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Poésie

Là d’où elle vient, Patricia Ryckewaert (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Mercredi, 21 Août 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Là d’où elle vient, Bleu d’encre, 2019, poésie, 46 pages, 12 € . Ecrivain(s): Patricia Ryckewaert

 

Elle vient du silence et des ombres portées, suggérant l’appel d’elle-même dans la trace des autres.

Un moment de pause « venu (elle vient) de l’étonnement du jour (et du ciel mouillé comme un chagrin ».

Plutôt que de se contenter de venir, elle partage cette venue qui semble, progressivement, devenir son empreinte digitale, un signe propre d’être : « elle vient des doigts sur la bouche/ et des ailes d’un baiser/ chut ! ».

Elle vient d’entre toutes les femmes, « elle vient d’un voile/ cousu sur la peau/ des doigts de l’obscur/ qui ferme les paupières de l’aube ».

De cette enfance à « craquelures » émane la femme comprise dans tous ses états : « elle vient d’une longue litanie/ de la mer et du vent/ des entailles dans la chair/ et de la ferraille noire d’un cargo ».

Chants, Canti, Giacomo Leopardi (Augustin Talbourdel)

Ecrit par Augustin Talbourdel , le Lundi, 19 Août 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Italie

Chants, Canti, juin 2019, Garnier-Flammarion, édition bilingue, trad. italien Michel Orcel, 352 pages, 10 € . Ecrivain(s): Giacomo Leopardi

 

Les poètes ont-ils tous leur place sur le monument de Dante ? Giacomo Leopardi s’est octroyé la sienne. Jeune homme de santé fragile et d’un talent inouï, Leopardi a construit dans son Zibaldone et ses Canti un système philosophique et poétique qui a influencé toute la littérature et la pensée de son temps, notamment Schopenhauer et Nietzsche. Le second poème de ses Canti, sans doute l’un des plus réussis, intitulé Sur le monument de Dante, pourrait servir de manifeste à toute la poésie lyrique que Leopardi considère comme « la cime, le comble, le sommet de la poésie, qui est elle-même le sommet du discours humain » (Zibaldone).

On pourrait définir le poète comme un homme qui a trop lu Dante. Définition légère, bien peu académique, mais vérifiée dans la première partie des Canti. Les neuf premières canzones, plus ou moins régulières, sont encore classiques et d’inspiration dantesque. Seguitando il mio canto con el suono (Purgatoire, I, 10 : « Suivant mon chant avec cette musique ») : le chant léopardien a débuté comme ça, comme une variation de La Divine Comédie. On retrouve bel et bien, dans les Canti, la « selva oscura » (forêt obscure) du début de l’Enfer, le « veglio solo » (vieillard solitaire) à l’entrée du Purgatoire ainsi que des Béatrice, celle qui ouvre le Paradis (« quand je vis Béatrice, tournée / sur son flanc gauche, regarder le soleil »).

Cette voix d’un ailleurs, Danusza Bytniewski (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Jeudi, 11 Juillet 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Cette voix d’un ailleurs, éd. Samizdat, 2013, 96 pages . Ecrivain(s): Danusza Bytniewski

 

Comment appréhender cet autre soi-même, une sorte de double en un lieu autre ? : « La voix/goutte à goutte elle chemine en moi/Me lave de la poussière/ Tel un oiseau qui voudrait voler, cogne contre les bourreaux de mon impuissance ».

L’échappatoire mène à la conclusion de faire partie d’un tout « autre » : « Je suis plus loin que l’exil. Je n’ai pas quitté mon corps, c’est lui qui m’a quitté… Je suis… sans tout ce qui donne à vivre ».

Le mystère de la vie jaillit dans tout son éclat avec une sorte de touche incantatoire non dénuée d’absence : « Mon corps semble en repos éternel, car je suppose que j’ai un corps. Il est si loin de moi, dans une zone où je ne suis pas ».

Au désert mental se substitue le souvenir du paysage ressenti :

Annoncer la couleur, Ernest Pignon-Ernest, André Velter (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 10 Juillet 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Actes Sud, Arts

Annoncer la couleur, mars 2019, 96 pages, 29 € . Ecrivain(s): André Velter et Ernest Pignon-Ernest Edition: Actes Sud

 

« Tenir Parole à bras le corps dans La Lumière et dans La Force ».

« Toujours & Toujours Attiser le Feu qui nous jette en Avant ».

« C’est le même Corps dans le Décor qui joue sa peau sans y penser ».

Ernest Pignon-Ernest et André Velter sont deux archers. Leurs flèches : pour l’un le fusain, la plume et le pinceau, pour l’autre la phrase et les mots acérés, ils se croisent, se lient et fécondent la poésie et le dessin. L’image chante dans son mouvement et la phrase l’illumine. C’est une main ouverte comme une offrande – on pense évidemment à celle du torero José Tomás (1) –, un pied ailé, un œil fermé de femme ombré de noir, un corps nu aux bras ouverts, comme une divine présence, un voilier dans le lointain, suspendu sur l’océan, comme les mouettes qui l’accompagnent : « Pour annoncer la couleur rien ne vaut le noir et blanc ».

Le Livre de mémoire, suivi de La lettre première, Thibault Biscarrat (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 28 Juin 2019. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Les Vanneaux

Le Livre de mémoire, suivi de La lettre première, juin 2019, 90 pages, 17 € . Ecrivain(s): Thibault Biscarrat  Edition: Les Vanneaux

 

« Sur ton bras une marque, un signe : voici le Verbe et les soixante-dix noms sacrés.

Voici le Livre de mémoire.

J’envelopperai la Terre de lumière et les rayons embraseront les rivages.

Nous susciterons le pourpre et le point étincelant. Nous susciterons l’encore et le poème.

Mystérieux infini d’où le Tout se déploie. Trois sortant d’Un, Un étant dans le Trois ».

 

Le Livre de mémoire s’ouvre sur une citation du Zohar : Ecoutez cieux, ce que je vais dire… Le Zohar ou le Livre de la splendeur, essentiel dans la mystique juive, ouvrage qui étudie, et interroge l’humain et le divin.