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Les jeunes mariés, Nell Freudenberger

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 06 Mars 2014. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Quai Voltaire (La Table Ronde)

. Ecrivain(s): Nell Freudenberger Edition: Quai Voltaire (La Table Ronde)

 

Nell Freudenberger possède un talent rare en écriture : elle parvient à nous passionner de bout en bout en nous racontant une histoire somme toute assez banale à première vue. Jugez-en : George, ingénieur américain début de deuxième âge cherche femme sur asianeuro.com. A l’autre bout du monde, au Bengladesh, une jeune fille, Amina, rêve d’Amérique. Tout cela tombe fort bien et les deux tourtereaux virtuels deviennent réels : Amina s’installe à Rochester (NY) USA et ils se marient. Ajoutez-y les difficultés d’adaptation d’Amina, les soucis familiaux et les hésitations d’un jeune couple et vous aurez résumé le livre. Enfin presque. Et  c’est là que se glisse tout l’art de l’auteure, dans ce presque, dans cet interstice où – de la vie quotidienne – surgit néanmoins l’aventure, l’incroyable incertitude de la vie humaine, la folle épopée du pas grand-chose quand il est porté par des cœurs.

La Terre Promise américaine c’est bien. Mais pas tout à fait. Et, peu à peu, pas du tout. Les regards interrogateurs voire hostiles, le travail précaire, la vie avec George comme ci comme ça. Enfin la vie quoi. Au tamis du regard et des blessures d’Amina, tout cela devient palpitant, presqu’anxiogène. Une sorte de suspense conjugal ou/et de l’immigration.

La robe des léopards, Kristopher Jansma

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 20 Février 2014. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Editions Jacqueline Chambon

La robe des léopards (The unchangeable spots of leopards) Trad. (USA) Laure Manceau. Octobre 2013. 363 p. 23 € . Ecrivain(s): Kristopher Jansma Edition: Editions Jacqueline Chambon

 

Jansma signe là un roman captivant, drôle et d’une grande originalité. Sur le ton de la dérision – mais chaleureuse et réjouissante ce qui, par les temps qui courent, devient rare. On est averti dès avant le début du roman :

«  Si vous pensez être l’auteur de ce livre, vous êtes prié de contacter Haslett & Grouse Publishers (New York, New York) dans les meilleurs délais. »

C’est que la question n’est pas exclue a priori : il se peut que l’un d’entre nous soit l’auteur de ce livre. Après tout. Les deux héros du livre – deux jeunes et brillants universitaires, sportifs et écrivains – jouent sans cesse avec la paternité littéraire, jusqu’à en faire un thème obsessionnel. Et Kristopher Jansma lui-même met cette question au centre de son roman. L’un écrit un livre universellement célébré. L’autre – par dilettantisme ou angoisse ? – perd tout ce qu’il écrit dans une sorte de fascination du vide. Alors il fera « carrière » de son amitié avec celui qui a réussi en littérature.

Edisto, Padgett Powell

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 15 Janvier 2014. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Belfond

Edisto, Belfond/Vintage novembre 2013. 247 p. 17 € . Ecrivain(s): Padgett Powell Edition: Belfond

 

Incipit : « Je suis en goguette à Bluffton. Je me suis tiré de l’école – on appelle ça faire le mur, mais il y a pas de mur, il suffit de sortir de la cour à la récré, quand les trois cents gamins sont là pliés en deux en train de lancer leurs billes. Moi, je suis pas capable d’en lancer une au lance-pierre, alors je me casse et je vais au Rexall prendre un verre – un coca, ou un de ces trucs que Madame le Docteur m’interdit formellement, sous prétexte que ça m’excite. Je vais pourtant pas boire du lait toute ma vie, ou me mettre au bourbon à mon âge. Mais c’est pas le problème. »

Entrée inhabituelle pour une critique de livre, mais dans le cas d’ « Edisto », elle s’impose presque, elle va de soi tant cet incipit évoque un livre culte des années soixante.  Vous avez deviné ?

Simon Everson Manigault est le petit-fils sûrement de Holden Caulfield, le jeune héros de « The catcher in the rye » (L’attrape-cœurs) de Salinger. Il lui ressemble comme deux gouttes d’eau, déborde comme lui d’énergie et d’insolence, parle comme lui. Ici aussi, nous avons un narrateur à la première personne du singulier, dont nous suivons les traces pendant quelque temps avec plaisir, jubilation. Car ce roman n’est pas triste, c’est le moins ! On sourit, on rit, de bout en bout, dans le langage vert et les frasques de Simon.

Stone Arabia, Dana Spiotta

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 10 Janvier 2014. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Stone Arabia, Actes Sud, traduit (USA) par Emmanuelle et Philippe Aronson novembre 2013, 286 pages, 22,50 € . Ecrivain(s): Dana Spiotta Edition: Actes Sud

 

Nik est musicien. Il a toujours rêvé d’être une star, mais son audience n’a jamais dépassé un cercle très restreint. Ses fans ? Ce sont essentiellement sa sœur, Denise, et une poignée d’amis. Aujourd’hui, Nik approche de la cinquantaine et pourtant rien n’a changé. Ou presque. Il continue d’écrire des chansons, d’autoproduire ses disques. Le succès, il ne l’espère même plus. Il a depuis longtemps compris qu’il ne deviendrait jamais l’un de ces musiciens qui fait des étincelles sur scène. De toute façon, le succès, il l’a. A sa façon. Une façon très imaginative et qui fait de lui un personnage exceptionnel de roman.

Dès son plus jeune âge, Nik s’est en effet mis à rédiger des « Chroniques ». Dans ces pages, Nik est un musicien accompli. La gloire, le succès, tout est là. Tout ce qu’il a échoué dans sa vie réelle, il le réussit dans cette vie fictive. Il se construit une fausse existence. Il est son seul public. Il est son plus grand fan.

Une terre d’ombre, Ron Rash

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mercredi, 08 Janvier 2014. , dans USA, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Seuil

Une terre d’ombre, traduit de l’Anglais (USA) par Isabelle Reinharez, 2 janvier 2014, 243 pages, 20 € . Ecrivain(s): Ron Rash Edition: Seuil

Une ballade pour Laurel


Dans les années 60, un homme est mandaté de façon officielle pour se rendre dans une région isolée de la Caroline. Sa mission est de submerger la ville Mars Hill pour en faire un lac artificiel. L’hostilité des habitants et la découverte d’un cadavre dans un vieux puits ramènent à la surface une histoire tragique qui s’y était déroulée au moment de la Première Guerre Mondiale.

L’habileté du Prologue permet à l’auteur d’introduire son histoire et de braquer la lumière sur deux êtres à part. Il s’agit de Hank Shelton et surtout de Laurel, sa sœur. En effet, victime d’une marque de naissance et de la superstition des habitants, elle est rejetée par ce lieu qui la voit comme une sorcière et une damnée. Laurel est alors pourchassée, humiliée et voit son avenir compromis puisque les pressions de la communauté sont telles qu’elle a dû quitter l’école à regret. Sa vie se passe loin des regards dans une profonde solitude. De surcroît, sa demeure est une vieille maison nichée au creux d’un vallon maudit :