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Les Chroniques

Lettre à Louis Calaferte, Valérie Rossignol (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 18 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Lettre à Louis Calaferte, Valérie Rossignol, éditions Tarabuste, janvier 2019, 84 pages, 11 €

 

Relation à l’inconnu

Ce joli livre de chez Tarabuste, de la collection Brèves Rencontres, m’a permis de suivre un exercice d’admiration très bien construit et m’a fait éprouver du plaisir. En effet, Valérie Rossignol se livre dans cet opuscule à une mise en relation/mise en scène de son rapport avec l’écrivain Louis Calaferte sous la forme de quatre lettres et de quelques citations des ouvrages de l’auteur – ce fils d’immigré italien, né à Turin. Il y a donc ici la rencontre d’une lectrice féministe et d’un auteur qui bat en brèche les doctrines de genre, et ainsi présente par un effet de miroir l’opinion de V. Rossignol qui, en tant que femme, verse dans une étude critique des lois machistes, et là-dedans de certaines pages rudes de Calaferte. J’ai dit exercice d’admiration, mais le vrai mot serait peut-être à trouver dans l’univers des thèses féministes qui viendrait chercher chez Calaferte les grands types de discours d’asservissement de la femme, et aussi et en même temps un parcours sensible d’une femme qui aime l’œuvre qu’elle lit.

Celui qui disait non, Adeline Baldacchino (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Vendredi, 15 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Celui qui disait non, Adeline Baldacchino, Fayard, janvier 2018, 264 pages, 18 €

 

 

C’est à coup sûr une photographie qui mérite de prendre place parmi les dix clichés les plus fameux du XXe siècle. Elle est pourtant méconnue, bien que facilement accessible sur le réseau Internet (tapez « August Landmesser » dans votre moteur de recherches favori, en mode « images »).

Un des charmes (ou des défauts) de la photographie argentique, par rapport à son équivalent numérique, est que le résultat ne se laisse pas voir tout de suite. Il faut passer par une série compliquée (et en général automatisée) de manipulations physico-chimiques qui prend quelques jours ou, au mieux, quelques heures. Il arrive cependant que la révélation de certaines photographies soit durablement ajournée, pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la chimie. Il en est allé ainsi du cliché qui a fourni au livre d’Adeline Baldacchino son point de départ.

Un peintre de notre temps, John Berger (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 13 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Un peintre de notre temps, John Berger, L’atelier contemporain, février 2019, trad. Fanchita Gonzalez Battle, 224 pages, 25 €

 

Peindre en exilé

Un peintre de notre temps, ayant fait l’objet d’une censure brutale, car il fut interdit de vente dès sa sortie en 1958, et de publication jusqu’en 1976, est le premier roman de John Berger (1926-2017). Le livre commence par la visite d’un atelier vide et la découverte du journal d’un ami peintre hongrois, Janos Lavin, dont la ville de refuge est Londres, « la capitale la plus conventionnelle et la plus fermée d’Europe ». Le journal forme un récit à deux voix, un chassé-croisé de deux points de vue, soit deux conversations juxtaposées, ce qui renforce la diégèse tels les sous-titres d’un film, sa traduction. Ainsi, et après-coup, John Berger décrypte les propos du peintre Janos Lavin (son double ?) à la manière d’un rébus. Or, le constat du peintre exilé est amer, affaibli par des projets qui ne marchent pas, réduit à la pauvreté, aux « humiliations de la dépendance ». Le métier d’écrire et le métier de peindre se répondent, et John Berger livre des pages fondamentales sur le dessin : « Dessiner, c’est savoir par la main – c’est avoir la preuve qu’exigeait Thomas. (…) Même devant un modèle, on dessine de mémoire. (…) Pas même de quoi que ce soit dont on puisse se souvenir consciemment. Le modèle est un rappel d’expériences qu’on ne peut formuler et donc se rappeler que par le dessin ».

«Woven» de Gavin Greenaway : une fantaisie inouïe (par Ana Isabel Ordoñez)

Ecrit par Ana Isabel Ordonez , le Mercredi, 13 Mars 2019. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Musicien : Gavin Greenway

Album: Woven

Titres:  «A Beginning», «The Sun Rose», «And Then I Saw You», «A Conversation», «We Danced For Seven», «Autumn Came So Soon», «The Fall», «Adrift», «The Melting», «Singing Old Songs», «We Travelled Far», «Goodnight My Love»

 

La formidable puissance musicale de Gavin Greenaway s’est très largement construite autour des notes de son piano. Titan des musiques de film, Gavin incarne le talent et le vertige du succès. Sa musique recèle une grande élégance. Les titres enregistrés dans son dernier album « Woven », sont parmi les plus touchants, créatifs et précis réalisés par le pianiste.

Poèmes, Jean-Pierre Faye (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 11 Mars 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Poèmes, Jean-Pierre Faye (éditions Polyglotte, 2013, 22 €)

 

Faisant face à une grande quantité de livres en attente dont je veux faire la chronique, cette anthologie de Jean-Pierre Faye et ses quatre cents pages m’ont imposé une lecture véloce. Cela ne m’a pas empêché de découvrir néanmoins le parcours d’une vraie route poétique, originale et intense. Le recueil m’est tout de suite apparu comme tourné vers le corps, les membres du corps ou encore, l’humidité de la chair, la fluidité du sang. Et cela parfois dans une langue hermétique. Donc, ici les éléments physiques fondamentaux, et une langue qui garde son mystère. Il faudrait peut-être relire encore cette anthologie de manière plus appliquée, sachant qu’une première lecture m’a fait aimer cette langue énigmatique. En tous cas, ce livre couvre les poèmes de Jean-Pierre Faye de 1939 à 2013, et s’oriente au fur et à mesure dans la recherche d’une poésie de l’incarnation. Nonobstant, je dirais mieux mon sentiment en rapprochant cette sorte de poésie orphique d’une poésie abstraite, capable de tenir le corps comme une composante géométrique, prosodique.