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Recensions

La Louve de Dêrsim, Yasmina Kramer (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 23 Juin 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Belfond, Histoire

La Louve de Dêrsim, Yasmina Kramer, Belfond, mai 2023, 178 pages, 20 € Edition: Belfond

 

En ce jour terrible du 13 novembre 2015, Paris ébauchait dans la soirée ce recensement macabre du nombre de morts et de blessés dans l’Est parisien, où avaient eu lieu les principales attaques terroristes. À quatre mille kilomètres de là, les forces kurdes procèdent à la libération de la ville de Şengal, dans le Kurdistan irakien. C’est cette guerre des femmes kurdes que décrit Yasmina Kramer dans un roman très inhabituel dans le ton général, mais bouleversant sur le fond. L’auteure du récit s’attache très sobrement à la description des combattantes, à leur origine, à leurs motivations : la narratrice, ainsi qu’Assîa, font partie des YPG, les unités de protection du peuple. Assîa dirige sous sa responsabilité quarante hommes et femmes. Les buts de la guerre sont simples, évidents aux yeux de ses troupes : lutter contre Daech, cette bande de barbares fanatiques, d’égorgeurs, de terroristes rétrogrades, qui pratiquent la terreur à grande échelle, les viols, la lapidation, pire châtiment pour les femmes qui subissent ces atrocités. Ces maquisardes excellent dans la formation au maniement des armes : charger une kalachnikov, s’entraîner au tir, ajuster rapidement son lance-roquettes…

Mes deux papas, Éric Mukendi (par Théo Ananissoh)

Ecrit par Theo Ananissoh , le Vendredi, 23 Juin 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Afrique, Roman, Gallimard

Mes deux papas, Éric Mukendi, Gallimard, Coll. Continents Noirs, mars 2023, 181 pages, 18,50 € Edition: Gallimard

 

Le regard de l’enfance sur la vie et sur les adultes aux prises avec les réalités de la vie. La Vie devant soi de Romain Gary s’est imposée comme le modèle d’un genre romanesque. Le premier roman d’Éric Mukendi fait penser à ce grand exemple sans manquer de qualités propres qui en font une œuvre réussie et agréable. Le jeune Boris qui raconte est aussi appelé par son entourage Bobo – un peu comme l’inoubliable Momo de Gary/Ajar. Mais les temps ont changé. Nous sommes à l’ère de l’Internet et des réseaux sociaux. Et le 9.3 où habite Boris est quasiment un ailleurs lointain et même étrange par rapport à Paris où chacune de ses excursions est une prise de risques. Aller de l’un à l’autre, c’est passer une frontière, en particulier linguistique. Boris est collégien ; une innocence finissante. Cela donne à ce qu’il raconte le cachet sociologique d’une phase charnière – entre l’enfance et la jeunesse adulte. Il a une première histoire d’amour, comprend vite et se défend bien contre un prédateur sexuel à l’aide d’un cran d’arrêt…

Coco et la petite souris, Romain Jallon / Chiens, Portraits brossés, Adeline Tillier, Prune Cirelli (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 23 Juin 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Jeunesse

 

Au pays minuscule

Coco et la petite souris, Romain Jallon, éditions L’Étagère du bas, mars 2023, Ill. Lucille Placin, 24 pages, 11,50 €

Ce joli livre pour enfants est très maniable grâce à son petit format carré de 19 cm, ce qui le rend d’autant plus précieux. Romain Jallon (né en 1982, ingénieur et docteur en mathématiques), pour son premier album pour enfants, prend le prétexte de la petite souris qui remplace la dent de lait sous l’oreiller par une pièce de 5 francs, pour inventer l’histoire de Coco, qui, elle aussi, « a une dent qui bouge beaucoup ».

L’auteur revisite Les Aventures d’Alice au pays des merveilles, se référant peut-être au moment où, dans le 2ème chapitre, Alice rencontre une souris française. Ici, dans un environnement plus actuel, grâce à un père bricoleur et inventeur, c’est Coco qui va être confrontée à une rencontre magique. Dans ce périple extraordinaire, Coco va déambuler au milieu d’un drôle de territoire, guidée par la petite souris.

L’affaire Cherkassky, Aurélie Ramadier (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 22 Juin 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

L’affaire Cherkassky, Aurélie Ramadier, Editions Balland, décembre 2022, 452 pages, 25 €

 

Roman policier, roman d’espionnage, roman initiatique, il y a de tout cela dans cet ouvrage volumineux.

La narratrice, Camille, jeune étudiante plus ou moins intermittente en lettres classiques, qui, détail essentiel pour l’intrigue, a passé une partie de son enfance à Moscou où résidaient ses parents pour des raisons professionnelles, a décidé, sans attendre la fin de son cursus universitaire, sans passer par une des écoles dédiées à cet effet, de devenir journaliste en brûlant toutes les étapes de la formation. Présentée, par l’entremise d’un ami de ses parents, au directeur d’un grand organe de presse préparant un numéro spécial sur la Russie, elle décide de consacrer un dossier rétrospectif à l’affaire Farewell (qui a défrayé la chronique dans les années 80) et à son protagoniste principal, Vladimir Vetrov.

Mais, très vite, ses recherches documentaires rencontrent le nom et croisent l’itinéraire d’un mystérieux Nicolas Cherkassky, dont elle apprend qu’il s’agit d’un Français de parents russes qui, communiste ayant rejoint l’URSS en 1945 y aurait été retenu de force, décrété apatride par le régime soviétique, avec quelques séjours dans les goulags les plus éprouvants, pendant 37 ans avant de réussir à s’évader vers l’occident natal.

Conversations avec les choses muettes, Jean Galard (par Ivanne Rialland)

Ecrit par Ivanne Rialland , le Jeudi, 22 Juin 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Arts, L'Atelier Contemporain

Conversations avec les choses muettes, Jean Galard, L’Atelier contemporain, Coll. Essais sur l’art, février 2023, 192 pages, 20 € Edition: L'Atelier Contemporain

 

Jean Galard, ancien directeur des services culturels du Musée du Louvre, met sa très grande érudition au service d’une question épineuse : dans quelle mesure le savoir sur l’art éclaire-t-il la contemplation des œuvres ? Et il s’agit bien de mesure, dans cet essai limpide. On y sent l’ironie de Jean Galard face aux contempteurs des cartels, de qui l’œil éduqué, affiné par la fréquentation des œuvres et des livres, n’a besoin en effet d’aucun accompagnement pour goûter le plaisir esthétique. Mais Jean Galard ne propose pas non plus un plaidoyer pour l’histoire de l’art. De court chapitre en court chapitre, à partir d’œuvres d’art variées dont on a en général la reproduction sous les yeux, il interroge la nécessité de connaître l’artiste, sa vie, le titre de l’œuvre, l’identité des personnages représentés, sans asséner de vérités générales qui vaudraient pour n’importe quelle œuvre, n’importe quelle information, exprimée de n’importe quelle manière.