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Critiques

Elephant Island, Luc Baba

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 10 Mars 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Belfond

Elephant Island, février 2016, 224 pages, 17 € . Ecrivain(s): Luc Baba Edition: Belfond

 

Comment écrire un roman sur l’endroit où l’on vit, ayant pour cadre l’endroit où l’on a grandi, sans tomber dans le régionalisme pur et dur, à destination d’une collection littéraire subsidiée par une région ayant besoin d’art pour se sentir exister ? Comment, en fait et de manière générale, dire le particulier sans tomber dans le piège du particularisme ? Comment, pour préciser vraiment notre propos, dire l’universel à partir du spécifique sans pour autant perdre de vue le spécifique en question ? C’est la question qu’a dû se poser le Belge Luc Baba (1970) au moment d’écrire son dernier roman en date, Elephant Island, dont l’action se situe pour l’essentiel à Liège, entre 1917 et 1977, mais qui parvient pourtant à toucher le lecteur qui n’aurait jamais mis les pieds du côté de la Batte (un grand marché dominical) ou du Vertbois (un bâtiment du XVIIIe siècle qui a connu de multiples fonctions), un lecteur qui se laisserait emporter par le souffle d’un style juste et d’une histoire universelle : celle des enfants qu’on soumet à et par la violence, et dont pourtant certains parviennent à s’en sortir, par le rêve peut-être, et à être des adultes capables d’écrire parce que la nostalgie a ses limites, écrire parce que l’esprit humain grandit, et qu’il est parfois l’heure de consigner ses actes.

PoéVie Blues, Richard Taillefer

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 10 Mars 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

PoéVie Blues, éd. PREM’édit, août 2015, 106 pages, 13 € . Ecrivain(s): Richard Taillefer

 

Dans les PoéVie Blues de Richard Taillefer, tombent des miettes de désillusion au Café de la mélancolie.

Sur le rebord de la fenêtre

Quelques piafs en repérage

De mes dernières miettes de désillusion

On va ici prendre un verre, comme un certain Richard, et l’on se dit qu’il se fait tard, et que les gens, il ne conviendrait de les connaître que disponibles, à certaines heures pâles de la nuit… (Richard, Léo Ferré). Pas de jugement, pas de nostalgie négative dans le blues de cette PoéVie prise sur le vif dans la trame  du quotidien, au pied levé de chaque aube qui se lève et qui éclaire le chemin d’une nouvelle route, dans Ce va et vient insoluble. Cette mâchoire qui claque, comme le jeu endiablé d’un mâle andalou, dans son tant tin tian de castagnettes.

Un autre que moi, Véronique Olmi

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 09 Mars 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Albin Michel, Théâtre

Un autre que moi, janvier 2016, 137 pages, 15 € . Ecrivain(s): Véronique Olmi Edition: Albin Michel

 

Un homme se réfugie dans une chambre d’hôtel, un hôtel plutôt minable, pour fuir l’anniversaire que lui a organisé son épouse pour ses quarante ans. Dans ce lieu fermé, ce véritable huis clos, nous découvrons Fred, quarante ans et une réussite sociale et professionnelle affirmée, manifeste et reconnue. Pas forcément une réussite humaine et sentimentale pour autant. Sans qu’il le voie et sans qu’il y croie, son double, Frédéric, sort de l’armoire, en traversant (bien entendu) le miroir. Un double qui accepte, lui, l’anniversaire de ses 80 ans. Double arithmétique donc d’une certaine façon, mais plutôt double alternatif du futur, incarnation des choix pas encore faits mais qui a déjà vécu les décennies à venir en transformant ce qu’il était aujourd’hui, et dans lequel son modèle ne se reconnaît d’abord pas. Qu’il prend pour un autre. Un autre, autre, et pas un autre lui-même. Puis, petit à petit Fred commence à comprendre qu’il n’est qu’un morceau, une ébauche de Frédéric. Qu’il n’est encore aujourd’hui pas tout à fait lui-même. Voilà la célèbre proposition de Rimbaud, le fameux Je est un autre mis en voix, en mots et en scène.

Né au bon moment, David Lodge

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 08 Mars 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Iles britanniques, Biographie, Rivages

Né au bon moment (Quite a Good Time to Be Born, A Memoir, 1935-1975) traduit de l’anglais par Maurice Couturier, février 2016. 561 p. 24 € . Ecrivain(s): David Lodge Edition: Rivages

 

Pour tous ceux qui connaissent essentiellement David Lodge à travers ses œuvres hilarantes (et elles sont nombreuses*1), il faut dire d’emblée que cette première partie de son autobiographie est largement dominée par un sentiment durable de mélancolie. Lodge raconte ici son enfance, ses parents, les années de guerre, sa jeunesse, ses débuts dans la carrière d’écrivain. Est-il besoin de dire qu’il s’agit là de l’essentiel, des mémoires de l’auteur (il annonce en préface un second volet à venir « si j’en ai le temps »), les fondements d’une vie et d’une œuvre.

Sans cesse, David Lodge établit le lien entre les deux. Il tisse les passerelles entre les émotions, les blessures, les peurs de l’enfance et les traces qu’elles laisseront en lui et dans l’écriture d’une œuvre désormais immense, romans (25 !), biographies, nouvelles, pièces de théâtre. Il écrit, à propos de ses souvenirs de « pension » (qui ne dura qu’une petite semaine !) :

« A présent, je n’arrive plus à distinguer de façon certaine les détails empruntés à ma propre vie, ceux dictés par d’autres œuvres qui ont traité du sujet, comme « Portrait de l’artiste en jeune homme » de Joyce et « Frost in May » d’Antonia White, et ceux de mon invention ».

Dévore l’attente, Laurent Bouisset

Ecrit par Cathy Garcia , le Mardi, 08 Mars 2016. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Dévore l’attente, Éd. Le Citron Gare, novembre 2015 (avec des images d’Anabel Serna Montoya), 85 pages, 10 € . Ecrivain(s): Laurent Bouisset

 

Avec Dévore l’attente, le ton est donné, l’auteur a les crocs, il a faim, il en veut. Il exulte, ressent et aspire le monde par tous les pores, autant qu’il en recrache venin et sueur. Il en veut le poète et il en veut aussi à ceux qui commettent l’indifférence.

 

Comment ils font pour faire ?

Comment ils actionnent, eux ?

Et ils actionnent quoi ? Du chiffre

Encore ? Et du numéralisable ?