Identification

Roman

Intérieur, Thomas Clerc

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mercredi, 16 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, Gallimard

Intérieur, Gallimard l’arbalète, Juin 2013, 386 pages, 22,90 € . Ecrivain(s): Thomas Clerc Edition: Gallimard

 

Conseil : ne pas laisser traîner ce livre, n’importe où, exposé à l’œil curieux de vos visiteurs… le risque serait trop grand de la salve des « quoi !!! c’est fou ce bouquin ? Tu appelles ça comment ? de la littérature !! »… et d’accompagner le commentaire de rires qui vous moqueront encore, la nuit tombée.

Cet Intérieur est effectivement fou, parfaitement inimaginable, et totalement littéraire. Une sorte d’épice nouvelle jamais goûtée et définitivement adoptée.

Explication qui vaut baptême : l’auteur « a passé ses premiers mois rue de Lille, et se souvient d’avoir entendu, bébé, les plaintes des analysants de Jacques Lacan, dont le cabinet était proche, puis d’avoir habité plus tard rue de Quatrefages, où il reçut les voix de Georges Perec, et de ses Choses, avant d’aménager le 11 Septembre 2001 dans son intérieur… ». 50 m2, rue du Faubourg Saint Martin, et presque 400 pages de… visite ? certainement pas, plutôt de parcours initiatique dans le chez lui de Thomas Clerc. « Autobiographie d’une maison », nous est-il dit.

Le tigre blanc, Aravind Adiga

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 16 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie, 10/18

Le tigre blanc (The White Tiger), traduit de l’anglais par Annick le Goyat, 318 pages, 8,40 € . Ecrivain(s): Aravind Adiga Edition: 10/18

 

Balram, comme des millions de ses congénères, est né dans les Ténèbres, où règne la loi de la jungle, celle du plus fort.

Le plus fort, dans ces mondes obscurs, est le fils du plus fort, et son fils sera un jour, à son tour, le plus fort.

Parce que dans les Ténèbres, on est seigneur ou esclave, de naissance, de père en fils, depuis toujours, et pour toujours.

Balram est condamné, car telle est sa destinée, à vivre en esclave, à laver les pieds de ses maîtres, à accourir, l’échine courbée, à chacun de leurs impérieux appels, à ramper devant eux, et à les remercier d’avoir la bonté de les maltraiter…

Il peut arriver, exception confirmant la règle, que dans cet appareil fatal, dans ce broyeur infernal, s’introduise un humble grain de sable qui en perturbe le cours.

Arizona Tom, Norman Ginzberg

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Lundi, 14 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La rentrée littéraire, Héloïse D'Ormesson

Arizona Tom, août 2013, 224 p. 17 € . Ecrivain(s): Norman Ginzberg Edition: Héloïse D'Ormesson

« À Brewsterville, les distractions sont rares. /…/ Ce n’est pas moi qui m’en plaindrais. Moins il s’en passe mieux je me porte. Je suis le shérif de ce bled. Un shérif placide et discret, ni bégueule ni fiérot. Pas un de ces paltoquets qui bombent le torse devant les voleurs de poules, une main sur l’étoile, l’autre sur la crosse de leur colt. Je suis shérif comme d’autres sont putains ou croquemorts, parce qu’il en faut ».


Ocean Miller, alias Ocean Meier, fils de juifs immigrés venus chercher fortune en Amérique après avoir fui Hambourg où ils ne vivaient que dans la malédiction, la misère et le mépris, se livre au soir de son existence au jeu des confidences. Une vie sans grande étoffe, souvent marquée par la poisse, jusqu’à ce poste de shérif dans ce trou perdu d’Arizona aux limites du désert de Mojave. Entre deux rasades de bourbon, il se remémore… les petit boulots d’avant, les succès faciles auprès des femmes, l’engagement dans l’Union pendant la guerre de Sécession aux côtés du général Chamberlain, le poste d’adjoint d’un marshal dans le Kansas, la traque aux voleurs de bétail, les amitiés trahies et au bout de la route, ni épouse, ni enfants, ni même un toit, dans ce bled où il ne se passe rien ou presque. Sauf le mercredi 8 juin 1883, où le chemin du shérif croise dans le désert celui d’un gamin sourd-muet, Tom, tirant au bout d’une corde un homme-tronc.

Belém, Edyr Augusto

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 09 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, La rentrée littéraire, Asphalte éditions

Belém, traduit du portugais par Diniz Galhos, 10 octobre 2013, 256 pages, 21 € . Ecrivain(s): Edyr Augusto Edition: Asphalte éditions

 

 

Belém ou la ville du crime


Le roman commence par une phrase minimaliste : « Johnny est mort ». Par cette simple constatation quasi journalistique, le lecteur prend connaissance du récit in media res. En effet, Johnny était un très grand coiffeur qui gravitait autour des célébrités de Belém, une ville qui se trouve au Nord du Brésil. S’agit-il d’un meurtre ou tout simplement d’une overdose d’héroïne ? C’est une question qui taraude l’inspecteur Gilberto Castro dit « Gil ». L’enquête progresse lentement et Gil va faire la connaissance de la bande d’amis du défunt. Sans le savoir il va tomber dans un piège dangereux dont l’issue pourrait lui être fatale.

Fragiles serments, Molly Keane

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 09 Octobre 2013. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, La Table Ronde

Fragiles serments (Full house), Juin 2013, traduit de l’irlandais par Cécile Arnaud (première édition : 1935), 375 pages, 8,70 € . Ecrivain(s): Molly Keane Edition: La Table Ronde

 

Le roman a pour décor la vaste maison campagnarde de Silverue où vit une famille de grands bourgeois ruraux anglo-irlandais, en vase quasiment clos hormis les rares journées où se reçoivent tour à tour, à l’occasion de sortes de kermesses bucoliques se déroulant dans les jardins qui font leur fierté jalouse, les propriétaires de la région.

La narration est un délice.

L’art de la délicatesse dont fait preuve Molly Keane dans la dénonciation, par petites touches, des tares, du snobisme, des hypocrisies de ce petit monde, place l’auteure un peu dans le même registre que son contemporain Proust. La narration, apparemment innocente, extrêmement pointilleuse des faits et gestes quotidiens de cette société conservatrice, bornée, figée dans le passé, est ponctuée d’épines, de fines flèches acérées, dont les pointes distillent un poison doucement mais efficacement destructeur.

La bâtisse est du style de celles qu’on retrouve chez Poe, chez les sœurs Bronté. Il en émane un relent de décadence, de folie, de décalage par rapport à la réalité.