Identification

Maghreb

L’Âne mort, Chawki Amari

, le Jeudi, 26 Février 2015. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Barzakh (Alger)

L’Âne mort, novembre 2014, 180 pages, 13 € . Ecrivain(s): Chawki Amari Edition: Barzakh (Alger)

 

L’insoutenable légèreté de l’âne

Le journaliste, chroniqueur et écrivain algérien Chawki Amari signe avec L’Âne mort un roman de la maturité, permettant à son talent d’humoriste souvent noir de se déployer avec un mélange de dérision et de profondeur particulièrement intéressant. En revendiquant comme source l’Ane d’Or d’Apulée, désigné comme premier écrivain algérien de l’histoire, il place d’emblée son récit sous l’égide du grotesque et de la magie, de la sensualité et de la métaphysique, de la fantaisie échevelée et de la noirceur d’une analyse souvent critique du monde. C’est en effet par strates successives que se révèlent les sens de cette histoire rocambolesque, à travers les pérégrinations de trois jeunes gens et d’un âne, d’Alger aux montagnes de la Kabylie et retour. La formation de géologue de Chawki Amari donne en effet à ce récit l’allure d’une réflexion sur les lieux et le temps, sur la surface et les profondeurs enfouies, sur la présence au monde de l’animal humain qui le peuple, son insignifiance à l’échelle des temps géologiques et sa volonté d’exister et de donner sens à ses quelques décennies à passer sur terre.

Le miel de la sieste, Amin Zaoui

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 06 Janvier 2015. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Contes, Barzakh (Alger)

Le miel de la sieste, octobre 2014, 197 pages . Ecrivain(s): Amin Zaoui Edition: Barzakh (Alger)

 

Gamin de l’Algérie d’après l’Indépendance, qui a mûri dans l’Algérie actuelle, avec des crochets ailleurs, comme il se doit pour tout Algérien, celui qui dit « je » se raconte, ou se berce par quelques mots qui reviennent, comme un refrain : « mais pourquoi est-ce que je reviens dans ce village des mouches bleues ? pourquoi est-ce qu’on serre celui qu’on aime contre sa poitrine ? ; mais pourquoi racontai-je tout cela à Ghita ? ». Sans oublier ce pile, je mens, face, je raconte la vérité, donc, face, qui émaille les pages. Ne pas omettre, par ailleurs, l’essentiel : on le nomme, le petit, « Bouqlaoui », l’enfant aux testicules, parce qu’il se les tripote tous les jours qu’Allah fait, et il a du mal avec les miroirs ; il a de grandes oreilles, et on l’appelle aussi l’âne. Il grandit, le môme, mais c’est difficile : il y a le père, l’oncle « écoute, petit morveux… », l’école militaire, le quotidien algérien qui bringuebale. Le sillon se fait chaotique, quand ce n’est douloureux : l’identité, la place dans la famille, les filles, les femmes, l’amour. Et puis, les rêves et quelques cauchemars en HP. Le ciel – celui, unique d’Algérie ; odeurs et saveurs en sus, et celui de par chez nous – Europe-miroirs aux alouettes, et gris labellisé avec accent belge…

Chems Palace, Ali Bécheur

Ecrit par Theo Ananissoh , le Samedi, 13 Septembre 2014. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Elyzad

Chems Palace, avril 2014, 263 pages, 19,90 € . Ecrivain(s): Ali Bécheur Edition: Elyzad

 

Chems Palace tient à la fois du conte féerique, des rêveries d’un solitaire érudit et du récit allégorique. La féerie s’opère en plein Paris, transformant un va-nu-pieds de Djerba en un magnat de l’hôtellerie. Un roman dans le roman ; le tout raconté depuis une oasis, au Pays des Palmes ; et cette oasis, sans doute, n’est pas qu’une… oasis.

Le narrateur, c’est al-moâllem – l’instituteur. Il est à la retraite. C’est ici, dans cette oasis qu’il a débuté sa carrière. Puis il a été ballotté au gré des affectations, passant d’un village perdu à une banlieue grise de Tunis.

« L’heure de la retraite ayant, bon an mal an, sonné (…), recru de la fureur des villes, j’étais en quête d’un lieu où, sans hâte mais sans appréhension, attendre le générique de fin d’un film qui, somme toute, ne m’avait pas semblé palpitant ».

Où se poser enfin, lui qui est sans véritables attaches familiales ?

Tassadit, la petite potière et Tassadit, la petite bijoutière, Sadia Tabti

Ecrit par Nadia Agsous , le Samedi, 07 Juin 2014. , dans Maghreb, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Jeunesse

. Ecrivain(s): Sadia Tabti

Tassadit, la petite potière, Sadia Tabti, éditions Dalimen, Collection Les Carnets de l’ArtMémoire, Alger, 2013, 42 pages

Tassadit, la petite bijoutière, Sadia Tabti, éditions Dalimen, Collection Les Carnets de l’ArtMémoire, Alger, 2014, 64 pages

 

Deux contes des temps modernes…


Tassadit, la petite potière, et Tassadit, la petite bijoutière sont deux récits, courts, en prose et illustrés, que l’on pourrait aisément ranger dans le registre des « contes ». Imaginés, écrits, illustrés par Sadia Tabti et publiés par les éditions Dalimen, dans la collection Les Carnets de l’Artmémoire, ces contes « des temps modernes » situent l’action des protagonistes, la petite Tassadit et les personnages qui gravitent autour d’elle, dans une double temporalité : à la fois au présent et au passé. Le recours à ce dernier est élaboré par le truchement de la mémoire et de l’Histoire.

Une longue nuit d'absence, Yahia Belaskri

Ecrit par Theo Ananissoh , le Vendredi, 13 Septembre 2013. , dans Maghreb, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Vents d'ailleurs

Une longue nuit d’absence, mars 2012, 158 pages, 15,20 euros . Ecrivain(s): Yahia Belaskri Edition: Vents d'ailleurs

 

C’est un roman pour ainsi dire plein d’Histoire(s), c’est-à-dire d’idéaux, de larmes, de sang, de douleurs, d’exils et de volonté humaine. Un roman en va-et-vient entre les deux rives de la Méditerranée, et entre deux guerres civiles, celle d’Espagne et celle d’Algérie.

Yahia Belaskri, ambitieux, empoigne trois ou quatre décennies de feu, retrace la vie de populations entières, et éclaire avec une belle maîtrise de son sujet deux conflits majeurs dont le fond commun est la quête de justice et de liberté.

Francisco, dit Paquito, puis Paco, est né en Andalousie autour de 1920 ; il mourra en 2006. Entre ces deux dates, que de choses ! Un engagement à l’âge de seize ans dans les rangs des républicains qui combattent Franco (un… enfant-soldat), la clandestinité quasi permanente, le déchirement d’une vie familiale impossible, la défaite et l’exil dans l’Algérie française, la suspicion des autorités (il est militant du Parti communiste espagnol), les camps d’internement, l’activisme et les incursions téméraires dans l’Espagne franquiste, puis, alors qu’il veut s’apaiser un peu dans le bonheur conjugal, une autre guerre, de décolonisation, où il est pris comme dans un étau par le FLN et l’OAS, l’indépendance sanglante, un autre exil, en France… métropolitaine.