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Les Chroniques

La smart city entre autogestion citoyenne et manipulation technocratique (par Mustapha Saha)

Ecrit par Mustapha Saha , le Jeudi, 12 Septembre 2019. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

Théoriquement la smart city est une cité régie par les technologies de l’information et de la communication (TIC), qui collectent des données pour optimiser la gestion des ressources, les centrales électriques, les approvisionnements d’eau, et maximaliser les services urbains, les systèmes d’information et de signalisation, les équipements collectifs, les transports… Les agents administratifs interagissent directement avec les infrastructures en surveillant leurs performances et leur bon fonctionnement. Se combinent les infrastructures et les superstructures, la gouvernance algorithmique et l’initiative humaine, l’autorégulation machinique et l’objectivation des perspectives.

La mutation numérique s’avère encore une fois à double tranchant. Se dessinent deux options incompatibles, l’autogestion citoyenne de la vie urbaine ou sa mise sous contrôle technocratique. Le néolibéralisme tente de caractériser la smart city par ses performances dans un système de concurrence générale où les fabricants entretiennent la surenchère gadgétaire, où les nouveaux modèles d’instrumentation électronique mis sur le marché obsolétisent le précédents.

À travers les grandes plaines, Sarah Raymond Herndon (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mercredi, 11 Septembre 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

À travers les grandes plaines, Sarah Raymond Herndon, Payot, avril 2019, trad. Hélène Hinfray, 224 pages, 19 €

 

Itinéraire d’une jeune fille du Missouri

En tout premier lieu, l’exil, l’exode, la recherche du bonheur, la foi, accompagnent le grand voyage sans retour de la jeune Sarah Raymond Herndon – étant son nom d’épouse, née en 1840, décédée en 1914. À travers les grandes plaines est le récit de l’origine des peuplements, d’un périple, depuis Memphis (petite ville du Missouri) jusqu’à Virginia City dans le Montana, une traversée de l’Ouest des États-Unis d’Amérique, que qualifie ainsi l’auteure : « parce que c’est très amusant de traverser le continent ! C’est comme pique-niquer tous les jours pendant des mois ». Sarah Raymond tient un carnet intime où elle relate la vie des pionniers partis en chariots bâchés. Elle y consigne les changements imprévus de la nouvelle condition d’émigrantes « habituées à avoir des domestiques (…) ». Ces femmes et ces jeunes filles élevées de manière douillette, à l’abri du besoin, relativement éduquées, abandonnent leur confort pour la précarité du nomadisme.

Cicatrice de l’Avant-jour, Lydia Padellec (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mardi, 10 Septembre 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Cicatrice de l’Avant-jour, Lydia Padellec, Al Manar Editions, mai 2018, Gravures Marie Alloy, 75 pages, 17 €

 

La sobriété de la poésie de Lydia Padellec coule au fil limpide des pages comme une source vive, discrète et profonde, charriant dans son lit silencieux le cri de sa douleur. Sa profondeur est celle des eaux souterraines et de résurgence, en résonance avec notre traversée spontanément laborieuse du vécu et de la rencontre difficile avec ses abîmes, son flux opiniâtre à poursuivre sa route malgré le cours parfois obstrué de barrages, obstacles, effondrements, béances (« sur le chemin semé / de ronces et de doutes »). Cours quelquefois interrompu par l’ouverture d’une brèche – surgissement d’un événement tragique – nous laissant abandonné au bord du chemin, sur le bord du vide entre vertige et anéantissement, avec nos blessures, nos plaies, une Cicatrice de l’Avant-jour. Le titre de l’opus évoque le bouleversement provoqué par les événements tragiques de novembre 2015 à Paris ; ses poèmes au cœur de l’humain transcrivent le traumatisme : Dans la nuit profonde du jour, pour la première partie, avant le Chant de la dernière nuit (II), puis le trauma proprement dit, Cicatrice de l’Avant-jour (III), suivis de Nuit de sang (IV) et de La brûlure des cendres (V).

Blancs, Brigitte Mugel ; Je te massacrerai mon cœur, Philippe Thireau (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 09 Septembre 2019. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Blancs, Brigitte Mugel ; Je te massacrerai mon cœur, Philippe Thireau ; éditions PhB, 2019, 10 €

 

J’ai hésité à intituler cette présentation succincte de deux livres que publient les éditions PhB récemment, en questionnant la douleur d’être, qui, me semble-t-il, est inhérente à la personnalité d’un poète. J’ai fini par rassembler mes idées sous l’égide de la fondation, ce qui revenait à dire l’objet réel de mon sentiment. Car c’est bel et bien ce que je retiens des deux lectures des poèmes de Brigitte Mugel et de Philippe Thireau : quelles sont les fondations d’un poète ?

Je me pencherai tout d’abord sur Blancs, livre qui débute sur une série de poèmes qui utilisent le substantif : tête. Donc l’endroit où siège l’intellect, et aussi où habite l’âme, en tous cas, l’esprit de la poétesse. Est-ce conscience de la mort ? est-ce le siège de l’amour ? est-ce une description du corps ? Toutes ces notions se mélangent pour aboutir à ce mot qui revient essentiellement au début du recueil : la tête. Et peut-être est-ce cela qui permet de rentrer dans la matière du poème, rentrer par la tête donc par la partie anatomique qui assure techniquement la possibilité de la lecture.

La trompette philosophique de Boris Vian (par Mustapha Saha)

Ecrit par Mustapha Saha , le Vendredi, 06 Septembre 2019. , dans Les Chroniques, Chroniques régulières, La Une CED

 

 

Il y a soixante ans, le 23 juin 1959, Boris Vian est terrassé par une crise cardiaque dans le cinéma Le Marbeuf des Champs-Elysées. « Le Satrape Transcendant » meurt de colère contre la falsification de son livre J’irai cracher sur vos tombes par d’affreux surintendants.

Librairie de Cluny, à proximité de la Sorbonne. Je déniche des volumes anciens de Boris Vian aux éditions Jean-Jacques Pauvert. Belle opportunité de relecture à l’occasion du cinquantenaire de Mai 68, hanté par le fantôme de l’écrivain maudit, lanciné par le vaticinateur précoce de la révolution ludique. L’amour se dit avec des pavés et s’immortalise dans les slogans pyrogravés. La correspondance baudelairienne abolit l’écart temporel dans la sentence einsteinienne. Laissons les commémorations pompeuses et les consécrations trompeuses aux autres. Un bouquet d’étincelles nous suffit.