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Pays de l'Est

Sur les ossements des morts, Olga Tokarczuk

Ecrit par Anne Morin , le Samedi, 17 Novembre 2012. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Sur les ossements des morts, traduit du polonais par Margot Carlier, Noir sur Blanc, 299 pages, 22 € . Ecrivain(s): Olga Tokarczuk

 

Conjonction adversive, conjonction des contraires, dans cette histoire, attirance et répulsion agitent les personnages. Janina Doucheyko, la narratrice, ingénieur en retraite, donne un cours d’anglais par semaine à la petite école du village en contrebas, dans ce coin glacé de montagne dans les Sudètes. Les personnages autour d’elle vont recevoir un surnom ou un prénom inventé qui devient, à ses yeux, leur véritable identité : Grand Pied dont la mort va servir à la fois de déclic et de révélateur, Matoga, son voisin immédiat, et aussi Dyzio, ancien élève qu’elle aide à traduire Blake, Bonne Nouvelle, la jeune mandchoue du dépôt-vente de vêtements, qui vont graviter autour d’elle comme de petites planètes.

Que se passe-t-il dans l’espace, dans le monde céleste, qui n’ait pas son pareil dans ce monde-ci ? Quelles influences agissent sur nos humeurs ? Et notre « arbitre » est-il si libre que cela ? Sommes-nous maîtres absolus de nos actions et de nos réactions – au sens à la fois chimique et épidermique ?

Marche forcée, oeuvres, 1930-1944, Miklós Radnóti

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 10 Novembre 2012. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Poésie, Récits, Phébus

Marche forcée, Œuvres, 1930-1944, trad.hongrois et présentation par Jean-Luc Moreau, Editions Phébus, Collection D’aujourd’hui. Étranger, 2000 . Ecrivain(s): Miklós Radnóti Edition: Phébus

 

« La mort, de notre attente, est la rose vermeille ».

Il était une fois un jeune homme qui marchait vers le nord. Il ne mangeait ni ne buvait. Il ne toucha pas au pain que lui jeta un boulanger. Il ne put y toucher. On cassait les bras qui se tendaient. Il était une fois un homme plein d’espoir qui avait pour compagnons de voyage des hommes qui étaient abattus parce qu’ils étaient pieds nus ou parce qu’ils avaient gardé leurs chaussures. Il était une fois un homme qui voulut malgré tout continuer. Il ne pouvait ni manger, ni boire. Ce qui retint son attention, un soir de magnifique coucher de soleil, ce fut un peu de maïs séché, qui était éparpillé sur le sol, et qui l’appelait. Sans manger ni boire. Le cochon qu’il vit au loin voulut bien lui laisser un peu de son modeste repas (bouillie de maïs). Il était une fois un homme qui marchait en direction du nord. Il vit son ami musicien (qui n’avait guère plus de vingt printemps dans ses chaussures – il les avait gardées –) recevoir une balle dans la nuque parce qu’il ne voulait pas se défaire de son violon (dont il se servait pour vivre). Il le vit se relever, marcher en boitant vers un arbre, et s’écrouler, obéissant au chant d’une mitraillette, lequel avait immédiatement suivi ces aboiements : Der springt noch auf (Il remue encore).

La guerre des salamandres, Karel Capek

Ecrit par Yann Suty , le Lundi, 09 Juillet 2012. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Recensions, Science-fiction, La Une Livres, Roman, La Baconnière

La Guerre des salamandres, 1936, mai 2012, trad. du tchèque Claudia Ancelot, 316 p. 18 € . Ecrivain(s): Karel Čapek Edition: La Baconnière

 

La lecture de ce livre terminé, on se met aussitôt à douter. A-t-il vraiment été édité en 1936 ? N’est-ce pas un « coup » marketing quelconque ? On pense au livre d’Antoine Bello, Les falsificateurs, en se demandant si cette réédition est une vraie réédition, si le livre n’a pas pu être écrit ces derniers temps et pas il y a 80 ans tant il semble si moderne dans son propos et dans sa forme, en plus de faire preuve de certains talents visionnaires…

En tout cas, les Editions La Baconnière ont l’excellente idée de rééditer, en collaboration avec Ibolya Virag, La guerre des Salamandres de l’auteur tchèque Karel Capek. Précurseur de la science-fiction, il est notamment l’inventeur du mot « robot ». Il avait même été l’un des favoris pour le Prix Nobel dans les années 34-35, mais il avait été mis hors course pour ne pas froisser Hitler…

La Soeur, Sándor Márai

Ecrit par Yann Suty , le Samedi, 19 Novembre 2011. , dans Pays de l'Est, Les Livres, Recensions, Critiques, La Une Livres, Roman, Albin Michel

La sœur (A Nover), traduit du hongrois par Catherine Fay, 310 p. 20 € (1946) . Ecrivain(s): Sandor Marai Edition: Albin Michel


La sœur est un modèle de construction, un Psychose avant l’heure en termes de mécanique. Où le héros n’est pas forcément celui que l’on croit. Tout du moins, celui que l’on suit pendant toute la première partie du livre disparaît tout à coup. Il laisse la place à l’un des personnages secondaires et un nouveau livre commence. Comme si La sœur était composé de deux livres en un seul, deux longues nouvelles qui se chevauchent et qui se répondent. Ou plutôt où la deuxième mange littéralement la première.

C’est le quatrième Noël de la seconde guerre mondiale et le narrateur, un écrivain, est parti passer quelques jours dans une auberge, située au sommet d’une montagne de Transylvanie. Bientôt, le temps se détraque, il se « calque sur la guerre ». Tous les occupants de l’auberge se retrouvent acculés dans l’auberge, pris au piège, comme mis « en quarantaine ». Car le lieu n’est plus franchement hospitalier. Il est humide et il sent le graillon. Pour ne rien arranger, le narrateur se retrouve en compagnie de gens avec lesquels il n’a pas envie d’échanger plus de trois mots. Sauf un : Z. Grand musicien, il est devenu « l’ombre de l’être triomphant et légendaire » qu’il a été.