presque exclusivement féminin, si l’on excepte le passage de maris aux capacités étranges (L’ajusteur), quelque peu désespérés ou désespérants, tel le « Dr Boulette ».

Se posent bien sûr les questions liées à la féminité : la séduction ; la maternité, refusée ou au contraire malheureusement provoquée puis remplie d’enfants presque monstrueux ; les conventions familiales absurdes et exigées par une belle-mère toujours omnipotente ; des rapports entre femmes obsédées et agressives que l’on reçoit tout de même dans son « Club des Lectrices ».

La solitude du Quetzal Echappée au Guatemala, Jacky Essirard

Ecrit par Marc Ossorguine , le Samedi, 09 Juillet 2016. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Voyages

La solitude du Quetzal Echappée au Guatemala, éd. Yovana, juin 2016, 132 pages, 15 € . Ecrivain(s): Jacky Essirard

 

Fuir là-bas, fuir écrivait Mallarmé dans sa célèbre Brise marine. C’est en effet souvent le désir de fuir qui provoque nos départs pour d’autres coins du monde, d’autres cieux et d’autres odeurs. C’est cette fuite de soi et de son histoire qui poussa l’auteur à faire le voyage pour ce pays de volcans et de vestiges mayas qu’est le Guatemala. Même lorsque l’on peut prétendre ne pas aimer les voyages et les explorateurs (1), il y a souvent un espoir imaginaire, ou un espoir d’imaginaire qui nous pousse en avant, toujours plus loin, toujours ailleurs.

Ici c’est une rupture amoureuse qui sera le déclencheur du grand voyage, de l’espoir du grand voyage au-delà des mers. Il y aura aussi un guide, grand voyageur de mots et découvreur de mondes, intérieurs autant que réels, en la personne du poète Henri Michaux et de son Ecuador (1929). Nous voilà bien loin du « routard » qui, fort du guide du même nom (ou de son Lonely Planet s’il est anglophone), entreprend de « se faire le Guatemala », de dérober quelques images à épingler sur un quelconque mur, virtuel ou réel. Sans emballements ou enthousiasme convenus, voire avec une certaine désillusion, Jacky Essirard contemple ce monde d’ailleurs qui vit sa vie, ordinaire, sans mises-en-scènes photogéniques, sans faire le spectacle, sans misérabilisme déplacé. Plutôt indifférent à ce voyageur semblable à beaucoup d’autres.