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Articles taggés avec: Ferron-Veillard Sandrine

Toutes les femmes sauf une, Maria Pourchet (par Sandrine Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 28 Septembre 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques, Les Livres

Toutes les femmes sauf une, Maria Pourchet, Pauvert, septembre 2018, 136 pages, 15 €

 

Ce livre s’adresse à toi, le livre que tu prends en pleine figure, parce que tu es une femme. Parce que d’abord, tu es une femme blessée par ta naissance. Celles de toutes les femmes qui t’ont précédée. Tu n’as pas qu’une mère, tu en as des milliers.

Femme, tu portes les maux et le poids des morts, le poids du sang, le poids des mots. Tu enfanteras dans l’angoisse. La terreur de l’éventration. N’oublie pas la racine des mots. Ce n’est pas douleur qu’il fallait traduire mais angoisse.

Les mots qui déchirent.

Les hommes vont entrer dans ce livre avec malaise, précaution, curiosité, avec effroi. Ils seront à l’étroit.

L’entrée en matière. Ton arrivée au monde. Tu t’écrases sur une toile cirée, c’est à peu près ça, la salle de travail. La salle de travail. Il fallait une femme pour enquêter, il fallait Maria Pourchet pour raconter et dépasser le récit, le genre de livre qui se fout du réel ou de la fiction, il est au-delà du genre.

Entrées libres, Nouvelles, Philippe Delerm (par Sandrine Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Jeudi, 06 Septembre 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Nouvelles, Les éditions du Rocher

Entrées libres, Nouvelles, avril 2018, 121 pages, 7,90 € Edition: Les éditions du Rocher

 

Trois nouvelles rééditées.

Les Entrées libres sont plurielles, un clin d’œil culturel ou tout l’art de se renouveler. Cette joie minuscule d’exhumer l’existant, la pépite archéologique oubliée, remontée des profondeurs qui, désormais exposée, s’invente.

Philippe Delerm. Aimer ces infiltrations sensorielles, ses pointillismes, sa pâte d’aquarelliste ou cette manière discrète, voire « diluée » de raconter les/des histoires. Première nouvelle. L’Envol. Delmas est un homme quelconque, un homme vu de loin. Delmas est un homme exquis, une fois installé dans un musée. Posé au bord pour n’y contempler que la beauté. Le vide. Au bord du vide, le vide permet l’extase. Placé devant un tableau, être au bord des larmes, avoir le désir insondable d’y sombrer. Aller au-delà du motif, se laisser pénétrer par la fibre, noyer par la couleur, absorber par la texture.

Tropique de la violence, Nathacha Appanah, par Sandrine Ferron-Veillard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 15 Juin 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Tropique de la violence, Nathacha Appanah, Folio, mai 2018, 192 pages, 6,60 €

 

« Ils prennent leur élan sur la jetée de béton, leurs jambes noires et maigres comme des bâtons filant à vive allure. Arrivés au bout, ils se jettent dans l’océan en remontant leurs genoux, ouvrant leurs bras, criant leur joie ».

La légèreté du désespoir. L’attraction du vide lorsque l’espoir ne retient plus.

À propos de ce livre magistral, qu’ajouter sinon saluer ici la note de lecture de Pierre Perrin, rédacteur à La Cause Littéraire.

Et pourtant !

Ici les odeurs ont un corps. Les sons. L’invisible est omniprésent.

Il faut écouter Mayotte pour qu’elle ne sombre pas. Le rapport à l’Autre qui ne fonctionne plus, l’accueil qui n’opère plus, le chômage et la pauvreté qui sont inacceptables, les politiques et la parole impeccable. Impraticable. Sentir ses couleurs, la couleur de ses peaux, la peau de ses enfants que même la terre n’accroche plus. Les enfants seuls, les enfants abandonnés. Ils errent, ils se terrent. Ils grandissent comme des fruits sur un arbre. Ils pourrissent.

Mes intimes étrangers, Luc Duwig, par Sandrine Ferron-Veillard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Lundi, 30 Avril 2018. , dans La Une CED, Les Chroniques

Mes intimes étrangers, Luc Duwig, Carnets Nord, mai 2018, 167 pages, 16 €

 

Au jeu du réel et du fictionnel, Luc Duwig gagne. Attention ami lecteur, il va te malmener. Te dire toute la vérité ou travestir toutes les lignes. Tu es averti. Le lien et la famille, celui auquel tu t’attaches parce que tu le crois vrai, parce que tu crois que le mot est vrai. La place de chacun sur la ligne. Sa patine, sa légende et son héritage. Le récit a existé. Les personnages. Reconstitution imaginaire. Treize photos à mi-parcours. Et deux cartes. Trente-deux chapitres. Tu es intrigué.

Jeest le narrateur né en 1961, au pied du mur. Berlin et la guerre froide. Jeest le petit-fils sous l’ombre du grand-père, Jean-Ferdinand. La belle histoire de famille. Et pourtant. Taches et dates manquantes sur l’échiquier familial. Le grand-père que chacun prétend disparu, que chacun efface avec sa propre langue.

C’était mieux avant !, Michel Serres

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Lundi, 26 Février 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Le Pommier éditions

C’était mieux avant !, août 2017, 96 pages, 5 € . Ecrivain(s): Michel Serres Edition: Le Pommier éditions

 

Le prochain qui nous dira : « C’était mieux avant ! »

Nous entendrons : « J’étais mieux avant ! »

Écoutons plutôt l’un d’entre nous, et pas des moindres, l’optimiste penseur, l’inventeur heureux, ce regardeur d’immensité nous parler d’un immense sans barrières. Avec la passion qui le caractérise. Pour notre salut et notre longévité. Les livres comme autant de miracles. Pour notre plaisir.

Ne désespérons plus surtout !

Il y aurait des phosphorescences un peu partout pour éclairer, non pas la nuit entière mais les nôtres, nos petites nuits, clamer que notre époque est grande et belle, non pas transparente mais lumineuse en chacun de nous. Nous devrions vivre plus longtemps pour pouvoir imaginer d’autres formes, inventer d’autres sources, nourrir d’autres modèles. Créer d’autres possibles. Il en va de notre survie collective.