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Articles taggés avec: Ayres Didier

Éperdument. Un enfant d’Alep au bord de la Seine, Abed Azrié (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 08 Septembre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Récits

Éperdument. Un enfant d’Alep au bord de la Seine, Abed Azrié, préf. Hubert Haddad, couv. Ziad Dalloul, éd. Al Manar, 2025, 170 p., 22 €

 

Tout d’abord je voudrais écrire quelques mots sur l’indication Récit inscrit sur la couverture du livre, car si l’on s’en tient au Larousse 2007, le roman a trois définitions qui pourraient donner sens à ce « récit » d’Abed Azrié. Je cite partiellement : « 1. Le roman est une œuvre littéraire, étude de mœurs, analyse de sentiments, observations réelles ou non de faits subjectifs ou objectifs ; 2. Histoire riche d’épisodes imprévus ; 3. Roman familial : fantasme dans lequel le sujet imagine ses parents et les siens ». Je trouve que le récit que fait Abed Azrié de sa propre vie correspond peu ou prou à ces définitions du dictionnaire.

Quoi qu’il en soit, nous sommes pris dans la grande et la petite histoire d’un chrétien d’Orient, vivant en lui-même une espèce de mélange de culture (peut-être difficile mélange). L’on pourrait intituler le livre : La prière et l’exil. Car en somme nous partageons la propre traversée de son histoire personnelle abouchée à un récit à la fois factuel et intellectuel.

Soudain nous ne sommes pas seuls, Paul de Brancion (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 01 Septembre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Soudain nous ne sommes pas seuls, Paul de Brancion, illustrations Liliane Klapisch, Florence Manlik, éd. de Corlevour, 80 p., 2025, 15 €

Face-à-face avec la mort

Quittons donc les œuvres de ténèbres, et revêtons-nous des armes de lumière.

Paul, Romains, XIII, 12

J’ai lu lentement ce recueil que publie Paul de Brancion, car le poème ici est une eau rare, et il faut savoir économiser sa peine, l’acte de lire, afin de ne pas gâcher la chance d’une prière bien faite prononcée dans le cœur sourd d’une voix intérieure. La lecture se développe dans une cambrure touchant à la fois au fond de l’être humain – sa mort et son existence devant cette mort – et ses espoirs. Oui, ce recueil organise un face-à-face avec la mort et, en définitive, le poète est plus fort qu’elle, il la transcende. Nous sommes tous, quoi que nous fassions, un être devant la mort, et cela pour comprendre la vie, et là, insistant sur un stoïcisme de la pensée. Être stoïque devant l’heure dernière : la plus grande mission de l’homme.

Ton corps est là, Répons de Ténèbres, François Rannou (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 25 Août 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Ton corps est là, Répons de Ténèbres, François Rannou, éd. Bruno Guattari, 2025, 97 p. 12€

 

Transparence et opacité

Pour donner à entendre mon sentiment à l’égard de ce recueil de François Rannou que publient les éditions Bruno Guattari, je dirais que ce voyage (petit en termes de volume) m’a conduit à la fois à travers transparence et opacité, un voyage au sein des ténèbres et de la lumière. Là où le corps est dans son éclipse. Selon moi, le travail qui inaugure le livre vient du chapitre I de l’Évangile de Matthieu, de la description des filiations - la partie très claire du livre. Donc, une sorte de quête dans le temps des créatures, chemin générique et génésique tout à la fois, un arrière-monde d’utopie, de mythe, le mythe d’une famille. Puis, l’on avance dans l’opacité, dans la profondeur d’une réponse énigmatique au monde, peut-être là aussi éclipse du corps : matérialité impénétrable, conscience en demi-teinte, à moitié sûre de la présence du corps à lui-même.

L’impartagée, Joël Mansa (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 18 Août 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

L’impartagée, Joël Mansa, préf. Thibault Biscarrat, éd. Le Nouvel Athanor, 2025, 102 p., 18€

 

Se recueillir, voilà à quoi confine le dernier recueil de poésie de Joël Mansa. Car le sentiment esthétique se lie ici au sentiment moral. J’y ai vu pour ma part une accointance avec l’univers de Charles Juliet, c’est-à-dire un style fluide, sans enflure, juste cependant, plein et dissert, une appréhension de la vie simple dans son âpreté, et le sentiment d’avoir échappé au pire. Donc, une voix claire qui sait dire ce qu’elle a à dire (aspect tautologique du Gardeur de Troupeau de Pessoa ?). Ce qui nous mène malgré tout vers une métaphysique.

L’impartagé reste ce qui se partage néanmoins dans le poème, en marge, comme l’on partage le silence dans l’amitié complice, comme est la part commune de la parole. Ce hors champs devient, selon son rythme poétique, un lien avec l’impartagé existentiel. Lien susceptible de partage - y compris pour celui qui cherche le silence -, vérité presque inaudible du poème refusant le tout venant du langage, préférant chercher, quitte à expliquer en quoi il est définitivement impartageable dans sa puissance radicale, dans sa puissance.

Soleil premier, Odysseas Elytis (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 08 Juillet 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Bassin méditerranéen, Poésie

Soleil premier, Odysseas Elytis, trad. Laetitia Reibaud, bilingue, éd. Unes, 2025, 94 p., 19 €

 

Mer

Les poèmes d’Odysseas Elytis que publient les éditions Unes sont tournés principalement autour d’une mer mythique pour l’Occident, la mer Méditerranée, autour du soleil et de ses ombres si fortes et si noires, de la Grèce en général, pays attitré d’Elytis. Donc une mer lumineuse et chaude. Aux ombres fortes. Aux bains étincelants de lumière. Le poème surgit de ce terreau. Il est porté par des paysages aux forts contrastes. Son rythme est celui d’images qui se renouvellent au gré d’une logique langagière proche des classiques, avec des accents homériques. Cette écriture se dépasse elle-même comme aspirée par un rêve méditerranéen. Elle a une foi dans la locution du silence et des paysages de silence.