Nature de l’obsession, obsession de la nature
Devant l’œuvre complète d’un poète, bien souvent je suis l’évolution de la forme poétique – par exemple, dans le cas de Rilke où je voyais au fur et à mesure de ma lecture que le poète tendait vers son œuvre magistrale, arrivée à la toute fin de sa vie – pour en déduire le climax et le moment d’apothéose, quelque chose comme le moment sublime. Ici, tout est donné dès la première strophe. On y voit la densité et le chant de Becker et on entame ainsi une découverte très ordonnée, très corsetée. Et cette célérité à définir un cadre de quatre vers par strophe, d’aller de strophe en strophe jusqu’à la fin de l’ouvrage – lequel se conclut sur des poèmes posthumes ou inédits qui font état de textes non conformes au rythme des quatre vers par strophe –, est un exercice unique. Je comparerais cette monomanie à celle des sonates de Domenico Scarlatti, qui, comme on le sait, a écrit durant sa vie plus de cinq cents sonates, à l’exclusion presque totale d’autres formes musicales.