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Recensions

Soutine et son temps, Emil Szittya (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 21 Avril 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Arts

Soutine et son temps, Emil Szittya, Éditions du Canoë, mars 2023, 112 pages, 15 €

 

Voici la réédition d’un ouvrage publié en 1955 par l’essayiste hongrois Emil Szittya (1886-1964). Le titre résume bien l’entreprise : cerner Soutine, son environnement artistique, son époque, celle de l’école de Paris, regroupant nombre d’étrangers notoires.

De la formation de Soutine aux années de guerre, l’essayiste suit les longs développements artistiques et créatifs d’une personnalité, rebelle, difficile à saisir, assez misanthrope, née juif en Lituanie, à la fin du XIXe siècle.

Haineux, ne croyant guère à l’amitié, farouchement indépendant, d’une hygiène toujours douteuse, Soutine fut un solitaire frustré, fréquentant les bordels, s’adonnant à la boisson, n’ayant connu pour ainsi dire aucune relation amoureuse durable. D’une jalousie féroce à l’égard des autres artistes (Krémègne, Modigliani, Picasso…), il connut à Paris (Montparnasse) une vie misérable durant de nombreuses années.

Le Glorieux et le Maudit, Olivier Charneux (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Jeudi, 20 Avril 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Seuil

Le Glorieux et le Maudit, Olivier Charneux, Le Seuil, mars 2023, 268 pages, 19,50 € Edition: Seuil

 

Quand l’imagination s’ankylose ou devient suspecte, l’autofiction est un recours facile. Autre commodité : écrire la biographie arrangée d’un auteur à demi obscur ; faire ajouter « roman » sur la couverture pour appâter le chaland ; se présenter comme un redresseur de torts, un réparateur d’injustices ; viser un public moyen – moyennement cultivé, moyennement intéressé, moyennement paresseux. Avec un peu de chance et une solide campagne de promotion, le succès sera au rendez-vous. On peut rêver, avec plus de chance encore, à une adaptation cinématographique ou, de façon plus modeste, à un téléfilm diffusé en prime time.

Après le médiocre Mourir avant que d’apparaître, de Rémi David (1), chroniqué ici-même, consacré à la relation passionnée entre Genet et Abdallah Bentaga, voici Le Glorieux et le Maudit d’Olivier Charneux qui retrace l’histoire d’amour (tumultueuse) entre Jean Cocteau et Jean Desbordes, né en 1906 à Rupt-sur-Moselle et qui succéda auprès de l’Oiseleur à Raymond Radiguet.

Fanny Ardant, une femme amoureuse, Pascal Louvrier (par Marjorie Rafécas Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Mercredi, 19 Avril 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Biographie

Fanny Ardant, une femme amoureuse, Pascal Louvrier, Tohubohu Editions, septembre 2022, 258 pages, 19 € . Ecrivain(s): Pascal Louvrier

 

Les actrices françaises sont souvent des personnages de littérature. Fanny Ardant aurait pu être Carmen ou encore Mathilde de Stendhal. Sa « voix espiègle », sa désobéissance incarnée, la rendent attachante. Fanny règne par « l’épiphanie de sa voix ». On sent que l’auteur est amoureux de l’image sauvage que dégage Fanny Ardant, de son audace et de l’élégance de ses contradictions. Mais « la société n’aime pas les femmes qui aiment les Gatsby ».

Sagan disait que le rosé était fait pour l’été et électriser les corps, alors que le rouge pour réchauffer l’hiver. Fanny Ardant est comme un verre de vin rouge, de ce verre de côtes du Rhône, celui de Marguerite Duras. D’ailleurs, c’est un livre de Duras qui l’a sauvée : Détruire dit-elle. « Ce texte, je ne le comprenais pas entièrement, mais je sentais les choses. L’incohérence érigée en style de vie. (…) Dans ses personnages, il y a une hémorragie, un non rationnel, qui dit la vérité sur la relation amoureuse, sur la fin d’une liaison ». Fanny Ardant a d’ailleurs eu une correspondance régulière avec Marguerite Duras, car elle estime que l’on ne peut connaître un écrivain que grâce à ses lettres et ses livres.

L’Agent Seventeen, John Brownlow (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 18 Avril 2023. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Iles britanniques, Série Noire (Gallimard)

L’Agent Seventeen, John Brownlow, Gallimard, Coll. Série Noire, mars 2023, trad. anglais, Laurent Boscq, 504 pages, 23 € Edition: Série Noire (Gallimard)

 

Nom : inconnu ; pseudonyme : Seventeen ; profession : tueur à gages ; employeur : Handler. C’est à peu près tout ce que nous saurons du héros de ce gros volume d’environ 500 pages. On peut ajouter qu’il rentre d’une mission à Berlin et que son prochain contrat est de tuer l’agent Sixteen, son prédécesseur. Il sera sans doute ensuite la cible de Eighteen, mais pour le moment, c’est le meilleur. Il sait peu de choses sur les personnes qu’il doit éliminer, juste ce qu’il a pu obtenir en tirant « délicatement » les vers du nez de Handler et surtout il ne sait pas pourquoi il doit le faire. « Efficacité et silence » pourraient être sa devise. Il connaît, bien sûr, tout des armes, pilote des bolides aux vitesses effarantes ou des machines abandonnées depuis des années dont les batteries continuent à alimenter un moulin à peine rouillé. Malgré une hygiène de vie affolante, peu de sommeil, pas de repos, une alimentation déplorable, il sait tirer de son corps le maximum. Il prend des positions qu’un maître yogi ne chercherait même pas à imiter, saute de hauteurs vertigineuses sans bobo, court tout habillé plus vite que Usain Bolt.

Bestiaire, Alexandre Vialatte (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 17 Avril 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Arts, Anthologie, Arléa

Bestiaire, Alexandre Vialatte, Editions Arléa, février 2023, Illust. Philippe Honoré, 168 pages, 11 € Edition: Arléa

 

De la fantaisie érigée en art.

Le genre du Bestiaire s’enracine au plus profond de l’histoire de la littérature. Au Moyen-Age, il connaît ses grandes et riches heures avec des publications fabuleuses comme le « Physiologos » ou encore le « Bestiaire d’Aberdeen ». Dans ces ouvrages, on voit que la relation aux animaux provoque quelque chose de profond qui va de l’admiration à l’interrogation en passant par l’étonnement. Les descriptions des bêtes sont accompagnées de miniatures souvent somptueuses. Que l’on puisse publier un « Bestiaire » signé Alexandre Vialatte, comme le font aujourd’hui les éditions Arléa, ne peut que stimuler notre curiosité. Et l’on n’est pas déçu. On découvrira un Bestiaire non conventionnel, où le loufoque côtoie l’acerbe et où l’absurde rejoint la facétie. Des illustrations-miniatures sont également présentes sous la forme de dessins du regretté Honoré, dessinateur de Charlie-Hebdo, lâchement assassiné un funeste mois de janvier 2015.