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Les Fantômes de Belfast (The Ghosts of Belfast), Stuart Neville (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 02 Octobre 2011. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Rivages/Thriller, Recensions, Iles britanniques, Polars

Les fantômes de Belfast, (The ghosts of Belfast). Trad. De l’anglais (Irlande) par Fabienne Duvigneau. 410 p. 22€. Août 2011 . Ecrivain(s): Stuart Neville Edition: Rivages/Thriller

 

Il est difficile de composer univers et roman plus noirs que ce livre. La mort, les morts en sont les figures dominantes et ordonnent (au sens littéral du terme, donnent ordre) l’existence et l’action du héros, dans un Belfast « en paix », sauf dans la tête dévastée de l’un de ses tristes anciens héros.

Gerry Fegan fut un tueur de l’IRA dans les années terribles qui ensanglantèrent l’Irlande du Nord et y installèrent une terreur meurtrière pendant des décennies. Pas n’importe quel tueur : une des plus efficaces machines à exécuter les « contrats » de l’organisation. Sang-froid, précision, absence absolue d’états d’âme, une pépite létale pour les chefs de l’IRA.

Aujourd’hui, après les années de prison qui ont suivi la paix de 1998, Gerry est dépressif, ivrogne et surtout hanté par le passé. Ici encore hanté doit être pris au sens le plus fort : il vit entouré, suivi, en permanence par les fantômes de ses victimes de naguère. Policiers, membres de l’UFF (unionistes anti-catholiques), mais aussi victimes par hasard, fauchées par des bombes aveugles ou des contrats bidons. Hanté par cette mère et son bébé déchiquetés par la bombe posée dans une boucherie (effroyable ironie).

Tom Waits, une biographie, Barney Hoskyns (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 25 Septembre 2011. , dans La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Recensions, Biographie, USA, Payot Rivages

Tom Waits, une biographie. Traduit de l'anglais (USA) par Corinne Julve.Septembre 2011. 450p. 23€ . Ecrivain(s): Barney Hoskyns Edition: Payot Rivages


Small Change got rained on with his own thirty-eight,

And nobody flinched down by the arcade

And the marquees weren't weeping, they went stark-raving mad,

And the cabbies were the only ones that really had it made

And his cold trousers were twisted,

And the sirens high and shrill,

And crumpled in his fist was a five-dollar bill


(…)


Au commencement la nuit était musique, Alissa Walser (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 11 Septembre 2011. , dans La Une Livres, Actes Sud, La rentrée littéraire, Les Livres, Recensions, Langue allemande, Roman

Au commencement la nuit était musique. Trad de l’allemand par Juliette Aubert. 252p. 21€ . Ecrivain(s): Alissa Walser Edition: Actes Sud

Vienne au temps de Mozart est déjà la brillante capitale des arts, des sciences et de la littérature qu’elle sera jusqu’à la catastrophe de la première guerre mondiale. La silhouette et les airs du divin Wolfgang (et du grand Haydn) y flottent partout dans la ville et dans les têtes.

1777. Les figures étonnantes sont déjà nombreuses dans la capitale de l’empire et parmi elles, celles des deux héros de ce livre : le Dr Mesmer, médecin atypique et controversé qui croit aux vertus essentielles des ondes magnétiques sur le corps humain. Et notre héroïne, qui n’est rien moins que la célèbre pianiste et compositrice Maria Theresia Von Paradis.

Elle est aveugle. Plus exactement devenue curieusement aveugle. Les parents, grands bourgeois viennois proches de la cour, ont tout essayé. Ils appellent alors à l’aide le sulfureux Mesmer et ses aimants. Et dans une relation fébrile, haletante, ambiguë, les deux personnages vont se nouer, se dénouer, s’aimer (platoniquement ; Mesmer est marié et irréprochable !), se haïr. On ne peut s’empêcher de se projeter plus d’un siècle plus tard avec un certain Freud et une certaine Anna O. (et quelques autres) !

Mystères sur Vienne (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Samedi, 30 Juillet 2011. , dans Chroniques régulières, La Une CED, Les Chroniques, Chroniques Ecritures Dossiers

Frank Tallis : mystères sur Vienne

Cinq livres et déjà un statut, une aura, une place incontestable pour Max Liebermann dans la lignée des grands détectives de fiction. L'écrivain anglais Frank Tallis, lui-même psychologue clinicien très renommé à Londres, a façonné un atypique et séduisant enquêteur en la personne d'un jeune psychanalyste juif, élève de Freud, dans la Vienne du début du XXème siècle. Sollicité par son ami, Oskar Rheinhardt, inspecteur de police, Max se plonge avec passion dans les noires affaires qui assombrissent encore les sombres rues de la Vienne impériale. A l'occasion, il n'hésite pas, il va prendre conseil auprès d'un « auxiliaire » de grand luxe : son professeur, le docteur Sigmund Freud ! Déviances sexuelles, drames familiaux, serial killers, notre psychanalyste apporte un regard perspicace et novateur sur la criminologie.

L'écrin de ces noires aventures, nous l'avons vu, c'est Vienne. Une cité mythique en ces temps : la patrie des poètes (Rilke), des musiciens (c'est la période glorieuse de Gustav Mahler, directeur artistique de l'Opéra de Vienne) , des grands écrivains (Stefan Zweig, Arthur Schnitzler), des peintres célèbres (Gustav Klimt). C'est aussi un « bouillon de culture » dont l'Unbewusste (l'inconscient) sera le joyau. C'est enfin la Vienne de la montée du pire : une agitation antisémite permanente, portée par une haine incoercible et dont on sait l'avenir effroyable.

Une enquête philosophique, Philip Kerr (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Dimanche, 10 Juillet 2011. , dans La Une Livres, Le Masque (Lattès), Les Livres, Recensions, Iles britanniques, Polars

Une enquête philosophique. Trad. De l’anglais par Claude Demanuelli. 390 p. 22 € . Ecrivain(s): Philip Kerr Edition: Le Masque (Lattès)

Toute traque policière d’un serial killer a forcément quelque chose d’un dédale pour l’esprit : indices volontaires ou accidentels au long de la piste, déductions psychologiques, profilage, anticipation… Il faut avouer néanmoins que la traque de « Ludwig Wittgenstein », assassin de « Descartes », « Hegel » et quelques autres dans le cadre d’un programme d’ « encadrement » de tueurs en série dénommé « Cesare Lombroso », ça n’arrive pas tous les jours dans la carrière d’un flic. Même si ce flic est une grande flic, « Jake » Jacowicz, séduisante quadra et limier hors pair.

Philip Kerr, l’auteur de « La Trilogie Berlinoise », lue par des millions de lecteurs dans le monde entier, nous emmène cette fois sur un surprenant toboggan logique ou les énoncés du « tractatus logico-philosophicus » du vrai Wittgenstein orchestrent en permanence le rythme du roman. Jeu d’échanges et de défis entre un tueur particulièrement érudit et malin et une enquêtrice tenace, audacieuse et intelligente. Le duel est fascinant, de bout en bout, établissant, comme c’est souvent le cas dans ces chasses au serial, une relation étrange de haine/fascination entre le « gibier » (qui est-ce ?) et le « chasseur » (même question). Une sorte de respect mutuel qui s’instaure dans la violence des échanges, l’obstination à vaincre, comme dans une sorte de partie d’échecs entre deux grands maîtres.