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Roman

Sur les ossements des morts, Olga Tokarczuk

Ecrit par Anne Morin , le Samedi, 17 Novembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Pays de l'Est

Sur les ossements des morts, traduit du polonais par Margot Carlier, Noir sur Blanc, 299 pages, 22 € . Ecrivain(s): Olga Tokarczuk

 

Conjonction adversive, conjonction des contraires, dans cette histoire, attirance et répulsion agitent les personnages. Janina Doucheyko, la narratrice, ingénieur en retraite, donne un cours d’anglais par semaine à la petite école du village en contrebas, dans ce coin glacé de montagne dans les Sudètes. Les personnages autour d’elle vont recevoir un surnom ou un prénom inventé qui devient, à ses yeux, leur véritable identité : Grand Pied dont la mort va servir à la fois de déclic et de révélateur, Matoga, son voisin immédiat, et aussi Dyzio, ancien élève qu’elle aide à traduire Blake, Bonne Nouvelle, la jeune mandchoue du dépôt-vente de vêtements, qui vont graviter autour d’elle comme de petites planètes.

Que se passe-t-il dans l’espace, dans le monde céleste, qui n’ait pas son pareil dans ce monde-ci ? Quelles influences agissent sur nos humeurs ? Et notre « arbitre » est-il si libre que cela ? Sommes-nous maîtres absolus de nos actions et de nos réactions – au sens à la fois chimique et épidermique ?

Homo erectus, Tonino Benacquista

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 13 Novembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Homo erectus, Folio 2012, 305 pages . Ecrivain(s): Tonino Benacquista Edition: Folio (Gallimard)

Chaque jeudi, à Paris, dans un endroit secret qui n’est jamais le même, des hommes racontent devant d’autres hommes la nature et l’évolution des rapports qu’ils entretiennent ou ont entretenus avec une ou plusieurs femmes, puis cette assemblée extraordinaire se sépare, sans un commentaire autorisé sur aucune des « confessions », sur l’annonce de l’adresse de la session suivante.

Ce pourrait être la scène d’un nouvel Heptaméron qui aurait pour règles singulières que les participants ne se connaissent pas, ne déclinent pas leur identité, ne cherchent pas à en savoir plus que ce qui est narré, ne se parlent pas, ne se rencontrent point hors de l’étrange atelier qu’ils cessent de fréquenter quand ils en ont envie.

Or dans Homo erectus, trois des personnages qui se sont trouvés un même soir en ce cercle mystérieux enfreignent ce règlement : tout en assistant épisodiquement aux soirées occultes, ils se retrouvent ponctuellement à la terrasse d’un café, confrontent le bilan négatif qu’ils se font de leur relation passée avec le deuxième sexe, puis en tirent leçon, chacun à sa façon, chacun avec la morale qu’il prend la décision d’adopter dorénavant, pour se tracer, délibérément, obstinément, une vie nouvelle fondée sur un changement radical de conduite vis-à-vis de la gent féminine.

Les fidélités successives, Nicolas d'Estienne d'Orves

Ecrit par Stéphane Bret , le Lundi, 12 Novembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Albin Michel

Les fidélités successives, 715 p. 23 €, Août 2012 . Ecrivain(s): Nicolas d'Estienne d'Orves Edition: Albin Michel

 

Comment expliciter les sinuosités d’un parcours de vie ? Comment les justifier, lorsque ces dernières deviennent difficilement compréhensibles ou injustifiables au final ?

C’est la méthode que semble avoir adoptée Nicolas d’Estienne d’Orves dans son roman Les fidélités successives. L’origine de l’intrigue du roman est familiale : deux frères, Victor et Guillaume Berkeley, vivent, dans l’entre deux-guerres, une enfance paisible dans les Iles anglo-normandes, plus précisément dans l’île de Malderney, sous la férule d’une mère protectrice, passablement autoritaire, Virginia Berkeley, veuve remariée avec un certain Philip qui vit sous le toit familial. Une particularité : Victor et Guillaume, tout en étant de nationalité britannique, parlent le français sans accent…

Un homme, Simon Bloch, est un ami de la famille, à laquelle il rend visite régulièrement par bateau. Ses visites sont l’occasion pour Guillaume, qui se languit et s’ennuie de ce mode de vie trop prévisible, trop calme, de cette île où il ne se passe jamais rien, d’entrevoir une autre vie par les récits que lui fait Simon Bloch, qui est producteur de films et de pièces de théâtre à Paris. Il décide Guillaume à le suivre à Paris.

Sous le regard du lion, Maaza Mengiste

Ecrit par Theo Ananissoh , le Jeudi, 08 Novembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Actes Sud

Sous le regard du lion, traduit de l’anglais (USA) par Céline Schwaller, octobre 2012, 368 p. 23,70 € . Ecrivain(s): Maaza Mengiste Edition: Actes Sud

 

C’est un premier roman qui est à la hauteur de son sujet : La révolution qui mit fin, en 1974 en Éthiopie, à une monarchie vieille, dit-on, de trois mille ans ! Un changement de régime et d’époque advenu, soulignons-le, par la volonté des hommes certes mais en quelque sorte contre leur propre mentalité, leur propre état d’esprit du moment. Le premier tiers du roman, qui décrit la fin des quelque quarante années de règne de l’empereur Hailé Sélassié, traduit avec une belle sobriété l’effarement de tous et de chacun face à l’événement – effarement que relatait déjà l’écrivain polonais Ryszard Kapuscinski dans son admirable Le Négus (éd. 10/18). Les officiers révolutionnaires font prisonnier le « Roi des Rois » dans son palais sans oser se dire à eux-mêmes ce qu’ils sont en train de commettre.

« Il n’avait pas pensé au fait que quelqu’un devrait surveiller l’empereur Hailé Sélassié, marcher devant ces yeux capables de renverser un homme d’un simple battement de cils ».

D’un côté, de « simples mortels », de l’autre, « l’élu de Dieu », le monarque « dont on pouvait remonter la lignée jusqu’au sage roi Salomon de la Bible ».

Les 1001 conditions de l'amour, Farahad Zama

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 08 Novembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Iles britanniques, Jean-Claude Lattès

Les 1001 conditions de l’amour, The many conditions of love, trad. de l’anglais Perrine Chambon, 2012, 428 p. 19 € . Ecrivain(s): Farahad Zama Edition: Jean-Claude Lattès

 

Les rapports amoureux et les relations au sein du couple ne sont jamais chose simple en ce monde complexe qu’est l’Inde d’aujourd’hui.

Rehman et Usha d’une part, Aruna et Ramanujam d’autre part, en font la douloureuse expérience dans ce deuxième roman de Farahad Zama.

Rehman est musulman, Usha est hindoue. Cette appartenance à deux communautés qui ne se supportent pas constitue, d’entrée de livre, une source inéluctable, prévisible, d’obstacles et de tracas, dont on retrouve le schéma dans une bonne partie des films de Bollywood.

Aruna appartient à une famille pauvre. Ramanujam, médecin, de milieu bourgeois, subit volontiers l’influence de sa sœur, une personne acariâtre qui méprise Aruna. Ce triangle, tout aussi récurrent dans la cinématographie indienne, laisse espérer, dès que ces personnages prennent vie narrative, de désastreuses scènes de ménage…