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Lui, Son Frère Céleste, par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous , le Lundi, 27 Février 2017. , dans Nouvelles, La Une CED, Ecriture

 

Deux mains fortes et vigoureuses me soulèvent par la mâchoire. Je vogue dans les cieux, au-dessus du lit du Grand Dieu. Je veux Le rencontrer, Lui parler, L’implorer, Lui demander sa bénédiction. Je traverse l’océan des nuages, confiant et heureux d’être là, dans les sphères célestes, parmi les anges de mon avenir. Une lumière vive éblouit ma vue. Sur le toit du Monde, un homme m’attend. Il me prend par la main. Il me conduit vers un endroit que lui seul connaît. Nous cheminons en silence. Je n’ai jamais été aussi heureux ! Je m’agrippe à lui ; je sers sa main, fort, très fort, si fort qu’il sursaute d’étonnement ; une surprise radieuse s’affiche sur son visage doux et resplendissant de beauté salutaire. Je veux faire un bout de chemin avec lui et redevenir Moi ! Je le connais cet homme. Je lui fais confiance. Cet être du mystère m’a donné la vie ; il me rendra le sourire ; il bercera mon envie de vivre et m’apprendra à avancer sur les chemins cahoteux de l’existence.

La lumière baisse ; l’obscurité se fait de plus en plus imposante. Cet homme illumine ma voie. Je marche sans peur, j’avance sans crainte ; tout rayonne autour de moi ! Je m’en vais suivre les poussières de fées que cet homme a parsemées sur mon chemin.

La Porte de la mer, Youcef Zirem

Ecrit par Nadia Agsous , le Mardi, 07 Février 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Maghreb, Roman

La Porte de la mer, éd. Intervalles, juin 2016, 141 pages, 16 € . Ecrivain(s): Youcef Zirem

 

Les miracles de la résilience


A peine entame-t-on la lecture de La porte de la mer, le dernier roman de Youcef Zirem, qu’une onde de choc parcourt notre corps et soulève notre cœur. Le malaise ! L’horreur ! Une scène de violence extrême nous prend à la gorge et masque notre vue. Dans un lieu reculé, loin de la ville et de sa foule terrorisée par la violence qui s’est enracinée dans la vie quotidienne de tout-e un-e chacun-e, une jeune femme est violée par son père ! Quelques années plus tard, Amina, la protagoniste de cette histoire qui nous montre une société sous les feux de la violence, de la répression et de la terreur, raconte : « J’étais presque hypnotisée et ne lui opposai aucune résistance. Il me fit allonger sur l’herbe sèche et se retrouva sur moi. Au bout de quelques minutes, Il poussa un affreux cri de jouissance et je sentis couler le sang dégagé par mon hymen ».

Mektouba, Karima Berger

Ecrit par Nadia Agsous , le Samedi, 07 Janvier 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Albin Michel, Roman

Mektouba, février 2016, 247 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): Karima Berger Edition: Albin Michel

 

Que nous lègueras-tu, Ô père ?

Tout d’abord, il y a la lettre ; elle est là, rangée dans le tiroir. Au verso de l’enveloppe, une phrase sonne comme « une coalition » : « Enfants Ben Amar » ! Cette missive est une « vomissure » ; c’est « une entaille » qui le blesse, le nargue, lui fait mal, défie son pouvoir et fait saigner son cœur. Cette lettre agit comme une Madeleine de Proust car dès sa réception, il se met à écrire ses mémoires : « le fiel de leur lettre a pesé sur ma plume », écrit-il avec beaucoup de colère.

Lui ? C’est Hadj Ben Amar, le père, le narrateur et l’un des personnages principaux du dernier roman de Karima Berger, Mektouba. Tout au long du récit, cet homme « né au siècle dernier », à « la salive imbibée de coran », émerge comme un être hors du commun. C’est un ancien haut fonctionnaire, désabusé par sa fonction, par son pays, par sa vie, par ses enfants, par la providence. Il est propriétaire d’une maison qu’il a surnommée affectueusement Mektouba – l’écrite, la destinée.

Un palimpseste pour l’oubli ! (2), par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous , le Vendredi, 02 Décembre 2016. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

A leur tour, les occupant-es de la Basse Casbah mettent en branle leur machine à fabriquer les mythes :

« Mais non ! Mais non ! Vous êtes devenus fous ou quoi ? Mais non ! Ces êtres sont les petits-enfants des djinns des jardins du Roi Shahlilar qui ont pris des formes humaines ! Méfiez-vous ! Ils sont insidieux. Tantôt ils incarnent le bien, tantôt ils épousent le mal. Ils errent dans les interstices du temps et éliminent tout ce qui obstrue leur chemin. Ce sont eux qui ont égorgé les dix-huit poètes qui ont osé révéler à la face du monde leurs desseins meurtriers et destructeurs ! Ô hommes d’ici, rappelez-vous du jour où ils ont kidnappé et violé les huit filles du propriétaire du bar pour se venger de leur père qui incitait les hommes à la débauche et les éloignait du chemin d’Allah. Souvenez-vous de cette journée funèbre où les mots se sont tus. Où les cœurs se sont durcis. Ce jour du malheur où l’obscurité et la peur ont forcé les portes de vos vies empêtrées dans des angoisses d’une terrifiante complexité ».

La poésie d’Aimé Césaire, par Nadia Agsous

Ecrit par Nadia Agsous , le Jeudi, 17 Novembre 2016. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

« Parole des profondeurs »

Aimé Césaire est écrivain, dramaturge, biographe, homme politique, avant tout et par-dessus tout, il est poète. Il est cet être sensible et lucide, animé par ses passions ardentes ; il est ce manouvrier de la langue qu’il use à loisir, en toute liberté, pour dire, affirmer haut et fort et graver son être au monde. La poésie césairienne éblouit par la beauté de son verbe ; elle envoûte par son parfum à l’essence de vérité ; elle émeut par sa sincérité, son authenticité et sa profondeur.

Le verbe poétique d’Aimé Césaire sonne comme une promesse de vie et d’épanouissement ; c’est une voix qui résonne en nous, qui parle à notre sensibilité, qui panse nos plaies, nourrit nos ambitions et fait vivre nos rêves.

Aimé Césaire définit la poésie comme « la parole rare », « la parole essentielle », la « parole fondamentale », « la parole des profondeurs ». De son point de vue, la poésie est une parole qui « s’accumule ; elle s’accumule pendant longtemps ; elle s’accumule patiemment, elle fait son cheminement ; on peut la croire éteinte et brusquement, la grande déchirure : l’éruption ! »