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La maladroite, Alexandre Seurat

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 03 Septembre 2015. , dans La Brune (Le Rouergue), La Une Livres, La rentrée littéraire, Les Livres, Critiques, Roman

La maladroite, août 2015, 122 pages, 13,80 € . Ecrivain(s): Alexandre Seurat Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

La Maltraitance infantile. Ce qu’on sait d’elle – de plus en plus, après tout l’infini des années-silence. Ces sujets-TV, ces faits divers posés devant nous, dans notre confort, notre bonne conscience – mais comment peut-on ? mais pourquoi n’a-t-on pas fait… le ronron de nous face aux scandales de la société dans laquelle nous nageons, en même temps que ce gamin qui…

On aurait attendu, là, et avec intérêt, l’essai ; les points de vue croisés des Institutionnels ou des décideurs. Des propos, des argumentaires, et, dépourvus d’identités diverses, floutés, sans noms, ni couleurs de cheveux, ni voix : les « sujets maltraités ». Alors le roman dans tout ça ? Et bien, le roman, justement…

Alexandre Seurat – premier roman, ici – connaît à fond son sujet, est ? voisine avec ? un des acteurs de son curieux récit-roman. Il réussit remarquablement à faire se croiser les aspects documentaires, les acteurs – institutionnels de tous poils ; école, médecine scolaire, services sociaux et juridiques – et ce qui nous prend aux tripes – allez ! pas guère après la page 12 ou 15 – nous faisant garder le bouquin à la main, jusqu’au moment où l’on éteint la lampe, dernière page fermée, en reposant le livre, un œil dessus : celui-là ! On se rappellera ! Objectif parfaitement atteint, Monsieur Seurat !

Casanova, Histoire de ma vie, en la Pléiade

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 20 Août 2015. , dans La Une Livres, La Pléiade Gallimard, Les Livres, Critiques, Biographie

Casanova, tomes 2 et 3, avril 2015, sous la direction de Gérard Lahouati et Marie-Françoise Luna, avec la collaboration de Furio Luccichenti et Helmut Watzlawick, 1299 pages . Ecrivain(s): Giacomo Casanova Edition: La Pléiade Gallimard

 

Histoire de ma vie, tomes 4 (1757-1760, Guerre de sept ans) à 10 (1770-1774, son retour à Venise). Deux forts volumes, suivant le premier, honorant l’esprit Pléiade – tout, organisé, éclairé ; plus quelques textes quasi inconnus émaillant ce qui peut légitimement prétendre au nom de somme, et servir à qui de droit. Edition établie d’après le manuscrit autographe. Quelque chose en cela, d’une découverte archéologique posée, incontestable et scientifique. Magnifique travail d’historiens et de chercheurs en littérature. Luminosité de lecture, facilité d’emploi, mais, aussi, plaisir immense de la découverte ou redécouverte d’écrits que chacun d’entre nous croit connaître !

Gérard Lahouati, Marie-Françoise Luna et leur équipe d’experts, tous patentés « Casanovistes », ont produit ces Pléiades avec ce qu’il fallait de rigueur, de précisions, de vérifications, de connaissances intimes de l’homme et son œuvre, et aussi d’amour, pour accompagner la folie – unique – d’une vie-voyage, vie-transgression, vie-dangers, et, bien sûr, vie-passion…

Traduit du Français, Bernard Pignero

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 07 Juillet 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

Traduit du Français, Ed. Encretoile, avril 2015, 172 pages, 18 € . Ecrivain(s): Bernard Pignero

On le sait amateur et connaisseur d’art, notamment de peinture, de musique, mais aussi de vin, de bons moments ; oui, c’est bien ça, de vie donc. Habitué des paysages du Sud et des brumes Picardes, sachant les regarder, les humer, en parler. Sa vie déjà longue, ses valeurs, ses passions, sa famille, ont déjà conduit sa plume à nous titiller l’intérêt de livre en livre, de chronique en chronique… Et ça, jusqu’à ce qu’on se dise : dans ce bonhomme de chemin, se cache un bonhomme,  Bernard Pignero, qui pourrait bien peaufiner d’une belle écriture, sage – pas toujours, « longue en œil » – assurément, des histoires profondes, qui, mine de mine, résonnent – et longtemps – dans nos émotionnels de lecteurs, dans nos vies à nous. Autant dire, un écrivain, un vrai. Et s’il n’en fallait qu’un, ce serait à ce livre de plaider dans ce sens.

Son « Traduit du Français » porte les qualités de ses autres livres, en un « cru » de grande année : récit, façon de le dire en belle langue aboutie, architecture, décor, atmosphère, personnages ! J’oubliais : pas une once d’ennui ; et ça ! Histoire amarrée sur plusieurs générations, autour d’une petite ville du Sud – Cévennes pas loin, qu’on pourrait situer dans Sommières, ou Lodève, dans ce Gard, par exemple, adossé à la montagne, œil vissé vers le sud, éclairé, soleil éclatant, mais zones d’ombres tout autant.

Les mémorables, Lidia Jorge

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mercredi, 17 Juin 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Langue portugaise, Récits, Métailié

Les mémorables, avril 2015, traduit du Portugais par Geneviève Leibrich, 348 pages, 20 € . Ecrivain(s): Lidia Jorge Edition: Métailié

Sur la couverture, ces pavés sinueux noir et blanc de Lisbonne, et une poignée d’œillets rouges. Ne s’agit-il pas pour la narratrice-reporter, d’origine portugaise, de « découvrir entre les petites pierres, les restes de ces fleurs, l’unique mitraille à laquelle votre peuple a eu recours pour déboulonner ces vieux types ». Travail de mémoire ? sur ces mémorables – ceux, les encore vivants après toutes ces années, qui ont été les acteurs, l’âme aussi, peut-être, de cette Révolution du 25 Avril 1974, au Portugal. Scénario simple : préparation d’un documentaire sur le sujet destiné à une TV américaine ; son titre – l’Histoire réveillée. Les mémorables qu’on va rechercher, observer, faire parler, puis chercher encore (surtout) ce qui se cache derrière leur mémoire affichée, sont sur une photo sépia et souriante, dans un bar de Lisbonne – les « Mémories », il y a trente ans, dans le soleil de la Révolution des fleurs rouges. Enquête à sa façon. On aura compris qu’on est d’un bout à l’autre de ce très beau livre, dans le miroir, les jeux d’ombre et de lumière. Si l’on vous dit enfin, que la narratrice est la fille – partie vivre aux USA, depuis longtemps – d’un journaliste acteur lui aussi de ce pan d’histoire portugaise, qu’elle retrouve taiseux et dissimulé, vous aurez compris que dans ces mémoires, fonctionnent aussi des boucles, et des cercles imbriqués. Au bout – n’est-on pas au Portugal ! – c’est des sculptures baroques de la fenêtre manuéline de Tomar qu’il s’agit, bien plus que d’un dessin linéaire et géométrique propre à l’esprit américain.

Mes clandestines, Sylvie Gracia

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 18 Mai 2015. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Editions Jacqueline Chambon

Mes clandestines, Jacqueline Chambon, hors collection (Actes Sud), mars 2015, 271 pages, 22 € . Ecrivain(s): Sylvie Gracia Edition: Editions Jacqueline Chambon

 

Elle aime les livres d’Annie Ernaux, Sylvie Gracia, et si elle ne l’avait pas dit, on l’aurait d’emblée deviné. Mais elle n’écrit pour autant pas Ernaux, mais bien Gracia. Elle a la matière, et pas moins la manière…

Livre dense aux mots pesés, comme à la balance du changeur ; livre à la façon de ces manuscrits d’heures médiévaux, qui aidaient à vivre, et, bien autant à mourir un jour. Livre re-fléchi de l’observatrice des autres qu’elle est, qu’elle a toujours été, qui jette ses pincées de souvenirs, de pensées même, là où il faut, pour que nous, ses lecteurs, on ramasse ce paquet de cailloux – toutes formes, toutes couleurs, afin qu’il nous serve à bâtir notre chemin, à nous. Livre chuchoté de femme à femme, mais d’une voix si claire et marquante !

Écrire pour avancer en soi, et tendre aux autres le miroir de la page ; la bonne blague ! Qui ne le sait, ne le pressent. Sauf, qu’il y a mots et mots, respiration des phrases, là et là, bref, sujets, bref, écriture ! Tout ça n’étant clairement pas  toujours signé du mot littérature. Ici, l’évidence éclate à chaque page ; Gracia offre un objet littéraire droit sorti de la source qui fait les plus grands :