Identification

Roman

Trafic, Galien Sarde (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 05 Avril 2023. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres

Trafic, Galien Sarde, Editions Fables Fertiles, avril 2023, 146 pages, 17 €

 

La littérature n’est-elle pas le fil invisible qui relie par-delà les siècles les hommes et les femmes, leurs vies, leurs passions, leurs œuvres et les personnages qui les animent ? N’est-elle pas célébration de l’intemporel, de ce qui demeure au fil des générations ? N’est-elle pas l’écritoire géant de nos quêtes existentielles ? Trafic, le merveilleux livre de Galien Sarde, incarne un peu de tout cela.

Dès les premières pages, on se laisse emporter dans le tourbillon d’une fresque vivante en perpétuel mouvement, à l’image des tumultes de l’existence. Aux « accidents de trafic » (embouteillages, accidents graves, visions cauchemardesques comme ce « visage bandé respirant en réanimation »), succèdent des jeux de lumière qui contribuent à créer une ambiance poétique, onirique et envoûtante. Ainsi, Galien Sarde dépose-t-il ses mots tel un peintre par touches flamboyantes de couleurs, dans un « déluge de lumières ». Il « peint » l’air brûlant de l’appartement où vit le héros, « les rayons de soleil » qui le « flambent », le « criblent » de « lignes étincelantes ». Il recrée des ambiances, immortalise la « féerie solaire » qui règne à proximité du Mississippi, « en se mêlant à l’eau du fleuve », les « teintes charnelles, rose, rouge et or ».

Nostromo, Joseph Conrad (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mardi, 04 Avril 2023. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques, Folio (Gallimard)

Nostromo, Joseph Conrad, Folio, 1992, trad. anglais, Paul Le Moal, 526 pages . Ecrivain(s): Joseph Conrad Edition: Folio (Gallimard)

 

Un roman d’aventures

Avant d’avancer dans la complexité énonciative et conceptuelle de ce roman-monde, tourbillon polyphonique aux mille voix, il est important que le lecteur sache que Nostromo est d’abord un formidable roman d’aventures, ce que les critiques de ce grand ouvrage oublient trop souvent de souligner. A la manière de ce que feront Gabriel Garcia Marquez et Carlo Emilio Gadda plusieurs décennies plus tard, Conrad fabrique de toutes pièces un état imaginaire, que sa formidable intelligence va rendre plus que vraisemblable, plus que réel : le syntagme des pays d’Amérique Latine du début du XXème siècle, avec leurs révolutions itératives et leur exploitation coloniale endémique. Immense république, le Costaguana (Costa Rica ? Guatemala ?) est le théâtre de ce roman et le territoire de cette geste baroque qui sert, une fois de plus, à dire la répugnance profonde de Conrad devant le fait colonial. On se rappelle la dénonciation des horreurs coloniales dans Au cœur des ténèbres.

Crépuscule, Philippe Claudel (par Anne Morin)

Ecrit par Anne Morin , le Lundi, 03 Avril 2023. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Stock

Crépuscule, Philippe Claudel, Stock, janvier 2023, 528 pages, 23 € . Ecrivain(s): Philippe Claudel Edition: Stock

 

Comme dans un conte, les personnages sont typés et désignés d’abord par leur fonction : le Policier, « Il était de taille médiocre, de visage olivâtre, et tout en os. Il portait un uniforme d’on ne savait quelle armée, que les ans et l’usure avaient fini par faire ressembler à un accoutrement de chasse » (p.12).

« La peau bistrée de son visage donnait sans cesse l’impression qu’il souffrait d’un mal hépatique, et la fine moustache, d’un noir de suie, ourlant sa lèvre supérieure, accentuait le sentiment d’inquiétude et de tragique qui émanait de sa personne » (p.13).

Le Médecin : « Le Médecin lapait le sien à la manière d’un chat, et d’ailleurs tout chez lui rappelait le chat, de ses moustaches maigres qui se divisaient de part et d’autre du visage pointu en ramifications hérissées, aux yeux en amande, vert et or, et à ses ongles aussi, que Nourio remarqua pour la première fois, et qui étaient étonnamment longs et acérés » (p.48).

Les Aventures de Tom Sawyer, Mark Twain (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 30 Mars 2023. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, En Vitrine, Tristram, Cette semaine

Les Aventures de Tom Sawyer, Mark Twain, Editions Tristram, Coll. Souple Deluxe, mars 2023, Préface Hervé Le Tellier, trad. Bernard Hoepffner, 320 pages, 14,90 € . Ecrivain(s): Mark Twain Edition: Tristram

 

« Qui va là ? »

« Tom Sawyer, le Vengeur Noir de la Mer des Caraïbes. Nommez-vous ».

« Huck Finn les Mains Rouges et Joe Harper la Terreur des Mers ». Tom leur avait fourni ces titres ronflants, empruntés à ses lectures favorites.

« C’est bon. Quel est le mot de passe ? »

Deux murmures rauques prononcèrent en même temps le mot sinistre dans la nuit lugubre.

« SANG ! »

Cette édition des Aventures de Tom Sawyer est la quatrième que publient les Editions Tristram, dans les traductions éblouissantes et pétillantes de Bernard Hoepffner (1) ;

Le Rayon vert, Jules Verne (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 29 Mars 2023. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Le Rayon vert, Jules Verne, Folio, février 2023, 160 pages, 3 € . Ecrivain(s): Jules Verne Edition: Folio (Gallimard)

 

Publié en 1882, Le Rayon vert est un bref roman de Jules Verne inspiré d’un phénomène optique extrêmement rare – et pour lequel ce récit provoquera un engouement relatif à l’époque : dans certaines conditions météorologiques précises difficiles à réunir, le soleil couchant émet un « rayon vert ». C’est ce rayon vert que veut voir la jeune Helena Campbell avant d’accepter de se marier à Aristobulus Ursiclos, scientifique auquel la destinent ses oncles, aussi riches que bienveillants Ecossais, les frères Melvill, soumis au moindre caprice de leur nièce. Bien sûr, la mécanique se grippe et si le rayon vert est bel et bien émis, il a un sens autre qu’optique – sauf à considérer qu’il permet d’ouvrir les yeux sur certains phénomènes autres que scientifiques.

Ce roman n’a que peu l’aura des aventures épiques auxquelles Verne a habitué tous les adolescents (et les adultes restés ouverts à leurs goûts d’enfants) francophones depuis un siècle et plus, il est attachant à bien des égards, dont celui-ci, particulier chez cet auteur à la curiosité scientifique insatiable capable de disserter des pages durant sur la façon dont l’oxygène est renouvelé lorsque le Nautilus est en plongée : c’est un roman où l’absence de goût pour la science l’emporte sur l’obsession pour les données chiffrées et le savoir engoncé ;