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Articles taggés avec: Banderier Gilles

Spinoza Code, Mériam Korichi (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 08 Octobre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Grasset

Spinoza Code, Mériam Korichi, Grasset, mars 2024, 240 pages, 19,50 € Edition: Grasset

 

À l’article « Code », le dictionnaire de Littré renvoie à l’ensemble des recueils de lois portant les noms d’empereurs romains (Théodose, Justinien) et, pour l’étymologie, au latin codex, « proprement tablette à écrire ». C’est plus ou moins ce dont il s’agit et, consciemment ou non, Mériam Korichi prend le contre-pied de toutes les histoires de manuscrits retrouvés dans les endroits les plus improbables, qui peuplent le genre romanesque (on pense ainsi au Nom de la Rose). Commençons par dire ce que ce livre n’est pas : le Spinoza Code n’a rien à voir avec le Da Vinci Code et les élucubrations afférentes, parce que le codex, le volume manuscrit en question existe bel et bien à la bibliothèque du Vatican (dont le catalogue, subdivisé en une multitude de fondi, est notoirement d’une complexité inégalée) : il s’agit du manuscrit Vat. Lat. 12838 (désormais numérisé et consultable en ligne), un manuscrit assez modeste et oublié pendant des siècles, qui présente la particularité d’avoir été copié, non sur les Opera posthuma de Spinoza parues en 1677, mais sur le manuscrit original (qui fut probablement détruit par l’imprimeur une fois son travail achevé, suivant la pratique courante de l’époque, aussi choquante nous paraisse-t-elle).

Varlam, Michaël Prazan (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 30 Septembre 2024. , dans La Une Livres, Rivages, Les Livres, Critiques, Roman

Varlam, Michaël Prazan, Payot & Rivages, mai 2024, 270 pages, 9 € Edition: Rivages

 

Michaël Prazan est un écrivain et un cinéaste d’un type particulier, puisque la matière de son travail n’est pas la fiction, mais la réalité, en particulier historique. Il est un documentariste de premier plan, ayant à son actif des films impressionnants de qualité, d’information et de maîtrise sur, par exemple, le procès Eichmann ou les Einsatzgruppen, les unités mobiles d’extermination qui accompagnaient l’armée allemande. Il suffit de considérer sa bibliographie et sa filmographie pour constater que Michaël Prazan est hanté par ce phénomène caractéristique du XXe siècle que sont les totalitarismes de droite, de gauche et d’en haut (l’islamisme).

Un ouvrage intitulé Varlam évoque immédiatement au lecteur le seul personnage fameux à avoir porté ce prénom, l’écrivain Varlam Chalamov, dont Prazan a suivi les traces dans l’Extrême-Orient de l’immense Russie.

Jephtias Tragœdia, La Fille de Jephté, tragédie, Jacob Balde (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 23 Septembre 2024. , dans La Une CED, Les Chroniques, Langue allemande, Théâtre, Classiques Garnier

Jephtias Tragœdia, La Fille de Jephté, tragédie, Jacob Balde, Classiques Garnier, 2020, trad. Dominique Millet-Gérard, 668 pages, 58 €

 

En matière littéraire comme en la plupart des domaines artistiques, la postérité ne se trompe pas aussi souvent qu’on le prétend, et ses jugements sont en général fondés, même s’ils peuvent être parfois sujets à révision ou à appel, dans un sens comme dans l’autre, au fil du temps (l’exemple-type étant celui de Thomas Corneille, jadis plus lu que son frère). La probabilité de découvrir sous la poussière des bibliothèques et des librairies d’anciens un écrivain de premier ordre qui aurait échappé à toutes les investigations des historiens de la littérature n’est pas aussi élevée que le croient en général les étudiants en doctorat.

Cela étant, il arrive que de grands auteurs soient injustement négligés, pour des raisons externes à leur œuvre proprement dite et à sa qualité, ainsi la langue dans laquelle ils l’ont composée. Durant une très longue période, pratiquement jusqu’au XIXe siècle, tous les écrivains européens furent bilingues, capables d’employer une langue vernaculaire (celle de leur pays) et une langue véhiculaire (le latin).

La Vie simple, Pour soi et pour les autres, Carlo Ossola (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 04 Septembre 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Italie, Les Belles Lettres

La Vie simple, Pour soi et pour les autres, Carlo Ossola, Les Belles-Lettres, 2023, trad. italien, Lucien d’Azay, Olivier Chiquet, 140 pages, 11,50 € Edition: Les Belles Lettres

 

Qu’est-ce qu’une vie simple ? Sitôt la question formulée, on devine que la réponse sera complexe ou, en tous cas, pas aussi succincte et directe qu’on pourrait s’y attendre. Mais cette question s’est toujours posée, de savoir comment user au mieux de ce bref intervalle de vie (« Nous ne disposons que d’un instant de soleil, un instant précieux et béni », écrivait Irwin D. Yalom) qui nous est accordé entre un néant et – et quoi ? Seules les religions ont prétendu répondre à cette dernière interrogation.

Depuis que la mode est apparue aux États-Unis, les ouvrages de développement personnel abondent et qui voudrait en constituer une collection exhaustive remplirait vite une maison de bonne taille. Il est à peine besoin de souligner leur caractère répétitif, leur désespérante horizontalité et le fait que leur succès accompagne fort bien des sociétés où la consommation d’antidépresseurs et de psychotropes divers atteint des records, et ce, dès le plus jeune âge.

Le XIXe siècle à travers les âges, Philippe Muray (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 26 Août 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Les Belles Lettres

Le XIXe siècle à travers les âges, Philippe Muray, Les Belles-Lettres, février 2024, 652 pages, 29 € Edition: Les Belles Lettres

 

Qu’est-ce que Le XIXe siècle à travers les âges ? L’ouvrage a le volume et l’érudition des anciennes thèses de doctorat d’État et Philippe Muray l’a d’ailleurs conçu dans un cadre universitaire (lors d’un séjour à Stanford, en 1983), mais il manque l’appareil foisonnant des références, les notes infrapaginales qui prolifèrent et remontent parfois jusqu’au titre courant, les dizaines de pages de bibliographie répertoriant ouvrages imprimés, manuscrits conservés dans les endroits les plus insolites ou les moins accessibles, la littérature secondaire recensant même des notules publiées dans des périodiques locaux disparus et oubliés, la volonté d’exhaustivité, enfin, appliquée parfois à un seul auteur, voire à une seule œuvre. Mais le projet de Philippe Muray dépassait les forces d’un homme seul, puisqu’il s’agissait d’embrasser tout un siècle au long duquel on a beaucoup pensé, écrit et publié. Il le définissait ainsi :