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Les Chroniques

La vie est une affaire personnelle, Valérie Fauchet (par Marjorie Rafécas-Poeydomenge)

Ecrit par Marjorie Rafécas-Poeydomenge , le Vendredi, 10 Mars 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

La vie est une affaire personnelle, Valérie Fauchet, Editions Ipanema, octobre 2022, 167 pages, 17 €

 

J’ai rencontré Valérie Fauchet grâce à La Cause Littéraire au moment de la sortie de son premier livre, Une voyante passe aux aveux, cet hymne aux rencontres. C’était précisément rue Saint Benoît dans le sixième arrondissement de Paris, tout près du 5 rue Saint-Benoît où Marguerite Duras résida jusqu’à sa mort. Les détails sont importants car Valérie loue une profonde admiration pour les grands écrivains de la même veine que Marguerite Duras. « Il reste toujours quelque chose de l’enfance, toujours… » (Marguerite Duras). L’enfance, ce parfum poétique qui irrigue toujours l’envie d’écrire et d’en découdre. D’en découdre de quoi exactement ? Personne ne sait, tel est le mystère de l’enfantement. Car écrire, c’est enfanter des personnages et encore des rencontres.

Dans le tournis de ces folles jolies rencontres, Valérie m’a confié la préface de La Cheville, le premier opus de la trilogie de La vie est une affaire personnelle. Roman dans lequel l’été est invincible, où les maisons peuvent être roses et noires, comme dans un défilé d’Yves Saint Laurent et où les parfums sont aussi puissants que le bleu Majorelle. J’ai été tout de suite séduite par cet effluve d’élégance.

Pourriture !, Philippe Lacoche (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 09 Mars 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Pourriture !, Philippe Lacoche, Éditions Les Soleils bleus, novembre 2022, 88 pages, 10 €

 

Il y avait eu L’Écharpe rouge, drame policier burlesque publié en 2014 par Le Castor Astral, interprété et mis en scène par le Théâtre de l’Alambic. Sélectionnée en différentes régions pour être produite à l’occasion de multiples manifestations événementielles comme des Festivals du théâtre, cette pièce nous avait fait rire et nous nous grattions la tête en nous disant : « mais oui… c’est ça… c’est tout à fait ça », comprenant que l’auteur mettait le doigt sur des choses sensibles de notre actualité pas tous les jours glorifiante, pas tous les jours reluisante. La réalité ne dépassait plus la fiction, mais c’est bien la fiction qui braquait un affolant projecteur sur les multi-facettes d’un réel dont nous sommes à nos dépens plus souvent les marionnettes que les acteurs. Un coup d’œil roboratif que braque derechef le romancier, journaliste et parolier, Philippe Lacoche, avec cette nouvelle pièce en trois actes, Pourriture !, dont une lecture théâtralisée a été présentée à La Comédie de Picardie à Amiens (direction Nicolas Auvray), le 6 avril 2022, sous la direction artistique de Jean-Michel Noirey (avec Le Théâtre du Monde Entier). Politiquement incorrecte, Pourriture ! nous interpelle comme nous avait interpelés L’Écharpe rouge et, sous les éclats de rire, incite à la réflexion…

Une longue route pour m’unir au chant français, François Cheng (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Mercredi, 08 Mars 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Albin Michel

Une longue route pour m’unir au chant français, François Cheng, Albin Michel, octobre 2022, 252 pages, 17,90€

Le « chant français » ne devrait rien avoir de spécial, puisque toute langue vivante chante, toute langue parlée se fait entendre d’elle-même et vit ainsi au contact de ses sons modulés. Quand on chante – même mal – on fait forcément entendre au-dehors, dans l’extériorité matérielle, quelque chose de la vie de son propre corps (comme une sorte de gargouillis articulé), on crache ou expulse quelque chose de la première personne d’une chair en propre : en ce sens tout chant est, par nature, lyrique ; mais chanter, c’est aussi, à l’inverse, faire résonner en l’intime de soi, dans le « for intérieur », quelque chose de la sonorité d’abord extérieure, publique, d’abord spatio-physique, d’une langue, c’est faire retentir en soi, dans son praticien et locuteur même, faire vibrer dans l’étroit, fragile et fatigable canal bucco-laryngé de quelqu’un, le « logos » à la fois abstrait, collectif et anonyme d’un idiome donné. Toute épopée est donc faite de chants, parce que même la geste d’exploits impersonnels et le cours socio-public magnifié d’une nation doivent entrer dans des morceaux « chantables », dans des séances délimitées de possible exécution de la célébration par le célébrant. Il faut que la gorge (qui les fait seule vivre) puisse suivre, et, comme disait Michaux à l’auteur au début des années 80 :

Carnets secrets du Boischaut, Catherine Dutigny (par Martine L. Petauton)

Ecrit par Martine L. Petauton , le Mardi, 07 Mars 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Carnets secrets du Boischaut, Catherine Dutigny, Maurice Nadeau éditions, mai 2022, 275 pages, 19 €


A n’en pas douter, Catherine Dutigny doit aimer les millefeuilles, ces gâteaux moelleux et craquants à la fois, tout en étages secrets beige-bruns, un peu difficiles à découper, mais quel régal au bout. Son livre n’a-t-il pas tout du gâteau : multiple et complexe agencement de « façons » de nous ouvrir son histoire. Façons, au sens noble de ce qu’en fait un architecte, et bien plus un savant maçon de la Creuse, si proche du Boischaut…

Selon le goût, on pourra se laisser aller à l’histoire folle des ensorcellements avec ou sans fumées, à la magie si présente (même encore aujourd’hui) dans ces campagnes ouvertes aux diableries – « la mare au diable » de George Sand est à deux pas ; brumes, forêts, haies secrètes protégeant un bocage à l’habitat émietté, tout concourt au surnaturel et les « sorciers » de l’Indre restent parmi les plus renommés.

Le mélange de l’eau, Ariel Spiegler (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 06 Mars 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

Le mélange de l’eau, Ariel Spiegler, éditions de Corlevour, février 2023, 96 pages, 15 €

 

Attachement/détachement

Après ma lecture d’hier et d’avant-hier du nouveau recueil d’Ariel Spiegler, j’ai trouvé le motif clé de son univers, ou plutôt ce qui vient affleurer çà et là sa prosodie, son style. Tout d’abord en considérant le détachement de chaque vers, au sens primaire, c’est-à-dire non lié au reste du poème dans sa destination globale, dans sa signification, car ces vers fonctionnent de façon autonome dans leur nudité détachée, esthétique, de la saccade, du bout, du fragment, du sème de sens. Mais aussi de l’attachement compris comme fusion des réalités de la langue et de la vie. Fusion de l’univers physique de la poète et correspondance des éléments linguistiques dans le poème lui-même pris jusqu’à son unité la plus petite. Cela fait donc musique, chaque note côtoyant une autre note d’un autre ton, de façon fuguée.