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Essais

Rilke ou la reprise de l’enfance, Thierry Bénard

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Vendredi, 07 Avril 2017. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Hermann

Rilke ou la reprise de l’enfance, janvier 2017, 262 pages, 30 € . Ecrivain(s): Thierry Bénard Edition: Hermann

 

« Ils veulent atteindre le meilleur, et ils sont devenus des enfants », Rilke

 

Rilke est sans doute le chantre de l’ineffable et celui qui a le mieux rendu l’expérience poétique par l’émerveillement propre à l’enfance. Cet aspect de l’œuvre du poète a cependant peu retenu l’attention des commentateurs de son œuvre hors cadre biographique, et l’auteur ici suppose que c’est parce que cette question de l’enfance dans l’œuvre de Rilke est « fondatrice qu’elle reste voilée ».

Rilke fait partie de ces poètes pour qui le regard porté par l’enfant sur le monde fonde le travail poétique de l’artiste. Il rappelle les propos de Blanchot « tout questionnement de l’homme engageant son être ultime comme sa situation dans le monde s’enracine dans ses premières expériences » et les premières sensations de l’enfance.

Petite Philosophie de l’Amour, Alain de Botton

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 06 Avril 2017. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, J'ai lu (Flammarion)

Petite Philosophie de l’Amour, trad. anglais Raymond Las Vergnas, 318 pages, 7,10 € . Ecrivain(s): Alain de Botton Edition: J'ai lu (Flammarion)

A l’heure des réseaux sociaux, il est réjouissant de relire la Petite Philosophie de l’Amour (1993), premier roman de l’Anglais Alain de Botton (1969) : c’est comme s’offrir un bain de jouvence moderne dans une romance d’une époque qui semble à la fois tellement proche et tellement éloignée. Proche par certaines de ses préoccupations, par le mode de vie du narrateur et son aimée, Chloé ; éloignée par le temps et la façon dont il s’écoule, par la possibilité encore offerte de ne pas vivre dans l’instantanéité. Un roman serait à écrire sur l’amour au temps des communications fusant dans l’éther à toute vitesse ; ce n’est pas encore le cas pour cette histoire-ci.

Cette histoire-ci est donc narrée par un jeune homme moderne, qui prend l’avion pour se rendre de Paris à Londres et, contre toute probabilité (le calcul est effectué : une chance sur 5840,82), rencontre une jeune femme pour laquelle il a le coup de foudre. De cette rencontre inopinée naît une romance, racontée à la première personne en vingt-quatre chapitres aux titres programmatiques, puisque l’on va « Du Fatalisme Romantique » aux « Leçons de l’Amour » en passant par « De l’Authenticité », « Du Marxisme » (Groucho, pas Karl) ou encore « De la Peur du Bonheur ». Comme le montre l’intitulé de ces chapitres, cette romance est l’occasion pour Alain de Botton de poser quelques réflexions sur l’amour, sur le couple, sur l’attachement que l’on éprouve envers autrui.

A Rome avec Nanni Moretti, Paolo Di Paolo & Giorgio Biferali

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 05 Avril 2017. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Italie, Quai Voltaire (La Table Ronde)

A Rome avec Nanni Moretti, mars 2017, trad. italien Karine Degliame-O’Keeffe, 176 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): Paolo Di Paolo & Giorgio Biferali Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Deux jeunes essayistes romains (l’un né en 1983, l’autre en 1988) tentent, par cet essai à la fois intime et très documenté, de montrer la relation particulière qu’un cinéaste noue avec la Ville éternelle.

Onze films, de Je suis un autarcique (1976) à Mia madre (2015), se déroulent à Rome, prennent Rome, non seulement comme toile de fond à des intrigues, mais encore comme parties essentielles de la vie d’un cinéaste qui ne peut décemment se passer de sa ville comme on ne peut le faire de sa propre mère. Du Monte Mario à Ostiense, en passant par Nomentana, le quartier Prati, Monteverde (où vécurent Pasolini et le cinéaste lui-même), Garbatella, tout Rome défile, jusqu’à montrer des coins tout à fait périphériques, des vues des bourgs plus éloignés encore. En ce sens, Moretti ne fait là que poursuivre une longue tradition de cinéastes romains puisant à la capitale des pans entiers de leurs films (De Sica, Monicelli, Scola, Emmer, Di Gregorio, Pasolini, Fellini…).

Ainsi parlait Novalis, Dits et maximes de vie

Ecrit par Patryck Froissart , le Samedi, 25 Mars 2017. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Poésie, Anthologie, Arfuyen

Ainsi parlait Novalis (Also sprach Novalis), Dits et maximes de vie choisis et traduits de l’allemand par Jean et Marie Moncelon, Edition bilingue, novembre 2016, 150 pages, 13 € Edition: Arfuyen

 

Que voici une précieuse anthologie d’extraits choisis de l’œuvre de Novalis, dans cette belle collection qu’enrichissent régulièrement les Editions Arfuyen pour nous faire partager les dits de Sénèque, de Maître Eckhart, de Shakespeare, de Paracelse, de Lulle, d’Emily Dickinson !

Novalis fut poète et philosophe. L’un de ses leitmotiv fut de proclamer l’indissociabilité de la poésie et de la philosophie, toutes deux incarnées par son égérie, son icône au prénom signifiant, Sophie von Kühn, morte à l’âge de quinze ans.

La poésie, dans son rapport intrinsèque avec la philosophie, est donc naturellement l’un des sujets récurrents de ce recueil bilingue. La poésie pour Novalis est à la fois pour l’homme le principe littéraire, le principe vital, le principe moral, le principe existentiel, le principe religieux et l’expression mystique, le principe cosmique, le principe mathématique, le principe universel et le principe divin, le principe créateur, le principe thérapeutique… et, intégrant tout ce qui précède, le principe philosophique.

Réflexions buissonnières, Frédéric Dechaux

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 24 Mars 2017. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie

Réflexions buissonnières, éd. Unicité, 2017, 81 pages, 13 € . Ecrivain(s): Frédéric Dechaux

 

Un Diogène qui ose encore l’espoir. Ainsi parlerai-je de Frédéric. Il pourrait se laisser tenter par une autre option, désespoir, aigreur, colère, silence. Ce dernier, non, ne l’a pas rendu captif en ses murs de solitude, puisque Dechaux écrit. Mais avec l’humour désespéré d’un Cioran qui fracasserait d’un Rire l’absurdité de nos existences, nos fatuités, la Vacuité de nos vies. Frédéric Dechaux a dans ses aphorismes fort à-propos l’élégance d’un sage qui s’ignore ou du moins, qui ne s’en attribue pas le statut. Sagesse naturelle et discrète de ceux qui ne se prennent pas au sérieux. Des passages traduisent la finesse de ses représentations d’un monde dont, écrit-il, nous gardons « les schémas illusoires adoptés dès l’enfance ». La lucidité cependant ne prend pas le contrôle d’une existence qu’elle jetterait, avec les déchets de la pensée, dans une tour d’ivoire de l’aigreur autarcique et de critique négative, puisque le propos pertinent affleure ici la parole et accomplit le vol libre de l’existence, via l’écriture, via l’expression de ce qui ne se résigne pas à se taire mais, persiste, résiste, et signe. L’authenticité des propos de Dechaux a l’envergure sincère d’un vécu pris aux tripes de l’expérience accordée aux désirs, à une plénitude jaillissante du pessimisme même, où jouer (revêtir un personnage) et jouir exaltent un présent fait de chaque instant, éternel. Frédéric Dechaux se rit de nos destins, comme le Destin se rirait de lui-même.