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Critiques

Chronique de la Grande Guerre, Maurice Barrès (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 08 Juillet 2024. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Histoire, Classiques Garnier

Chronique de la Grande Guerre, Maurice Barrès, Classiques Garnier, septembre 2023, édition : Denis Pernot, Vital Rambaud, 1040 pages, 48 € Edition: Classiques Garnier

 

Avant de présenter ce fort volume, il faut commencer par tresser une couronne de laurier aux deux éditeurs scientifiques, Denis Pernot et Vital Rambaud, qui ont accompli un travail admirable, un travail de Bénédictin, pour sélectionner, republier et surtout annoter ces textes de Barrès. L’apparat critique est minutieux et les notes, abondantes, identifient les références les plus obscures et les allusions aux personnages les plus oubliés.

Pendant les quatre années que dura la Première Guerre mondiale, Barrès, qui n’était pas un jeune homme (il avait 52 ans en 1914), donna chaque jour ou presque un article à L’Écho de Paris. Ce n’était même pas le vieux conseil de Pline l’Ancien, nulla dies sine linea, mais bien davantage. Cet ensemble impressionnant, ne serait-ce qu’au point de vue quantitatif, fut réuni après-guerre en quatorze volumes (1920-1924, réédition en 1931-1939), qu’il faut aller chercher chez les libraires d’ancien. Malraux admirait le travail fourni par son prédécesseur :

Dagon, Fred Chappell (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 04 Juillet 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, USA, Roman, Christian Bourgois

Dagon, Fred Chappell, éd. Christian Bourgois, 1968, trad. américain, Maurice-Edgar Coindreau, 282 pages Edition: Christian Bourgois

Les Philistins prirent l’arche de Dieu, et ils la transportèrent d’Ében Ézer à Ashdod. Après s’être emparés de l’arche de Dieu, les Philistins la firent entrer dans la maison de Dagon et la placèrent à côté de Dagon. Le lendemain, les Ashdodiens, qui s’étaient levés de bon matin, trouvèrent Dagon étendu la face contre terre, devant l’arche de l’Éternel. Ils prirent Dagon, et le remirent à sa place. Le lendemain encore, s’étant levés de bon matin, ils trouvèrent Dagon étendu la face contre terre, devant l’arche de l’Éternel ; la tête de Dagon et ses deux mains étaient abattues sur le seuil, et il ne lui restait que le tronc. C’est pourquoi jusqu’à ce jour, les prêtres de Dagon et tous ceux qui entrent dans la maison de Dagon à Ashdod ne marchent point sur le seuil.

La Bible, Premier livre de Samuel, chapitre 5, versets 1 à 5

 

Il arrive qu’un roman fasse peur. Dagon est la peur. De la première à la dernière ligne, ce roman suinte la peur comme une maladie fait la fièvre. Comme la peste fait des bubons. C’est organique, physique.

À chacun son dû, Leonardo Sciascia (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 03 Juillet 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard), Italie

À chacun son dû, Leonardo Sciascia, Folio, avril 2024, trad. italien Jacques de Pressac, revue et corrigée par Mario Fusco, 192 pages, 7,40 € . Ecrivain(s): Leonardo Sciascia Edition: Folio (Gallimard)

 

À chacun son dû présente d’emblée les caractéristiques, trompeuses on le verra, d’un roman policier : dès la première page, le pharmacien Manno reçoit une lettre anonyme l’avertissant de sa mort prochaine pour un motif tu qui fera l’objet de spéculations de la part de ses concitoyens, et, effectivement, il meurt quelques pages plus tard en compagnie du docteur Roscio lors d’une partie de chasse. Celui qui mène l’enquête, puisque les brigadiers progressent peu, très peu, est un professeur de lycée et critique littéraire occasionnel, ami de Roscio, Laurana. Mais très vite, Sciascia brouille le sens de son roman, se faisant même le critique du genre policier :

Un Temps de fête, Guillaume Decourt (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 02 Juillet 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, La Table Ronde

Un Temps de fête, Guillaume Decourt, La Table Ronde, septembre 2024, 92 pages, 14 € Edition: La Table Ronde

 

Récit

Il est singulier de parcourir une vie imaginée à l’aide d’un poème, fût-il en prose. Car c’est le récit qui porte le lecteur à chaque moment de chaque petit récit où le héros semble un autre lui-même. Ainsi, il faut bondir d’une histoire à l’autre. Contes imaginaires et profonds.

Nous n’avons pas d’enregistrement. J’ai retenu les écrevisses, les truites dans le trou des étoiles, le couvre-chef colonial, les soldats allemands dans les rues du Vieux-Nice, la nage libre dans la rade de Villefranche, le sanatorium, la chasse, la cabane dans les branches, le lièvre qu’on écorche lentement, le sang sur le torse des hommes, le sonnet de Heredia. Le timbre de la voix.

Chasse avec les fantômes, Éric Desordre, Jérôme Denoix (par Marie-Hélène Prouteau)

Ecrit par Marie-Hélène Prouteau , le Lundi, 01 Juillet 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Unicité

Chasse avec les fantômes, Éric Desordre, Jérôme Denoix, éditions Unicité, avril 2024, Préface Alain Duault, 64 pages, 47,50 € Edition: Unicité

Sous l’emprise du poète qui chasse avec les fantômes et nous emmène sur des jonques chargées d’épices, nous arpentons l’Afrique bleue et noire. La remontée d’un fleuve, quelque part du côté du fleuve Niger, se laisse découvrir ici selon une exploration imaginaire. Depuis si longtemps, l’Afrique fascine. Poètes et artistes chantent ses danses. Ses couleurs. Ses déserts. Ainsi Jérôme Denoix accompagne-t-il Éric Desordre pour ce long poème des lointains qu’il ponctue d’une trentaine de ses toiles.

Une création à quatre mains dans un compagnonnage artistique autour d’un ailleurs fascinant. Il faut saluer la facture de ce beau livre d’art, couverture pelliculée « grain de pierre », impression en quadrichromie. Il faut toucher la texture naturelle du papier bambou qui accueille les matériaux colorés du peintre. Il faut découvrir lentement les mots ciselés, toniques du poète. « L’homme sous son voile étouffé / Sur son dromadaire alambiqué / Rouge argent ruisselant / Chamarré de la bosse à la corne des pieds / Peinte de bleu ». Doubles moments d’un « chemin ardent », pour reprendre la formule percutante d’Alain Duault dans sa belle préface.