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Polars

Femmes sans merci, Camilla Läckberg (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Jeudi, 25 Juin 2020. , dans Polars, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Actes Noirs (Actes Sud)

Femmes sans merci, juin 2020, trad. suédois, Rémi Cassaigne, 144 pages, 14,90 €

Trois femmes, trois destins croisés grâce à Internet. Comme dans tout roman policier bien conçu, c’est l’intrigue de Femmes sans merci qui tient le lecteur en haleine. Cette intrigue, construite sur la succession de brefs chapitres portant en titre le nom de l’une des trois héroïnes, remplit bien son rôle de page-turner.

Comme dans tout roman policier bien conçu, les personnages se font le miroir de problèmes sociétaux prégnants dans la société occidentale. Dans cet ouvrage, longue nouvelle ou novella plutôt que roman, c’est la violence conjugale qui est dénoncée, celle des hommes envers leurs femmes, parallèlement à l’éclosion du mouvement #MeToo. Trois destins de femmes, si marqués par l’humiliation ou les coups et l’emprise psychologique et/ou matérielle, qu’on se demande comment une telle concentration d’abjection est possible, en Suède, au XXIe siècle.

Victoria Brunberg, d’origine russe, venue en Suède pour se remarier après la tragédie de son premier mariage, est traitée comme une sorte « d’animal de compagnie » et instrumentalisée par son mari : « “Pipe”, ordonna-t-il, sans quitter l’écran des yeux, en baissant son pantalon de survêtement et son caleçon. Elle s’agenouilla devant le canapé et prit son pénis flasque dans sa bouche ».

Un jour comme les autres, Paul Colize (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 30 Mars 2020. , dans Polars, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Un jour comme les autres, Paul Colize, mars 2020, 512 pages, 8 € Edition: Folio (Gallimard)

Comme un avertissement, en incipit, on trouve inscrite cette phrase de Climats d’André Maurois : « L’amour supporte mieux l’absence ou la mort que le doute ou la trahison ». Puis on enchaîne, comme un opéra construit en quatre actes, avec une ouverture : « Quel sangue versato al cielo s’innalza… », le chant de la reine vierge interprété par Beverly Sills dans Robert Devereux de Donizetti, dont le sujet est la trahison d’Elisabeth, par le comte d’Essex. Placé sous le double signe de la trahison et de l’opéra, le roman de Colize nous promet semble-t-il frissons et chants conjugués harmonieusement jusqu’à se perdre dans ce qui pourrait être un final en grincements de violons. La note est donnée.

À Ranco, sur les bords du lac Majeur se languit Emily, traductrice et soprano. Son compagnon, Eric Deguide, professeur de droit, est parti un beau matin, le vendredi 14 novembre 2014, il y a 614 jours, au volant de son véhicule pour ne plus réapparaître. On a découvert ce dernier, de marque SAAB, dans le parking de l’aéroport de Zaventem en date du 19 novembre 2014. Tout aurait pu en rester là si un geek, Michel Lambert, n’avait, ayant ouvert un forum en ligne consacré aux affaires criminelles belges, hameçonné une personne Axe-L prête à lui faire des révélations. Il n’en suffira pas plus pour qu’Alain Lallemand, journaliste d’investigation et son collègue Fred flairant la bonne affaire, « réveillent » le mystère de la disparition Deguide et se mettent en chasse.

Empire des chimères, Antoine Chainas (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Jeudi, 09 Janvier 2020. , dans Polars, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Empire des chimères, septembre 2019, 740 pages, 10,20 € . Ecrivain(s): Antoine Chainas Edition: Folio (Gallimard)

 

Au tournant des années 1983 et 1984, alors que l’on commence au cours du premier gouvernement Mitterrand à parler de rigueur budgétaire, et que l’on découvre à Lépanges-sur-Vologne le corps du petit Grégory, à Lensil, autre village de la France profonde, on constate, après une partie de cache-cache, la disparition de la petite Edith. « Décidément – aurait pu dire un célèbre présentateur du journal télévisé de l’époque – la France va mal ! ». À Lensil, alors que le prix du terrain chute, que l’on voit apparaître ici et là d’inquiétantes plaques de moisissures, tous les habitants sont mobilisés, en vain, pour rechercher la disparue.

Pendant ce temps-là, aux États-Unis, une importante société, LIM, qui n’est pas sans rappeler Disney, même si toute ressemblance avec des personnes existantes ou inexistantes ne serait que purement fortuite et involontaire, rêve d’installer en France (par défaut en Espagne) un parc à thème basé sur un jeu de rôle à succès : l’Empire des chimères.

De bonnes raisons de mourir, Morgan Audic (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 10 Décembre 2019. , dans Polars, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Albin Michel

De bonnes raisons de mourir, mai 2019, 492 pages, 21,90 € . Ecrivain(s): Morgan Audic Edition: Albin Michel

 

Clemenceau disait qu’on ne ment jamais tant qu’avant les élections, pendant la guerre et après la chasse. Il aurait pu ajouter, s’il avait connu ce genre de tragédie : on ne ment jamais autant qu’avant, pendant et après une catastrophe nucléaire. Avant, en affirmant qu’elle ne risque pas de se produire ; pendant, en prétendant que la situation est sous contrôle, et après, en racontant que les retombées radioactives se sont sagement arrêtées aux frontières.

On aurait pu penser qu’une fois les populations évacuées, avec ce mélange d’héroïsme et d’impréparation caractéristique de l’ancienne Union soviétique (mais comment se préparer à un événement dont on refuse d’envisager l’irruption ?), la région de Tchernobyl demeurerait gaste terre, sinon pour l’éternité (notion qui a peu de sens dans notre monde sublunaire), au moins pour quelques siècles, le temps que s’estompent les patientes radiations. C’était sans compter l’appétit de lucre de certains voyagistes, ne demandant qu’à flatter l’impudeur, l’inconscience, l’absence de common decency, la bêtise d’idiots venus par milliers faire des selfies au milieu du monde d’après l’Apocalypse, dans cet état intermédiaire où l’humanité a déjà disparu mais où la nature n’a pas entièrement repris ses droits.

Quatre romans noirs, Tonino Benacquista (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mardi, 22 Octobre 2019. , dans Polars, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

Quatre romans noirs, juin 2019, 704 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Tonino Benacquista Edition: Folio (Gallimard)

 

Ce volume rassemble quatre romans de Benacquista : La maldonne des sleepings, Les morsures de l’aube, Trois carrés rouges sur fond noir et La Commedia des ratés, publiés respectivement en 1989, 1990, 1991, 1992, au début de la carrière de l’auteur.

La maldonne des sleepings est l’histoire d’un jeune couchettiste des wagons-lits, travaillant sur le Galileo reliant Paris à Venise, qui se trouve embarqué, par un voyageur embarrassant, valant des millions, dans une histoire rocambolesque.

Les morsures de l’aube raconte l’aventure de deux copains, Antoine et Bertrand (Mister Laurence), parasites, hirondelles, pique-assiettes qui munis ou non de cartons d’invitation consument leurs vies d’inaugurations en inaugurations, de soirées en soirées et de boîtes en boîtes. Ils croisent furtivement un de leur congénère Jordan et sa sœur Violaine qui se prennent pour des vampires en laissant dans le creux du cou de leurs proies la marque de leurs crocs. Ils vont se trouver mêlés à une sombre et dangereuse histoire de chantage due à leur mode de vie.