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Russie

La Morale anarchiste, suivi de L’Esprit de révolte, Pierre Kropotkine (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 07 Novembre 2023. , dans Russie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Petite bibliothèque Payot

La Morale anarchiste, suivi de L’Esprit de révolte, Pierre Kropotkine, Payot & Rivages, octobre 2022, 112 pages, 5 € Edition: Petite bibliothèque Payot

 

L’origine de l’anarchie se perd dans la nuit des temps. Nul ne sait qui fut le premier anarchiste et nous pouvons supposer que les cyniques de l’ancienne Grèce ne furent pas les précurseurs du mouvement. Derrière Diogène, resté célèbre pour ses excentricités et ses provocations, se dissimule toute une école, dont l’existence se prolongea sur un millénaire. Mais l’anarchisme des cyniques grecs fut avant tout un individualisme, revendiqué par certains personnages hauts en couleurs, et non un mouvement visant à modifier en profondeur la société au sein de laquelle ils vivaient, à bouleverser les rapports sociaux. L’anarchisme moderne apparaît dans le sillage des idées neuves (ou donnant l’apparence de la nouveauté) énoncées à la Renaissance, puis reprises et développées par le Siècle des Lumières et la Révolution française. Aristocrate, géographe, explorateur, Pierre Kropotkine (1842-1921) en fut un des théoriciens. Il fit partie de ces Russes qui, rompant avec l’isolement séculaire de leur nation, multiplièrent les voyages et les contacts avec l’Europe de l’Ouest.

L’oiseau qui buvait du lait, Jaroslav Melnik (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mercredi, 18 Octobre 2023. , dans Russie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Actes Sud

L’oiseau qui buvait du lait, Jaroslav Melnik, Actes Sud, janvier 2023, trad. russe, Michèle Kahn, 492 pages, 24,50 € . Ecrivain(s): Jaroslav Melnik Edition: Actes Sud

 

Audra Rumšaite, photographe, a reçu une commande d’un magazine féminin, elle doit prendre des photos de la ville de Vilnius en Lituanie. Nous sommes au mois d’octobre, elle gravit le mont des Trois-Croix, le jour à peine levé pour avoir une vision panoramique de la ville. Arrivée au sommet alors que le soleil commence à percer, elle aperçoit décrivant des cercles au-dessus de Vilnius un grand aigle planant toutes ailes déployées. Son premier réflexe est de vouloir saisir l’oiseau en plein vol, mais en bonne professionnelle elle plante les pieds de son appareil dans la terre et elle prend des photos du paysage à peine éclairé d’un soleil rougeoyant. Son travail achevé, elle voit dans son objectif l’oiseau continuant à décrire ses courbes dans le ciel. Là, elle le saisit puis se prépare à reprendre sa route lorsqu’elle voit à travers les feuillages une masse gisant sur le sol.

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 08 Septembre 2023. , dans Russie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Gallimard

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak, Gallimard, mai 2023, trad. russe, Hélène Henry, 704 pages, 26 € Edition: Gallimard

 

Quelle belle et opportune incitation à relire (ou à lire) une œuvre figurant, à juste titre, au patrimoine universel de la littérature que cette réédition par Gallimard au prétexte justifié d’une nouvelle traduction ! Il serait sans doute fort intéressant, pour un universitaire, pour un fieffé lettré, pour un critique érudit, tous fins connaisseurs de l’œuvre et capables de lire le texte original, de comparer cette version française à celles qui l’ont précédée, en particulier et en priorité à la plus courante, celle parue, déjà, chez Gallimard en août 1958, non signée mais dont les quatre traducteurs qui en avaient assumé la charge sont identifiés.

L’objectif du présent article est infiniment plus modeste : il ne s’agit que de recenser dans notre magazine cette nouvelle édition, présentée dans son beau volume, afin de susciter ou de ressusciter chez tout lecteur de la rubrique l’envie de se laisser emmener, emporter, transporter :

- Dans un étonnant, étourdissant, passionnant voyage de sept cents pages au long, en large et au travers des immensités russes, dans la profonde intimité de leurs paysages changeant au fil des descriptions, savoureusement poétiques, de variations saisonnières continues ;

Le Corps de l’âme. Nouveaux récits, Ludmila Oulitskaïa (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 19 Janvier 2023. , dans Russie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Gallimard, En Vitrine

Ludmila Oulitskaïa, Le Corps de l’âme. Nouveaux récits, traduit du russe par Sophie Benech, Paris, Gallimard, 2022, 206 pages, 18, 50 €. . Ecrivain(s): Ludmila Oulitskaïa Edition: Gallimard

 

Le nom de Ludmila Oulitskaïa figurait sur la liste informelle établie par les parieurs anglais avant l’attribution du Prix Nobel de littérature 2022. Elle eût fait une lauréate très estimable, mais c’était oublier l’aversion séculaire des Suédois pour ce qui vient de Russie. On est désolé (pour l’Académie Nobel) de rappeler que les premiers lauréats de son Prix furent des auteurs aussi indispensables que Sully-Prudhomme, Theodor Mommsen, José de Echegaray, Bjørnstjerne Bjørnson, Rudolf Eucken et Paul Heyse, tout cela parce qu’il ne fallait surtout pas l’attribuer au plus grand écrivain alors vivant, Léon Tolstoï, qui présentait le tort irréparable d’être aussi russe qu’on peut l’être. Sa mort en 1910 ne changea rien. Bounine et Pasternak n’obtinrent la récompense suédoise en 1933 et 1958 que parce qu’ils furent, le premier apatride, le second en délicatesse avec les autorités soviétiques. Tout cela pour dire que Ludmila Oulitskaïa est, elle aussi, un grand écrivain et son recueil de nouvelles en apporte une preuve supplémentaire.

Les aventures d’un sous-locataire, Iouri Bouïda (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 13 Octobre 2021. , dans Russie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Les aventures d’un sous-locataire, octobre 2021, trad. russe, Véronique Patte, 456 pages, 24 € . Ecrivain(s): Iouri Bouïda Edition: Gallimard

 

On pourrait d’abord croire lire avec ces aventures de Stalen le récit des pérégrinations picaresques d’un personnage haut en couleurs, drôle, attachant, capable d’un humour féroce mais toujours sensible et généreux. La dimension comique de ce roman saute aux yeux – en particulier dans les 150 premières pages – et fait d’ailleurs de cette lecture un temps de sourire réjouissant. Les déambulations de Stalen, dans un Moscou fascinant, glacial dessus, bouillant dessous, ramènent à la grande littérature d’aventure que Bouïda salue d’ailleurs par les titres qu’il donne à chacun des chapitres de ce roman :

Chapitre 1, Où il est question du bouton supérieur d’une chemise, de métamizole sodique et de diminution de frais d’entretien / Chapitre 2, Où il est question de la promiscuité de l’existence, d’une femme à la petite vessie et de poésie picaresque.