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Articles taggés avec: Wetzel Marc

Ainsi parlait Maître Eckhart (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 02 Octobre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Ainsi parlait Maître Eckhart - dits et maximes de vie choisis et traduits du moyen haut-allemand par Gérard Pfister, éditions bilingue, Arfuyen, 144 pages, décembre 2014, 13 €

 

Gérard Pfister, l'éditeur de cette collection, qui ici traduit et choisit les textes, l'écrit dans sa brève préface : Eckhart (1260-1328) n'a voulu toute sa vie (et son oeuvre) dire qu'une seule chose, simple et lancinante en nous tous - comme une unique phrase qui ne demande qu'à naître - d'autant qu'elle concerne exclusivement la naissance du coeur humain à lui-même (naissance mystérieuse bien qu'indéfiniment renouvelable) - mais qu'il y a normalement échoué : comme l'enfant qui nait échouerait à commenter ce qui lui arrive, comme la nudité échouerait tout autant à formuler le vêtement qu'elle est, ou comme, enfin et surtout, on échouerait à comprendre (à saisir même que quoi que ce soit y soit à comprendre) une phrase comme : l'homme est l'animal divin (et le Tout de la Présence est son maître). Car c'est bien ce que semble vouloir dire partout maître Eckhart : l'homme est l'être vivant dont l'ultime pointe de l'âme est divine, est Dieu lui-même (même si par ailleurs Dieu est par lui-même, alors que l'âme - hors de cet infinitésimal fond "incréé et incréable" d'elle-même - n'est que par Dieu). Mais justement : si le propre de Dieu est d'être par lui-même, et s'il y a une ultime région de l'âme humaine qui est Dieu, alors quelque chose de l'homme est par soi, et l'homme est bien, en cela, l'animal divin.

On en parle peu, Sanja Baković (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 26 Septembre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

On en parle peu, Sanja Baković - traduit du croate par Brankica Radić - Domaine croate/ Poésie, L'Ollave, 72 pages, juin 2025, 15€

 

Cette poète croate (encore) peu connue, née à Split en 1976, journaliste et universitaire - dont voici le première traduction française (aux éditions de l'Ollave, fondées par notre regretté Jean de Breyne, célèbres pour leur important "Domaine croate") est un esprit rude, formidablement drôle et généreux, qu'on a intérêt (et plaisir) à découvrir.

Cette poète est certes sans illusions sur ce qui contrôle et anime vraiment la vie de chacun d'entre nous : l'épicentre de tout destin est toujours d'abord, suggère-t-elle, un ... nombril !

" un employé du service des eaux communales gratouille son nombril,

le point d'où se déploie le monde de chacun

entre les cordes du rire et le malaise de la nuit" (p.54)

S'effacent et demeurent, Jean-Pierre Vidal (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 19 Septembre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Jean-Pierre VIDAL - S'effacent et demeurent - Le silence qui roule, 180 pages, septembre 2025, 17€

 

"Un soir d'octobre un jeune homme de plus de 90 ans, rentrant seul comme chaque soir de l'hôpital où sa bien-aimée entrait dans un long martyre, vit la voiture qu'il conduisait emportée par un de ces violents orages cévenols qui, en cette saison, transforment rapidement en torrents meurtriers de paisibles ruisseaux. Ce soir-là, c'en fut trop pour son esprit qui avait connu deux guerres, plusieurs exils, et un immense amour. Il perdit d'un coup cet équilibre que rien, ni la guerre, ni l'exil, ni l'amour ne lui avait jamais ôté. C'en était trop. Il entra ce soir-là, solitaire, coupé de tous, dans la vieillesse obscure. Il retrouva plus tard, entouré d'affection, le calme, la possibilité d'être ému par le sourire d'un enfant ou l'envol d'un oiseau. Mais ce soir-là, il était entré dans un espace où nous ne pourrions plus jamais l'atteindre" (p.61)

Quel monde à venir ? Anne Rothschild - Poème (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mardi, 09 Septembre 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres, Poésie

Quel monde à venir ? Anne Rothschild - Poème - éditions du Levant, septembre 2024, 15 €

 

"Que vienne encore

la lumière éphémère des mimosas

leur poudre parfumera de jaune nos doigts

les sabots très sûrs de l'âne gris

un sentier au flanc des monts saccagés

je me sens lourde des générations passées

et de celles à venir" (p.73),

 

écrivait, significativement, l'auteure dans "Nous avons tant voyagé", un livre précédent (Le Taillis Pré, 2018) - dans lequel l'étrange solidarité des hommes dans l'injustice et le mal cherchait déjà sa difficile justification :

Un sol trop fertile, Cédric Le Penven (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 28 Août 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Un sol trop fertile, Cédric Le Penven, Editions Unes, 2021, 80 pages, 17 €

"j'ai acheté des outils pour sculpter du bois flotté

mon fils à l'école, ma femme au travail

je passe de pièce en pièce, dans le jardin, dans le bureau

je touche les gouges du bout des doigts

ça lancine et ça brûle

tant de colère contre la tristesse

ce paquet de linge gorgé d'eau qui colle et pèse à l'arrière de la nuque"(p.41)

 

La "résilience" s'entend au sens faible (malgré les coups reçus, le goût - et même la capacité - de santé demeure), ou au sens fort (plus un sort fait tomber notre vie, mieux on le surmonte). C'est comme vouloir faire rire le malheur, en bichonnant en retour quelques pieds-de-nez vers lui.