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Poésie

L’âme blessée d’un éléphant noir, Gabriel Mwéné Okoundji (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 05 Mai 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Afrique

L’âme blessée d’un éléphant noir, Gabriel Mwéné Okoundji, Préface de Boniface Mongo-Mboussa, Gallimard Poésie, mars 2025, 208 pages, 9,30 €

 

Parole souveraine

Il y a deux manières d’aborder le poème, soit avec parcimonie, avec peu, simplement quelques images fortes, soit avec des croyances vastes, des images nombreuses et une certaine confiance dans la langue, en définitive. Ici, c’est à cette deuxième catégorie que nous avons affaire. Car la prosodie de ce recueil est dense, rassemble et remue des paysages, fait sonner des visions, s’étoffe du monde vivant, totémique, d’une Afrique, peut-être celle de l’enfance, de la vie et des émotions qui deviennent presque étouffantes tant elles sont profuses, épaisses, feuillues, ramassées. De cette abondance, il y a une forme d’échec merveilleux à ne pouvoir dire la totalité. Par exemple, comment Gabriel Okoundji tient plus vaste en son cœur un sentiment pour écrire TOUT de l’Afrique qui l’a constitué, dire un poème en crue débordant de lui-même (un peu à la manière de la phrase de Proust qui ne sait parfois pas sa propre limite).

La veine des étoiles phonétiques, Céline De-Saër (par Luc-André Sagne)

Ecrit par Luc-André Sagne , le Lundi, 28 Avril 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

La veine des étoiles phonétiques, Céline De-Saër, Atelier de L’Agneau Editeur, 2024, 80 pages, 16 €

 

En choisissant pour titre de son premier recueil de poèmes « La veine des étoiles phonétiques », Céline De-Saër ouvre un chemin. A la source des mots, de leur son autant que de leur sens (l’oralité est ici primordiale), qu’elle plonge dans une nuit qui serait, comme l’écrit Péguy, l’état habituel et permanent. Un chemin qui est cheminement, à la découverte, pas à pas, de ce qui pourrait être un gisement ou une pulsation, selon la double acception de la veine du titre, relevant du domaine minier comme de la circulation du sang.

Gisement d’images, d’émotions au fil des pages, alternance de lutte et d’abandon de la part de la poète : les visions s’enchaînent, le sang bat trop vite aux tempes. Car il s’est produit un événement tragique, à l’origine, ainsi qu’on peut le supposer, de l’écriture du recueil, et qui apparaît explicitement par deux fois, dans toute sa violence et la netteté de sa description.

Choix de poèmes, James Sacré (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 11 Avril 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Choix de poèmes, James Sacré, Éditions Unes, mars 2025, 128 pages, 10,40 €

 

Avec cette anthologie personnelle, le grand écrivain (né en 1939) que l’on sait se rend utile. Par ce choix chronologique, en effet, sobrement établi (110 pages) dans son œuvre immense, James Sacré fait mieux que nous parler : il se parle publiquement (et nous l’écoutons ainsi directement, nous avons comme part aux « gestes intérieurs d’écriture qui poussent en avant la masse des mots de (ses) poèmes », p.69). Ce serait alors ici le bienvenu autoportrait continué de sa vocation, s’il était assuré d’elle, mais non : si un monde natif l’avait enveloppé autrement (l’étage d’une petite épicerie plutôt qu’une ferme vendéenne – changeant ainsi du tout au tout son « étonnement fondamental »), il aurait été (écrit-il, p.51) un tout autre inspiré, et, peut-être même, tout autre chose qu’inspiré. Et la contingence de sa postérité lui semble bien valoir celle de sa source (« Une ritournelle anodine/ Hé, poème ! qu’elle disait, ho !/ Vaine parole humaine/ Dans l’informe bruit du temps », p.100).

La Petite dame, Valérie Rouzeau (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Mardi, 08 Avril 2025. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La Table Ronde

La Petite dame, Valérie Rouzeau, éditions La Table Ronde, mars 2025, 95 pages, 15 € . Ecrivain(s): Valérie Rouzeau Edition: La Table Ronde

 

Grande dame en poésie/Grand ramdam aussi

Lire la poésie et pas qu’une saison par an ! Et vive le printemps quand même !

Lire un poème c’est honorer cette liberté des mots vifs, suspendus, des âpretés en strophes, des souffles longs ou au contraire des rythmes percutés, sauvages, sans costarcravat’. La poésie est à la littérature ce que le jazz est aux sons.

Ce que la misuk est à la musique !

Je lis La Petite dame de Valérie Rouzeau.

Je lis tout Valérie Rouzeau.

Labyrinthes, Christopher Okigbo (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 07 Avril 2025. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED, Afrique

Labyrinthes, Christopher Okigbo, Poésie/Gallimard, mars 2025, 224 pages, 10,30 €

 

Vortex

Pure découverte que ce recueil du poète nigérian, Christopher Okigbo. Non pas que pour la couleur locale, les noms toponymiques, ceux des animaux, les descriptions des paysages d’Afrique. Cela ne s’arrête pas là, mais cherche l’union de cultures totémiques et de la poésie occidentale (dans sa version initiale en anglais, ici dans une édition bilingue). Et surtout, le vortex des mots, des images, de l’angoisse, de la mort et de l’espoir politique.

Écrire c’est ouvrir la Boîte de Pandore des inquiétudes nouvelles et qui n’ont jamais été dites. Parole de la mort qui est à la fois essence et unique moment sans nomination. Et au fond de cette boîte gît le pauvre langage humain.