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Chroniques régulières

Chronique anachronique, par Kamel Daoud

Ecrit par Kamel Daoud , le Mardi, 01 Septembre 2015. , dans Chroniques régulières, Les Chroniques, La Une CED

 

Jour huit. La fin du monde est un appel à la prière. Le soleil est une routine. Il fait chaud dans la tête qui sert d’encrier à des palmiers. Une route passe, long bras jeté sur une colline. Un homme vend des fruits avec des yeux de mort. Une femme se hâte parce que les yeux ont des dents et la rue est un traquenard unijambiste. Que faire ? Tuer le temps. Une étrange illusion.

Le temps est un animal sourd et muet qui a la peau du monde, pas une ride et des chiffres en zébrure comme un tigre mou qui mange des levers de soleils pour se nourrir. Il s’allonge ou se rétrécit. Il est blanc avec des côtes d’ivoire. Il est. Et on glisse dedans.

Dans le mythe, le temps est la baleine qui a accouché du monde. Des milliards marchent en rond dans son vaste poumon et élèvent des stèles et célèbrent des feux et des cultures. A peine si les mystiques soupçonnent un océan en collant l’oreille au larynx du poisson. Le temps ne peut pas être tué, il s’enroule, s’enroule puis se détend comme un geyser et s’affaisse comme un épiderme qui n’a pas choisi un règne. Il est le centième nom d’Allah, prononcé dans un tic-tac ample. Il est l’horloge mais aussi la gare, la lettre pliée, la ride qui sert d’horizon au décompte, l’usure et la solution. Il est l’angoisse.

Un poète qui édite des poètes : à propos des éditions Le Phare du Cousseix

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 31 Août 2015. , dans Chroniques régulières, Les Chroniques, La Une CED

 

A la porte, Jean-Claude Leroy, 2014

Llanover-Blaenavon, Ludovic Degroote, 2014

Le Récit est une voix timide, Marie-Paule Blein, 2015

L’Art d’être tigre, Ana Luisa Amaral, 2015

 

Connaître personnellement l’éditeur qui se cache derrière la maison d’éditions Le Phare du Cousseix, installé en Creuse, facilite et en même temps rend difficile la relation à moitié exhaustive que je me propose de faire lire ici. Car même si Julien Bosc connaît depuis plusieurs décennies ce pays limousin, et que son travail de poète le précède, je n’ai pu le rencontrer qu’au détour de la lecture de son travail d’éditeur, et je lui en suis reconnaissant pour la vraie confiance qu’il a su installer entre nous au sujet de ses livres. D’où cette difficulté de ne pas trahir mon sentiment objectif.

Paul Micio, Les Collections de Monsieur, frère de Louis XIV

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 28 Août 2015. , dans Chroniques régulières, Les Chroniques, La Une CED

 

Paul Micio, Les Collections de Monsieur, frère de Louis XIV, Orfèvrerie et objets d’art des Orléans sous l’Ancien Régime, Somogy éditions d’art, 2014, 360 pages, 24 x 32 cm, 59,00 €

 

Voici – et c’est heureux – la première étude approfondie existant sur les collections de Monsieur, frère du roi Louis XIV, et sur celles de sa famille, collections qui sont assurément les plus marquantes et les plus variées de l’Ancien Régime, hormis, bien sûr, celles de la Couronne.

La famille d’Orléans a apporté son concours à la réalisation de ce magnifique ouvrage, ayant permis à Paul Micio l’accès à ses archives privées. Micio a consacré plus de dix années de recherches à ces archives, consultant inventaires après décès, journaux, correspondances, factures, comptes…, l’esprit devenu flamme réchauffant d’un chaud halo, et invisiblement y déposant son voile, et fervemment y déposant son trouble, les verres superposés d’une lanterne (arrachée à quelque lieu profondément enfoui dans les Mille et une nuits) : celle du corps ainsi rendu transparent par la passion qui l’a comme resculpté, et en a changé la matière (pouvoir de la passion), – et cela a conduit Micio en France, en Espagne, en Angleterre.

Carnets d’un fou – XXX, par Michel Host

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 27 Août 2015. , dans Chroniques régulières, Les Chroniques, La Une CED

 

Juillet 2015

 

D’un voleur : – Nous étions amis. Il me connaissait comme ma poche.

Jules Renard, Journal, 1903

 

On vient de me voler. – Que je plains ton malheur !

– Tous mes vers manuscrits ! – Que je plains le voleur !

Le Brun-Pindare (1729-1807), Dialogue entre un pauvre poète et l’auteur

A propos de Dans l’œil du dragon, Jean-Claude Walter

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 25 Août 2015. , dans Chroniques régulières, Les Chroniques, La Une CED

Dans l’œil du dragon, Jean-Claude Walter, Arfuyen, juin 2015, 128 pages, 13 €

Enfance, pays, poésie

Je voudrais remercier avant toute chose Gérard Pfister de m’avoir fait connaître la littérature de Jean-Claude Walter, car j’ai aimé me retrouver dans les textes de la maturité d’un écrivain qui réfléchit depuis très longtemps à ce qui doit rester, doit se quintessencier. Donc cet âge de l’écrivain qui se resserre sur des phénomènes simples, sur des thèmes comme l’enfance, le pays – sans doute l’Alsace – ou la poésie. Cette simplicité n’est pas à mon sens un handicap, mais une forme de vérité sur les choses, et l’intérêt pour ces thèmes très restreints, simplicité apparente bien sûr car les sujets sont difficiles, n’a pas cessé de me captiver tout au long de ces courts textes de prose que réunit l’ouvrage.

Mais citons :

Je chante un lieu réel et imaginaire qui allume ses lumières, l’espérance, et notre liberté. Avec le concours de quelques porte-parole… L’abeille bleue et son nectar. Le vieux bourrin complice. Les chuchotis des sapins. Le soleil pisteur… L’école première et ses « leçons de choses », la lèvre inaccessible de la maîtresse… La carrière de granit d’où extraire tous ces mots. La requête de ce qui bouge, fulmine, et nous enivre de sa beauté… Comète du silence. Sainte chimère.