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Les Chroniques

Poèmes de la mémoire et autres mouvements, Conceição Evaristo (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 06 Mai 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Poèmes de la mémoire et autres mouvements, Conceição Evaristo, éditions des femmes Antoinette Fouque, mars 2019, trad. portugais (Brésil) Rose Mary Osorio, Pierre Grouix, 208 pages, 16 €

 

Poème-sang

En dehors des considérations sociologiques et politiques, je voudrais ici consacrer quelques lignes à l’esthétique du recueil de Conceição Evaristo et de ses poèmes de la mémoire. Et en premier lieu souligner l’importance du sang, de la physiologie du sang et de sa métaphysique, voire de sa symbolique. C’est ce que j’ai le plus retenu. En effet, que cela soit le sang des menstrues, des blessures, ou la métaphore de la filiation féminine – mère/grand-mère/fille/petite-fille – le sang témoigne de la vie, de son expression à la fois douloureuse et cependant empreinte d’un mystère, ou bien d’une croyance religieuse.

Au reste, cette écriture relève en un sens de l’artisanat, d’un travail physique, qui permet à la figure de la forme en relation à la femme, de prendre corps et peut-être de revendiquer une essence. Et même si parfois on se situe politiquement au milieu de ce qui témoigne d’un Brésil marqué par les conquistadors de 1492, le poème touche notre monde d’aujourd’hui. Violence des favelas, violence faite aux métis et aux noirs, aux femmes pauvres.

Le Dernier cerisier, John Taylor (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 02 Mai 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Le Dernier cerisier, John Taylor, éditions Voix d’encre, mars 2019, ill. Caroline François-Rubino, trad. Françoise Daviet-Taylor, 88 pages, 19 €

 

L’arbre

Le Dernier cerisier de John Taylor présente divers intérêts. D’une part, parce que ces poèmes courts – et en un sens de nature orientale, dans la mesure où l’art japonais par exemple ne travaille pas sur le motif, mais le réinvente à partir d’une observation préalable – ont cette qualité de simplicité d’expression, celle d’une littérature dense et légère. Du reste, que ce livre s’accompagne d’aquarelles – qui m’ont laissé l’impression de fluidité, avec parfois la rudesse de traits charbonneux – n’est pas indifférent à la relation que j’ai eue au poème. Ce recueil est à la fois gazeux, éthéré et paradoxalement tendu par des images obsessionnelles : celles d’un arbre. Un cerisier qui se décrit et se déconstruit comme dans le très fameux travail autour de l’arbre de Piet Mondrian, lequel est passé d’un pommier, à des formes régulières de carrés de couleurs primaires.

L’Algérie rêvée ! (par Amin Zaoui)

Ecrit par Amin Zaoui , le Mardi, 30 Avril 2019. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Le sommeil n’est pas le lit des rêves. Creusez profondément dans la matrice de la société, vous découvrirez les racines du rêve collectif ! Je creuse ! Le réel mène au rêve ! Et le rêve est le capital énergétique du réel ! Ainsi, je rêve d’une Algérie pleine de vie ! Ce beau pays est congelé, vidé de vie ! Un pays congelé est un pays de pâture, de procréation et d’hypocrisie morale, politique et culturelle.

Et je rêve, et le rêve est une résistance ! Bien que le rêve soit un état personnel, selon Freud, il arrive que des personnes ou des groupes sociaux rêvent collectivement. Cela, la rue algérienne l’a bien vécu ces jours-ci. Nous ne sommes pas somnambules. On rêve en marchant avec le rêve qui marche en nous ! Sur la Place Maurice Audin se réveille le rêve commun ou presque ! Le rêve d’un changement radical, identique pour toutes les citoyennes et tous les citoyens qui marchent dans les rues, sur les trottoirs, qui labourent avec affection leur morceau de terre aride ou fertile, qui, ensemble, poussent un tracteur en panne, qui somnolent dans un transport en commun, qui posent leur tête pleine d’inquiétude, à la fin de la journée ardue, sur un oreiller froid.

L’anarchie ou le chaos, Philippe Godard (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 29 Avril 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

L’anarchie ou le chaos, Philippe Godard, éditions Le Calicot, décembre 2018, ill. Vincent Odin, 220 pages, 10 €

 

« L’édification d’une société d’êtres libres ne peut être que l’effet de leur libre évolution », Errico Malatesta (1853-1932)

 

Voici un ouvrage qui amène un peu d’air frais dans le grand marécage idéologique de ce début du XXIe siècle, un air qui souffle librement sur les grandes questions contemporaines. Sont-ce vraiment des questions ? Dans la mesure où toute réponse ne visant pas à perpétuer le système tel qu’il est a peu de chances de trouver un espace officiellement autorisé d’expression, on peut s’interroger, alors disons donc : les grands problèmes contemporains. Il n’en manque pas. Le titre peut sembler ironique, tellement dans l’esprit commun anarchie et chaos semblent synonymes, mais le chaos, le grand désordre, n’est-ce pas ce que l’on vit déjà ?

Mehdi Qotbi célèbre les cinquante ans de son activité artistique à Paris (par Mustapha Saha)

Ecrit par Mustapha Saha , le Lundi, 29 Avril 2019. , dans Les Chroniques, La Une CED, Arts

 

Paris. Avril 2019. Mehdi Qotbi célèbre les cinquante ans de son activité artistique sur les Champs Elysées, dans l’hôtel Marcel Dassault, siège d’Artcurial. L’artiste, redevenu lui-même, affiche, sans ambages, sa joie de revivre un vernissage après plusieurs années d’absence. Le président des musées marocains peut se prévaloir d’un bel activisme pour le rayonnement culturel du Maroc. Les expositions prestigieuses se succèdent. Les partenariats avec les institutions internationales se multiplient.

Je revois Mehdi Qotbi en tête à tête le lendemain matin. Il me confie son désir de se retirer le plus possible dans son atelier : « J’ai besoin de cette solitude de la création, de ce dialogue avec mes pinceaux et mes peaux de peinture, de ce corps à corps avec la toile, sans regard extérieur qui scrute et juge. Je n’oublie pas que je suis né artiste peintre, que je serai artiste peintre jusqu’à mon dernier souffle. La peinture est mon seul langage ».