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Les Livres

L’Âge de l’innocence, Edith Wharton (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 17 Septembre 2024. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, USA, Roman, Les Belles Lettres

L’Âge de l’innocence, Edith Wharton, Les Belles Lettres, 2019, trad. anglais (Etats-Unis) Sarah Fosse, 453 pages, 15,50 € . Ecrivain(s): Edith Wharton Edition: Les Belles Lettres

 

C’est en 1920 que paraît ce roman qui obtient le Prix Pulitzer en 1921. L’autrice, Edith Wharton, entend répondre à son mentor, Henry James, qui lui enjoignait de dépeindre New York, avec ce roman qui se situe donc dans le New York de la seconde moitié du 19ème siècle.

C’est plus précisément au début des années 1870 que se situe le roman, dans le milieu très fermé de la bonne société new-yorkaise, milieu élitiste dans lequel l’étiquette a ses exigences auxquelles on ne saurait se soustraire. Tout y est codifié, s’agissant du langage, du vêtement (on se change pour le dîner…), du maintien corporel ou des interactions dans une société qui règle les parcours, qui ne tolère aucun écart quant aux codes en vigueur et où les unions ne sont pas nécessairement liées au transport amoureux.

Les lointains, Jean-Christophe Bellevaux (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 17 Septembre 2024. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Poésie

Les lointains, Jean-Christophe Bellevaux, éditions Faï Fioc, 2023, 89 pages, 11 €

 

Proximité

J’ai de la joie et de la surprise en rédigeant cette chronique sur ce poète important qui vit dans la région Centre-Val de Loire, région mienne depuis maintenant un an. Parce que je me sens proche à la fois du style et de ce que contiennent ces poèmes. Une sorte d’écoute de soi, d’images qui hantent, de lieux de proximité, de confessionalisme, d’associationnisme. Avec en ligne de mire, guettant la liberté, une langue qui exprime cette disponibilité à la chose toujours nouvelle qu’est la vie. Peut-être est-ce pour moi un miroir, miroir tendu par la main du poète où je reconnais mes années 80 à Paris, la déroute brutale des années punk et la faillite sociale.

Cette poésie est bel et bien une double focale entre celle de l’auteur et celle des pages de l’écrivain, mitoyenneté du langage et de la chose vécue ou revécue.

Coups de griffes N°11 (par Alain Faurieux)

Ecrit par Alain Faurieux , le Lundi, 16 Septembre 2024. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

 

L’enragé, Sorj Chalandon, Grasset, 2023, 407 pages, 22,50 €

Si vous voulez de la subtilité, allez voir ailleurs. L’enragé c’est un croisement de Détective et de Pif le chien. L’écriture rappelle ces journaux à sensation bien oubliés aujourd’hui, faut qu’ça aille vite, tape fort. L’enragé c’est une curiosité. Comme un de ces romans des 70s où l’auteur témoigne d’un vécu hors de l’ordinaire ; bagne, grand banditisme, voyage au Tibet, expériences hors du corps. Sauf que Chalandon ne nous parle pas de son expérience mais « recrée » la vie d’un évadé du bagne pour enfants de Belle-Isle. Sauf que Chalandon n’est pas Papillon. Alors c’est très touchant question bons sentiments, mais c’est tellement images d’Epinal qu’on étouffe un peu. Beaucoup. Les matons sont vicieux, les élites pourries, les communistes au grand cœur, les filles-mères à plaindre, les marins mouillés et les colons bastonnés. Et l’enragé se calme puis meurt. Et on croise Prévert.

Dors ton sommeil de brute, Carole Martinez (par Anne Morin)

Ecrit par Anne Morin , le Lundi, 16 Septembre 2024. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Dors ton sommeil de brute, Carole Martinez, Gallimard, août 2024, 393 pages, 22 € Edition: Gallimard

 

Il y a le chant, hypnotique, berceuse, incantation, psalmodie, une voix qui fait sens, à laquelle il faut donner suite, et prise… suivre l’enchantement, être prêt à y répondre, c’est le rôle confié aux enfants. Être prêt à y répondre, déchiffrer, défricher ce que la nature espère… ? que l’on y reconnaîtra, que l’on se reconnaîtra, c’est le rôle des adultes.

Un géant une pierre à la main, un homme des bois, des marais, de la nature, un innocent. Un monde entre ciel et terre, entre arbres et forêt, un monde de conte de fées, tel qu’il pouvait être avant.

Avant la chute, avant l’avancée, la marche forcée du progrès, contre nature.

Le sommeil signifiant, le retour arrière, le rêve, le fil de la vie, la préservation. Le chant émerge comme un fil à suivre, passer et repasser dans le chas.

Le Gardien du verger, Cormac McCarthy (par Jeanne Ferron-Veillard)

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Vendredi, 13 Septembre 2024. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, USA

Le Gardien du verger (The Orchard Keeper, 1965), Cormac McCarthy, éditions de l’Olivier, janvier 2024, trad. anglais (États-Unis), François Hirsch, Patricia Schaeffer, 298 pages, 12,50 € Edition: Points

J’ai ce même goût en bouche. L’élan et la curiosité. L’appétit, celui de l’inattendu. Devant un livre, je suis comme ces critiques gastronomiques qui entrent sans préavis ou par effraction, avec invitation ou sans avis de passage, dans les restaurants qu’ils vont autopsier. Celui ou celle qui dîne à tous les râteliers, l’importun, l’imposteur, l’impertinent, le redouté, le pas si redoutable, le mélancolique qui se délecte de son bonheur de l’être, etc. Critiquer un mets et gagner son pain avec. J’entre dans l’histoire avec la mienne sous le bras.

Lire en songeant à l’auteur, et sans attentes, l’attente non atteinte est un désespoir dont on se remet avec peine. Prêter attention, observer ses procédés et se rendre disponible. Ne faire que cela, c’est presque un acte de résistance, lire sans consulter son téléphone ou manger ou tout autre activité qui nuit à l’intégrité du livre. Guetter les fêlures comme les cheveux dans les assiettes. Le faux-pas ou le manque de structure. La concentration. Les accords entre les plats. Le fil qui se casse en cours de route. La fausse route ou les transitions qui se brisent contre le paragraphe suivant. Les fumets, les vapeurs et tous les effets de style pour estomper les contours du réel ou les rendre plus visibles. Quelque chose dans ce goût-là.