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L’Année 2.0, Claude Minière (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 16 Janvier 2023. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Tinbad

L’Année 2.0, Claude Minière, éd. Tinbad, 2022, 15€ . Ecrivain(s): Claude Minière Edition: Tinbad

 

Étrangeté

J’ai aimé flotter dans ma lecture du dernier recueil de Claude Minière, car l’ambiguïté de mon sentiment m’a poussé à rédiger suffisamment de notes au portemine, prises de notes qui ont été la première étape vers ce livre étrange et original. De ce fait le sommaire indique lui-même le parcours engageant qu’il faut suivre pour aboutir à une idée maîtresse : de l’inconnu qui s’insinue dans de l’ordinaire.

Quatre chapitres du livre, donc : Mésopotamie, Calendrier, Torso, Penser à Orphée. Dès lors, l’on voit quelle route déroutante, si je puis dire, suit le lecteur au travers cette poésie pleine d’étonnement, voire d’ébahissement. Et si l’on côtoie de grands sujets (la mort présente parfois dans la partie calendrier, donc le temps, ou dans celle d’Orphée, voyage dans les enfers, donc la mythologie, par exemple) l’on reste dans les limites d’une langue complexe et fort intrigante.

Carpe diem de Robert Frost traduit par Didier Ayres

, le Lundi, 16 Janvier 2023. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

Carpe diem

La vieillesse vit deux enfants silencieux

passer, le cœur épris, au crépuscule.

Elle ignorait s’ils rentraient à la maison

ou sortaient du village

ou (comme les vêpres carillonnaient) s’ils se dirigeaient vers l’église.

Elle attendit (ils ne la connaissaient pas)

qu’ils fussent trop loin pour l’entendre

pour leur souhaiter, à tous deux, d’être heureux :

« Soyez heureux, heureux, heureux

et cueillez cet aujourd’hui avec plaisir ».

À travers tout, Mathias Richard (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 09 Janvier 2023. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie, Tinbad

À travers tout, Mathias Richard, éditions Tinbad, septembre 2022, 438 pages, 30 €

 

Perle irrégulière

Comment aborder le vaste ensemble de textes, recueil de Mathias Richard, que publient les éditions Tinbad, sans dire quelques mots sur la forme de l’ouvrage ? Il faut imaginer cet album comme un lieu où se construisent par fragments l’idée poétique, et peut-être aussi la narration de ce que l’on devine derrière les poèmes, c’est-à-dire, l’auteur lui-même.

Il faut savoir aussi que nombre de ces poèmes ont été performés, performances qui s’adaptent à la lecture à voix haute ou adaptent la matière écrite et libellée. Cela n’empêche nullement la rigueur de ce travail d’écriture. Au contraire cela corsète l’ensemble, lui faisant structure, structure de l’écrit qui a une relation plus ou moins autonome avec la parole, avec parfois des formes graphiques particulières ou des poèmes en anglais, ou encore de nettes parties nécessitant la parole à voix haute, la mise en espace en quelque sorte.

J’étais devenu la nuit même, je suis devenu la nuit même. Je me suis englouti, moi-même. Je me suis englouti moi-même. Aujourd’hui, ma peau, de nuit, est blanche, et je veux…

Les Œuvres éternelles, Thibault Biscarrat (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 03 Janvier 2023. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Les Œuvres éternelles, Thibault Biscarrat, préf. Jean-Marc Fournier, éd. Ars Poetica, 2022, 10€

 

Croire

Parcourir le dernier recueil de poèmes de Thibault Biscarrat, revient à se tenir au plus près de l’esprit tout autant que de la lettre. Je dis cela car la grande référence en sous-texte, se satellise sur les deux Testaments. Or cette allégeance au texte sacré correspond surtout à des moments de profondeur et de mysticité qui saisissent le poète et le lecteur, par voie de conséquence. Il y a évidemment la question du croire, mais aussi une attention donnée à écrire l’essentiel, à savoir un poème ou rien n’est gaspillé, le plus proche du Livre possible, sorte de lieu d’abondance où plonge la foi. Le poème rend ici possible la spiritualité, la seconde, la double, lui donne un contenu avoisinant l’esprit du texte biblique.

Je me souviens d’Abraham ; la colombe s’envole à l’horizon. Toutes choses surgissent dans la gloire du Seigneur. Voici l’or, la bénédiction des pétales. Des montagnes me viendra le chant ; des montagnes me viendra le secours.

La Valise vide, Kaveh Ayreek (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 12 Décembre 2022. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

La Valise vide, Kaveh Ayreek, éditions L’Espace D’un Instant, février 2022, trad. du dari (Afghanistan), Guilda Chahverdi, 54 pages, 11€

 

Topographie

Disons, tout d’abord, que cette pièce écrite en dari ne tombe pas dans les clichés. Elle se déroule dans des lieux, qui, pour un simple lecteur, s’agglomèrent, agissent par coalescence. Sommes-nous dans un espace rêvé depuis l’Afghanistan, ou depuis l’Iran, ou encore depuis l’Europe ? C’est là que réside l’intérêt pour l’existence de ces quelques personnes, de ces quelques exilés. Car, au-delà de l’exil se trouve la souffrance. Des êtres déracinés, déterritorialisés, transplantés involontairement. Est-ce la terre natale qui envahit par vagues le lieu d’accueil où se trouve l’auteur (et surtout avec lui le lecteur ou le spectateur) ? Est-ce le désir d’être accueilli ? Est-ce la condition primaire de toute émigration ? Qu’en est-il de cette expatriation ? N’est-elle pas essentiellement un rêve de la terre originelle ? Il faut signaler aussi que ce livre est renseigné par la traductrice et par l’éditeur, même si le texte vaut pour lui-même sans autre explication. On sait donc qu’il s’agit d’une séparation, d’une coupure avec l’ascendance, du tiraillement du sang natif dans les veines de ces êtres de papier.