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Essais

Une voyante passe aux aveux, Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, Valérie Fauchet (par Marjorie Rafécas Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Mercredi, 06 Novembre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Une voyante passe aux aveux, Entretiens avec Marie-Noëlle Dompé, Valérie Fauchet, Editions Ipanema, octobre 2019, 233 pages, 17,90 €

Il existe, malheureusement, des dons que l’on subit. Certaines personnes possèdent en effet le don de « pré-voir ». Contrairement aux surdoués, les dons de voyance sont jugés douteux et sont ignorés par la science. Pourtant ces personnes « voyantes » n’ont pas décidé d’avoir ces « flashs », ils s’imposent à eux. Comment faire alors pour ne plus voir ?

Dans ce livre Une voyante passe aux aveux, le témoignage de Valérie Fauchet est troublant, sa vie ressemble à un roman fantastique. Pour donner du coffre à ses expériences, et prouver qu’elle n’a pas peur d’être titillée par l’exigence de preuves factuelles, l’auteure a eu la bonne idée d’être interviewée par une magistrate, Marie-Noëlle Dompé. La voyance au tribunal ? Oui, mais il ne s’agit pas pour autant d’un procès. Cette magistrate, aguerrie à l’impartialité, a joué le rôle de l’investigatrice bienveillante pour comprendre comment se manifeste cette méga intuition chez notre voyante peu commune. La voyance apparaît alors sous un autre jour, plutôt comme une hypersensibilité insoutenable. Comme une faille qui attire la lumière d’un flash.

Les Ruines de Port-Royal des Champs, Abbé Henri Grégoire (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 05 Novembre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Honoré Champion

Les Ruines de Port-Royal des Champs, Abbé Henri Grégoire, mai 2018, Édition nouvelle établie et annotée par Jean Lesaulnier, 222 pages, 39 € Edition: Editions Honoré Champion

Personne ne connaîtra jamais avec certitude le nombre exact de monastères qui virent le jour sur le sol européen, depuis l’avènement du monachisme jusqu’à la période moderne. Des milliers, des dizaines de milliers probablement, de l’humble prieuré de quelques moines à l’immense abbaye de Cluny, rayonnant sur plusieurs nations. Voici un premier paradoxe : il n’y a aucune commune mesure entre les dimensions du monastère de Port-Royal (on devrait d’ailleurs employer le pluriel, car il y eut deux établissements, l’un à Paris, l’autre – la maison-mère – dans la vallée de Chevreuse), son effectif réduit et son rayonnement, qui ne s’éteignit même pas lorsque Louis XIV eut fait raser l’abbaye et déterrer sauvagement religieux et religieuses défunts. Et nous trouvons là le second paradoxe : comme ces étoiles dont le rayonnement nous parvient alors qu’elles ont disparu depuis des millénaires, l’influence de Port-Royal s’étendit sur tout le XVIIIe siècle et bien au-delà encore. Les Ruines de Port-Royal des Champs sont une apologie, composée à une époque où les ruines sont un thème à la mode (on s’étonne de ne voir mentionné nulle part, sauf erreur, le nom de Volney, dont le maître-livre fut publié en 1791, dix ans avant la première édition des Ruines, confiées par l’abbé Grégoire aux Annales de la religion, puis remaniées et republiées en 1809, un siècle après la destruction de la célèbre abbaye).

Lettre à René Char sur les incompatibilités de l’écrivain, Georges Bataille (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 04 Novembre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Correspondance, Fata Morgana

Lettre à René Char sur les incompatibilités de l’écrivain, Georges Bataille, septembre 2019, 48 pages, 12 € Edition: Fata Morgana

 

Cette lettre permet de comprendre la relation qui n’allait pas forcément d’elle-même entre Bataille et Char. D’un côté l’obscur des profondeurs, de l’autre une certaine clarté du paysage et de ceux qui l’habitent. D’un côté l’existentialisme et l’absurde, de l’autre les remugles messianismes du surréalisme « historique ».

Certes les deux se réclamaient de ce dernier mais selon une version dissidente plus juste que celle de Breton embrigadé dans certaines ruses et cécités. Ce dernier espérait beaucoup en Char mais n’attendait rien de Bataille. Les deux derniers éprouvent une sympathie mutuelle au nom à la fois d’une perception analogue des contradictions les plus vives qui régissent le monde et l’univers, et par ailleurs d’une douloureuse conscience de l’irrémédiable.

Ozu-san, Jacques Sicard (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 30 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Z4 éditions

Ozu-san, septembre 2019, 107 pages, 11,50 € . Ecrivain(s): Jacques Sicard Edition: Z4 éditions

 

 

Ciné-lyrisme

Jacques Sicard intitule son essai, en partie consacré à Yasujirō Ozu (Tokyo, 1903-1963), Ozu-san san étant le plus neutre des suffixes honorifiques japonais, utilisé par exemple pour nommer les montagnes, les volcans, tel le Mont Fuji ou Fuji-san. Jacques Sicard est un critique de cinéma qui aborde les œuvres filmiques « en poète », en référence et en hommage à Pier Paolo Pasolini, par une écriture « ciné-lyrique », dont les textes se lisent comme des tableaux-poèmes, mouvants, fluctuant selon l’instant filmique. L’auteur fait arrêt sur image, décrypte la gestuelle des acteurs, le continuum des plans-séquences, les mouvements de caméra, etc., rapproche symboliquement plusieurs typologies du cinéma mondial, créant ainsi une exégèse lyrique du cinéma.

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir, Christian Jacob (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 28 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Les Belles Lettres

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir, Christian Jacob, 2018, 464 pages, 35 € Edition: Les Belles Lettres

 

Des Mondes lettrés aux Lieux de savoir appartient à une catégorie d’ouvrages plus répandue, semble-t-il, dans le monde anglo-saxon qu’en France : le recueil de travaux publié par un savant, coup d’œil rétrospectif jeté à une carrière, dont on peut ainsi (ou non) apprécier la cohérence, les palinodies, les repentirs.

Personne ne trouve extraordinaire de pouvoir lire, dans une savante édition critique du texte original ou dans une simple traduction en livre de poche, les dialogues de Platon, le poème de Lucrèce, les tragédies de Sophocle. Ces œuvres nous enchantent et en ont inspiré bien d’autres. Mais nous oublions que nous n’en disposons que grâce à un improbable concours de circonstances. Derrière chaque page ancienne que nous pouvons lire, il y a le double miracle de sa conservation et de sa transmission. De même que le nombre des êtres humains morts dépasse de loin celui des vivants, la quantité d’œuvres perdues sans retour dépasse celle des œuvres que nous avons conservées. Et même si cela semble difficile à croire, il est tout à fait possible (bien qu’indémontrable) qu’en qualité, ces œuvres disparues aient été supérieures à celles qui nous sont parvenues.