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Les Livres

Béton armé, Philippe Rahmy

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 22 Août 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Récits, La Table Ronde

Béton armé, septembre 2013, 208 pages . Ecrivain(s): Philippe Rahmy Edition: La Table Ronde

 

Ce qui frappe tout de suite et fascine, à la lecture du livre de Philippe Rahmy, Béton armé, c’est la force de vie et de mort qui parcourt le texte. Vivre, mourir, survivre et voyager, toujours au bord, d’une rive à l’autre. Entre souvenirs, plongée intérieure, exploration extérieure, le voyage au cœur de la ville devient un voyage au centre de soi-même dans des descentes infernales.

L’écrivain, atteint de la maladie des os de verre n’a jamais voyagé, « Je suis né sans espoir de guérison ». Il a accepté pourtant une invitation pour une résidence d’écriture à Shanghai, et c’est une véritable aventure qui nous attend, et qui l’attend, d’autant que dans son cas, « voyager aussi loin [lui] donne un aperçu de ce que serait vivre toujours ».

Un voyage dans la ville et dans la vie, oui, un défi, la vie contre l’immobilisme, contre la mort. « [Le] voici à Shanghai, un grand vide dans une enveloppe de béton armé », un voyage dans une mégalopole, au centre de lui-même, au cœur même de l’écriture, « l’écriture, traduction du silence intérieur, la ville, affirmation bruyante du monde ». Car il s’agit bien de « voyager à travers le langage comme à travers le paysage ».

Les terres du couchant, Julien Gracq

Ecrit par Marc Michiels (Le Mot et la Chose) , le Vendredi, 21 Août 2015. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Récits, Editions José Corti

Les terres du couchant, octobre 2014, 264 pages, 19 € . Ecrivain(s): Julien Gracq Edition: Editions José Corti

 

Quelque part aux limites d’un Moyen-âge barbare,

le nôtre…

 

Les terres du couchant de Julien Gracq, récit philosophique de l’attente, ce roman géographique de l’inéducable silence, entrepris en 1953 et abandonné en 1956, se place, chronologiquement, entre Le Rivage des Syrtes et Un balcon en forêt.

Il y a des textes inachevés qui, par leur révélation au public de nombreuses années après leur écriture, se rêvent dans les limbes d’une allusion énigmatique, à un monde spatialement indéfini, comme le voyage d’une « jeune forêt » vers les plaines d’un nouvel horizon, d’un nouveau monde, comme un balancement entre rêve et Mythe, entre Histoire imaginaire et conscience du réel. Epris d’une liberté du sang des résistances passées, aux résistances présentes contre les barbares aux lames affutées, pour mettre à terre l’âme des condamnés.

En territoire Auriaba, Jérôme Lafargue

Ecrit par Cathy Garcia , le Vendredi, 21 Août 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Quidam Editeur

En territoire Auriaba, mars 2015, 196 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Jérôme Lafargue Edition: Quidam Editeur

« J’ai toujours pensé que ce monde ci est trop petit, ou plutôt que ce que l’on nous donne pour réalité ne constitue qu’une infime partie de l’infinité du monde ».

Il y a quelque chose de très séduisant dans ce roman qui oscille entre rêve et réalité, et où les rêveurs lucides permettent au rêve d’interagir avec le réel, pour lancer des passerelles au-dessus du temps. Des hommes, un enfant, un loup, une traque mystérieuse, des haines familiales ancestrales, des territoires réels et imaginaires, un passé ancien qui écrit des destinées qui nous ballotent des côtes marocaines au Charleville de Rimbaud en passant par le Honfleur de Allais et cette date récurrente, le 20 octobre 1854 et puis l’océan immense, ses vagues sur lesquelles on surfe en parfaite osmose avec une nature indomptée, extérieure comme intérieure.

C’est un roman difficile cependant à saisir, son rythme est déroutant, et c’est le genre de livre qu’il faudrait relire quand on arrive à la fin, pour rassembler le tout dans un ensemble plus palpable. Ainsi le roman semble être lui-même une sorte de rêve, l’a-t-on vraiment lu ? Un très bel imaginaire, un souffle puissant le parcourt, c’est organique, instinctif, les personnages y sont atypiques, en marge et dotés de solides personnalités. C’est aussi avec l’Histoire en filigrane, un regard critique concernant certains faits et attitudes, portant des fruits amers qui donnent encore des graines aujourd’hui.

Cinq filles sans importance, Robert Kolker

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 21 Août 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Récits, Belfond

Cinq filles sans importance, février 2015, trad. de l’américain par Samuel Sfez, 427 pages, 21,50 € . Ecrivain(s): Robert Kolker Edition: Belfond

 

Cet ouvrage est la relation d’’un minutieux, long et opiniâtre travail d’investigation mené par l’auteur, journaliste spécialisé dans les affaires criminelles, autour de la mystérieuse disparition de cinq jeunes filles, suivie, plus tard, trop tard, par la découverte de leurs cadavres, et d’un grand nombre d’autres non identifiés, sur le littoral de Long Island.

Une première grande partie du livre est consacrée à la reconstitution, par une collecte méthodique d’éléments biographiques auprès des familles, des amis et des fréquentations des victimes, du puzzle de leur trajectoire dans leur environnement social, familial, scolaire, amical, professionnel et globalement relationnel depuis leur naissance jusqu’au jour de leur disparition.

L’auteur cerne ainsi au plus près la personnalité et le statut social de chacune de ces jeunes femmes, permettant au lecteur de mettre à jour en même temps que lui un certain nombre de constantes, de points communs les concernant, et d’indices de nature à élucider les causes et les circonstances de leur fin tragique et d’émettre, au fil de l’enquête, des hypothèses sur la possibilité que les cinq crimes aient été commis par le même assassin, bien que la police dès le départ ait refusé d’envisager la question d’un tueur en série.

Casanova, Histoire de ma vie, en la Pléiade

Ecrit par Martine L. Petauton , le Jeudi, 20 Août 2015. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Biographie, La Pléiade Gallimard

Casanova, tomes 2 et 3, avril 2015, sous la direction de Gérard Lahouati et Marie-Françoise Luna, avec la collaboration de Furio Luccichenti et Helmut Watzlawick, 1299 pages . Ecrivain(s): Giacomo Casanova Edition: La Pléiade Gallimard

 

Histoire de ma vie, tomes 4 (1757-1760, Guerre de sept ans) à 10 (1770-1774, son retour à Venise). Deux forts volumes, suivant le premier, honorant l’esprit Pléiade – tout, organisé, éclairé ; plus quelques textes quasi inconnus émaillant ce qui peut légitimement prétendre au nom de somme, et servir à qui de droit. Edition établie d’après le manuscrit autographe. Quelque chose en cela, d’une découverte archéologique posée, incontestable et scientifique. Magnifique travail d’historiens et de chercheurs en littérature. Luminosité de lecture, facilité d’emploi, mais, aussi, plaisir immense de la découverte ou redécouverte d’écrits que chacun d’entre nous croit connaître !

Gérard Lahouati, Marie-Françoise Luna et leur équipe d’experts, tous patentés « Casanovistes », ont produit ces Pléiades avec ce qu’il fallait de rigueur, de précisions, de vérifications, de connaissances intimes de l’homme et son œuvre, et aussi d’amour, pour accompagner la folie – unique – d’une vie-voyage, vie-transgression, vie-dangers, et, bien sûr, vie-passion…