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Articles taggés avec: Leuckx Philippe

Le Livre des livres perdus, Giorgio Van Straten

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 24 Avril 2017. , dans La Une Livres, Actes Sud, Les Livres, Critiques, Italie, Roman

Le Livre des livres perdus, avril 2017, trad. italien Marguerite Pozzoli, 176 pages, 18 € . Ecrivain(s): Giorgio Van Straten Edition: Actes Sud

 

Cette enquête passionnante autour de huit livres perdus, égarés ou disparus ou détruits pour diverses raisons, tient de la chasse aux trésors, entreprise par des adultes qui ont gardé l’âme des enfants chasseurs. Pourquoi ne peut-on lire ces œuvres d’auteurs célèbres ou reconnus ? C’est l’objet de cette recherche qui touche des récits, romans ou mémoires des XIXe et XXe siècles.

Ce livre comporte un avant-propos qui situe les enjeux de la quête fabuleuse, huit récits, une annexe (liste raisonnée des livres cités), un index des références. L’essai s’incruste au scalpel dans l’itinéraire créateur de huit écrivains qui ont, pour des motifs que ce livre argumente, abandonné, censuré, brûlé ou perdu une œuvre d’importance. L’essayiste s’est rendu sur les lieux de la disparition pour mener son enquête : Londres, Florence, Catalogne, Paris, Pologne, Canada, Moscou.

Les écrivains se nomment Romano Bilenchi, George Byron, Ernest Hemingway, Bruno Schulz, Nicolas Gogol, Malcom Lowry, Walter Benjamin et Sylvia Plath. Des itinéraires sombres pour plus d’un, marqués au sceau du suicide, de la boisson et de la névrose. L’intérêt marquant du livre est de nous faire vivre de l’intérieur ces pages qu’il nous sera impossible de lire mais bien d’imaginer, de rêver, parfois grâce à des découvertes qui tiennent du miracle.

La nature exposée, Erri De Luca

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 11 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Italie, Roman, Gallimard

La nature exposée, mars 2017, trad. italien Danièle Valin, 176 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Erri de Luca Edition: Gallimard

 

 

Le dernier livre de De Luca est tout à la fois un roman aux divers personnages anonymes, une réflexion sur la mer, la montagne, la sculpture, une fable sur notre destinée, un hymne à la création, un aller-retour de la campagne à la ville aimée, Naples.

C’est peu dire que ce livre enchante. Autant par son histoire, toute simple, que l’on pourrait prendre pour édifiante, celle d’un sculpteur, quitté par une femme qui lui reprochait sa modestie, et qui se voit chargé de la restauration d’un Christ crucifié, que l’on doit à un artiste disparu, statue qui s’est vu infliger une modification par rapport à l’original. On a en effet couvert la nudité d’un ajout. On a maquillé la gêne, c’est-à-dire la nature, le sexe. Il s’agira donc de renouer avec la sculpture initiale, nue, en marbre, enlever le drapé qui la gauchissait.

A Rome avec Nanni Moretti, Paolo Di Paolo & Giorgio Biferali

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 05 Avril 2017. , dans La Une Livres, Quai Voltaire (La Table Ronde), Les Livres, Critiques, Essais, Italie

A Rome avec Nanni Moretti, mars 2017, trad. italien Karine Degliame-O’Keeffe, 176 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): Paolo Di Paolo & Giorgio Biferali Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Deux jeunes essayistes romains (l’un né en 1983, l’autre en 1988) tentent, par cet essai à la fois intime et très documenté, de montrer la relation particulière qu’un cinéaste noue avec la Ville éternelle.

Onze films, de Je suis un autarcique (1976) à Mia madre (2015), se déroulent à Rome, prennent Rome, non seulement comme toile de fond à des intrigues, mais encore comme parties essentielles de la vie d’un cinéaste qui ne peut décemment se passer de sa ville comme on ne peut le faire de sa propre mère. Du Monte Mario à Ostiense, en passant par Nomentana, le quartier Prati, Monteverde (où vécurent Pasolini et le cinéaste lui-même), Garbatella, tout Rome défile, jusqu’à montrer des coins tout à fait périphériques, des vues des bourgs plus éloignés encore. En ce sens, Moretti ne fait là que poursuivre une longue tradition de cinéastes romains puisant à la capitale des pans entiers de leurs films (De Sica, Monicelli, Scola, Emmer, Di Gregorio, Pasolini, Fellini…).

Enfance, dernier chapitre, René de Ceccatty

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 28 Mars 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Biographie, Gallimard

Enfance, dernier chapitre, février 2017, 440 pages, 22 € . Ecrivain(s): René de Ceccatty Edition: Gallimard

 

 

L’écrivain né à Tunis, il y a soixante-cinq ans, se penche, dans ce lourd volume, sur son enfance, en Tunisie d’abord, à Montpellier ensuite. Mais est-il possible de faire resurgir toute cette masse confuse de souvenirs, « de souvenirs de souvenirs », quand il y a tant d’altérations, de pertes, de rationalisation de la mémoire ?

Que fut son enfance de 1955 à 1962 ? Qu’a-t-il vécu, dans cette maison de Mégrine en Tunisie, qu’il dut quitter dès 1958 à cause des événements d’Algérie ? Que sont devenues les demeures de ses grands-mères paternelle et maternelle ? Quel souvenir a-t-il de son frère aîné Michel, mort en 1947, dont on lui a tant parlé ? Il partage aujourd’hui la mémoire des choses avec Jean, de vingt-sept mois son aîné.

L’éclipse de lune de Davenport et autres poèmes, Jim Harrison

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 21 Mars 2017. , dans La Une Livres, La Table Ronde - La Petite Vermillon, Les Livres, Critiques, Poésie, USA

L’éclipse de lune de Davenport et autres poèmes, janvier 2017, trad. américain Jean-Luc Piningre, édition bilingue, 192 pages, 7,10 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

Sans être en rien lyrique ni romantique, le poète-romancier Harrison en pur réaliste réussit à nous convaincre, le temps de la lecture de ses poèmes, de faire un bout de trajet américain avec lui. En Amérique profonde, cela va sans dire, tant les poèmes regorgent d’allusions à ces terres de solitude, pleines d’animaux (pumas, coyotes, corbeaux), à l’heure où Jim se donne un rien de vitalité en humant l’air de lune, la tombée du soir, en décrivant les alentours de son chez soi.

J’ai lu que dans

l’immensité sauvage

le vieux Nieh dressa un tigre des montagnes

à porter son bois pour le feu.

Le poète recueille le menu, l’infime, les vibrations, les altérations de l’air, les violences communes, et distille une mélancolie de fin du monde, où il se sent devenu trop vieux pour vivre les changements.