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Récits

Chronique d’un meurtre annoncé, David Grann

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 12 Avril 2018. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Allia

Chronique d’un meurtre annoncé (A Murder Foretold), trad. américain Damien Aubel, 110 pages, 3,10 € . Ecrivain(s): David Grann Edition: Allia

 

Voilà un livre (presque) minuscule. 110 pages dans un mini-format. Il n’en faut pas plus à David Grann pour nous coller à notre fauteuil. Il nous raconte, par le menu, l’incroyable, l’improbable affaire Rosenberg survenue au Guatemala en 2009. Si vous connaissez l’affaire, rassurez-vous, l’art narratif de David Grann la rend quand même passionnante. Si vous ne la connaissez pas, attendez-vous à sauter en l’air quand les clés de l’intrigue vous seront révélées.

Tout commence par un double assassinat, celui de Khalil Musa, riche industriel guatémaltèque et de sa jolie fille, Marjorie (tuée par « accident » lors du meurtre de son père). Or un célèbre avocat, Rodrigo Rosenberg, ami des Musa, était follement amoureux de Marjorie et comptait l’épouser bientôt. Rosenberg sombre dans une dépression terrible, puis se convainc rapidement de la culpabilité du pouvoir guatémaltèque qui aurait fait abattre Musa pour empêcher des révélations sur des malversations au ministère de l’intérieur.

Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse, Jules Verne

Ecrit par Gilles Banderier , le Vendredi, 06 Avril 2018. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Le Cherche-Midi

Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse, février 2018, édition établie par Christian Robin, 256 pages, 21 € . Ecrivain(s): Jules Verne

 

 

La ville de Nantes a fait en 1981 l’acquisition d’un lot de manuscrits de Jules Verne, pour la somme de six millions de francs (environ un million d’euros). Il y a toujours quelque chose d’excitant dans les manuscrits d’écrivains, surtout lorsqu’ils recèlent des textes inédits de quelque étendue. C’était le cas, puisqu’on trouvait, parmi ces papiers, une œuvre inconnue, le Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse, rédigé après que Jules Verne s’est rendu dans les îles britanniques en 1859. Ce Voyage à reculons en Angleterre et en Écosse n’est certes pas un chef-d’œuvre oublié, mais il se lit sans déplaisir et on y retrouve l’ironie froide du romancier (ainsi cette remarque sur sa cité natale : les voyageurs « essayèrent de tuer le temps en visitant la ville ; mais le temps a la vie dure à Nantes, et ne se tue pas facilement », p.19. On voit que l’édilité nantaise n’a pas été rancunière en acquérant ce manuscrit).

Retour à Séfarad, Pierre Assouline

Ecrit par Stéphane Bret , le Mercredi, 14 Mars 2018. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Retour à Séfarad, janvier 2018, 426 pages, 22 € . Ecrivain(s): Pierre Assouline Edition: Gallimard

 

Retour à Séfarad met en scène un candidat, juif séfarade, à l’obtention du passeport espagnol, démarche rendue possible par une déclaration du roi d’Espagne Sa Majesté Felipe VI qui affirme dans un discours prononcé en 2015 en guise de conclusion : « Comme Vous nous avez manqué ! ». Hommage rendu à la participation des séfarades à la vie espagnole, à la transmission à leurs enfants de l’amour de cette patrie espagnole, ce discours interpelle Pierre Assouline, qui prend au mot le discours du roi. Il sera candidat au passeport, à la nationalité espagnole. Seulement voilà : cinq siècles ont passé depuis l’expulsion de 1492, et bien des changements ont eu lieu. Pour Pierre Assouline, les tentatives de retrouvailles de la maison familiale, du cimetière, de l’ancien quartier juif, la juderia, peut-être rasée, sont vouées à l’échec ; il lui suffit de « savoir que notre mémoire précède notre naissance. De mon expédition dans ce passé-là où je suis parti retrouver des paroles, des voix, un souffle gelés dans l’hiver des livres, je n’espère pas rapporter des vérités mais tout au plus des effets de vérité. Non des preuves mais des traces puisque, comme le dit René Char je crois, seules les traces font rêver ».

Le garçon qui courait, François-Guillaume Lorrain

Ecrit par Jean Durry , le Mercredi, 07 Mars 2018. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Sarbacane

Le garçon qui courait, janvier 2017, 232 pages, 15,50 € . Ecrivain(s): François-Guillaume Lorrain Edition: Sarbacane

 

Un des moments inoubliables des Dieux du Stade de Leni Riefenstahl : le crâne rond aux cheveux coupés entièrement courts, il martèle son ombre sur le sol à petites foulées implacablement régulières et les gouttes de sueur se détachent l’une après l’autre de son visage. Sur la plus haute marche du podium du marathon des Jeux Olympiques de Berlin 1936, tandis que monte au mât le drapeau du Japon, Son Kitei baissera obstinément la tête [tout comme son compatriote Nam, troisième derrière l’Anglais Harper], précédant de 32 années les Tom Smith et John Carlos révoltés des Jeux de Mexico.

En vérité, il s’appelle de naissance Shon Kee-Chung et il est Coréen. Mais depuis 1919 la Corée n’existe plus aux yeux du monde, rayée, phagocytée par l’envahisseur nippon en constante expansion sur l’Asie du Sud-Est. Ce sont cette histoire et cette douleur dont s’est nourri François-Guillaume Lorrain en romançant avec finesse la destinée réelle du petit garçon de 7 ans qui, détalant à toutes jambes pour échapper comme son aîné d’un lustre Hyo-Dong aux sommations de leur poursuivant en uniforme, prend à peine conscience qu’il a rejoint puis dépassé son grand frère. Ainsi « ce petit bonhomme court sur pattes » qui « jusque-là n’aimait rien tant que la lenteur » se révèle-t-il à lui-même.

Le goût de Berlin, Kristel Le Pollotec

Ecrit par Philippe Leuckx , le Lundi, 26 Février 2018. , dans Récits, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Mercure de France

Le goût de Berlin, octobre 2017, 130 pages, 8 € . Ecrivain(s): Kristel Le Pollotec Edition: Mercure de France

 

Dans le droit fil de la collection qui tire ses atouts d’un choix expert de textes, qui puissent restituer une ville dans son parcours historique et culturel, d’écrivains et de témoins de premier ordre, voilà Berlin.

Berlin est bien la ville de toutes les mutations, et quoi de commun entre la capitale de l’empire et celle d’aujourd’hui, après la réunification des deux Allemagne ? Quand on sait qu’elle s’est développée d’une manière personnelle, qu’elle a été toutes époques confondues le symbole de diverses générations, qu’elle fut parfois le laboratoire d’expérimentations culturelles, qu’elle fut, dans sa dernière période, le lieu et la lie de tous les dangers, entre 33 et 89, passant du nazisme à sa division en secteurs d’occupation, traversant guerre froide, connaissant les problèmes de ségrégation violente (la question du Mur…) et la renaissance, quand le mot liberté fleurit de nouveau, basculant les pires époques de son histoire.

L’auteur s’aide de grands textes pour illustrer, évoquer, restituer les diverses formes que Berlin a pu adopter au fil du temps.