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Essais

Touaregs L’exil pour patrie, Intagrist el Ansari (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 08 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Maghreb, Histoire

Touaregs L’exil pour patrie, Editions Alfabarre, 2018, 200 pages, 25 € . Ecrivain(s): Intagrist el Ansari

 

Auteur de l’itinéraire poétique Echo saharien L’inconsolable nostalgie, Intagrist el Ansari est aussi journaliste et historien. C’est à ce titre qu’il a compilé sous le titre Touaregs L’exil pour patrie une sélection d’articles de presse et d’analyses géopolitiques et sociologiques qu’il a publiés dans divers magazines sur la situation de belligérance perpétuelle dans laquelle vivent les diverses populations du Sahel, et particulièrement les Touaregs du nord du Mali, depuis 2012. Cette somme est à la fois un ouvrage pédagogique et l’expression d’une révolte. Ouvrage pédagogique efficace par la redondance et la précision des éléments factuels de texte en texte et par la possibilité offerte au lecteur de suivre quasiment de mois en mois l’évolution des événements contemporains dans cette partie agitée du monde sahélien.

Ouvrage pédagogique nécessaire à qui veut tenter de démêler l’écheveau a priori inextricable des groupes armés et des forces politiques locales et externes impliqués dans l’histoire récente de ce vaste espace quasi-désertique englobant la moitié nord du Mali et les régions périphériques.

La science sociale comme vision du monde, Wiktor Stoczkowski (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 07 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

La science sociale comme vision du monde, septembre 2019, 640 pages, 26 € . Ecrivain(s): Wiktor Stoczkowski Edition: Gallimard

 

L’anthropologue Wiktor Stoczkowski prouve dans un essai déstabilisant combien Durkheim est le symptôme d’une pensée qui – sous couvert de rationalisme – en devient le contraire. Pour autant, l’auteur de ce brillant essai ne met pas en pièce la pensée de cet « Emile » (très peu rousseauiste) mais uniquement sa manière de forger une idéologie particulière. Elle se fonde contre William James. Leurs deux systèmes ont fondé deux visions opposées de la société. Chez Durkheim, elle devient « neurasthénique proposée par un neurasthénique » Wiktor Stoczkowski, qui par delà le cas précis de l’inventeur de la sociologie offre un point précis sur les sciences sociales naissantes et leurs explications. Elles créent des sortes de théories laïques de salut qui prendront – hélas – toutes leurs forces au XXème siècle en remplaçant Dieu par l’homme rouge ou brun…

Dictionnaire amoureux de l’Ovalie, Daniel Herrero (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 04 Octobre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Plon

Dictionnaire amoureux de l’Ovalie, août 2019, 592 pages, 25 € . Ecrivain(s): Daniel Herrero Edition: Plon

 

« Blanco inventa des trajectoires loufoques qu’il rendit lumineuses sans effort apparent, créa des figures originales comme autant de pieds de nez aux règles du rugby classique et sema le danger aux quatre coins du terrain. Son jeu aux formes inimitables lui valut tous les honneurs et les surnoms les plus flatteurs. Blanco le magicien, l’artiste, le funambule… » Serge Blanco.

Le Dictionnaire amoureux de l’Ovalie ne pouvait être imaginé et écrit que par un troubadour de la langue, un détrousseur de mots, un sudiste, un flibustier des pelouses toulonnaises, un pirate méditerranéen des vestiaires, un jongleur des métaphores et des coups de gueule. Daniel Herrero n’en est pas à son premier essai, la Passion ovale qui l’enflammait sur les terrains et dans les vestiaires, cet Esprit du jeu, où le savoir n’a rien perdu de sa saveur originelle, s’est mué en passion littéraire, et il sait comme d’aucuns faire voler ses phrases comme un ballon, les faire swinguer, leur offrir de réjouissantes métaphores. Daniel Herrero sait tout de ce jeu solaire et terrien, de ce ballon aux rebonds aléatoires, des corps et des cœurs qui chantent.

Ménécée, Le voluptueux inquiet : Réponse à Epicure, Frédéric Schiffter (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mardi, 24 Septembre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Louise Bottu

Ménécée, Le voluptueux inquiet : Réponse à Epicure, juin 2019, 46 pages, 8 € . Ecrivain(s): Frédéric Schiffter Edition: Editions Louise Bottu

 

« Prends l’habitude de penser que la mort n’est rien pour nous. Car tout bien et tout mal résident dans la sensation : or la mort est privation de toute sensibilité. Par conséquent, la connaissance de cette vérité, à savoir que la mort n’est rien pour nous, nous rend capables de jouir de cette vie mortelle, non pas en y ajoutant la perspective d’une durée infinie, mais en nous enlevant le désir de l’immortalité », Epicure, Lettre à Ménécée, traduction de Octave Hamelin revue par Frédéric Schiffter.

« Quand tu écris cela, je me demande si tu le penses vraiment tant la réalité est tout autre. C’est nous qui ne sommes rien pour la mort car même notre corps une fois sous terre ne s’appellera plus cadavre. Il deviendra un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue. C’est parce que nous savons que la mort nous anéantira un jour tandis que nous nous laissons aux séductions de la vie, qu’elle nous obsède tant. Nous la voyons œuvrer sans relâche en temps de guerre comme en temps de paix », Ménécée à Epicure, traduction de Frédéric Schiffter.

De la santé des gens de lettres, Samuel-Auguste Tissot (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 23 Septembre 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire, Classiques Garnier

De la santé des gens de lettres, avril 2018, 212 pages, 24 € . Ecrivain(s): Samuel-Auguste Tissot Edition: Classiques Garnier

Le traité du médecin suisse Samuel-Auguste Tissot (1728-1797) constitue, dans le meilleur sens du terme, une curiosité littéraire. Il n’est pas de ces œuvres médiocres que l’on arrache à leur sommeil séculaire dans les bibliothèques où elles eussent mieux fait de rester. De la Santé des gens de lettres connut plusieurs rééditions au XVIIIe siècle, une traduction en anglais (1762), quatre réimpressions aux XIXe et XXe siècles. L’ouvrage est représentatif d’un triple mouvement. D’abord, la vulgarisation du discours médical par le recours à la langue française, prolongeant ce qu’avait accompli Ambroise Paré : si les médecins, pour conquérir leurs grades, soutenaient toujours leurs thèses en latin, ils diffusaient ensuite leurs idées dans des ouvrages français, qui rejoignaient les bibliothèques des non-spécialistes (« Pas de livres que je lise plus volontiers, que les livres de médecine, pas d’hommes dont la conversation soit plus intéressante pour moi, que celle des médecins ; mais c’est quand je me porte bien », écrivait non sans humour Diderot, cité p.42). Tissot avait dans un premier temps publié un Sermo academicus de valetudine litteratorum (1766), qu’il traduisit et amplifia. Ensuite, le livre de Tissot apparaît représentatif de l’avènement d’une nouvelle cléricature, les « gens de lettres » laïcs (qu’on n’appelait pas encore les « intellectuels ») doublant d’abord, puis remplaçant l’ancienne, les religieux lettrés.