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La Une Livres

Souviens-toi des abeilles, Zineb Mekouar (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 20 Novembre 2025. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Folio (Gallimard)

Souviens-toi des abeilles, Zineb Mekouar, Folio – 9 octobre 2025, 176 pages 9,00€ Edition: Folio (Gallimard)

 

Prix Henri de Régnier de l’Académie Française 2025, ce deuxième ouvrage de Zineb Mekouar plonge le lecteur dans un univers culturel alternatif où se mêlent et s’affrontent tradition, superstition et sacrilèges, interdits, violations des lois coutumières, conséquences tragiques du changement climatique, exil rural, contraintes socio-économiques et sentiment de dépravation culturelle et morale à l’évocation et au contact de la « civilisation » urbaine.

 

L’action se déroule en majeure partie dans le douar Inzerki, dans la province de Taroudant, et en second lieu à 80 kilomètres de là, à Agadir.

Rêves de trains, Denis Johnson (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 19 Novembre 2025. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Titres (Christian Bourgois)

Rêves de trains, Denis Johnson (Train Dreams 2003), traduit de l’américain par Brice Matthieussent, Christian Bourgois Titres, 138 p. 7,50 € Edition: Titres (Christian Bourgois)

Au-dessus du vide, des gouffres vertigineux, des canyons brutaux, des hommes ont lancé des ponts, des monstres de métal pour réduire les distances dans les territoires montagneux, dans les brisures des Rocheuses, des Appalaches, comme un défi insensé à la Nature jusqu’alors toute puissante. Des hommes ont bravé le danger, ont risqué et ont laissé leur vie dans les gouffres obscurs pour accomplir cette tâche de titans au nom de ce que l’on a appelé le progrès – et qui l’était sûrement pour l’économie américaine des années 20. Moment essentiel de la composition de la symphonie des trains qui tissèrent leur toile à travers l’immense territoire, monts et vallées, déserts et villes, canyons et plateaux.

Grainier fut l’un de ces bâtisseurs et son histoire, ici racontée, est scandée par le bruit des trains, leurs vibrations, leurs sifflements, leurs grondements. Une vie simple, d’homme simple, écrite dans un style au dénuement total. Les accents bibliques ne sont pas loin, avec des passages d’une poésie céleste qui frise le fantastique. L’histoire de Grainier coule dans ses veines à jamais et, longtemps après l’âge héroïque des premiers ponts, il a gardé au fond du cœur et de la mémoire les moments d’alors.

Les Moucherons, Thierry Clech (par Claire Fourier)

Ecrit par Claire Fourier , le Mardi, 18 Novembre 2025. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Récits, Tinbad

Les Moucherons, Thierry Clech, Éditions Tinbad, septembre 2025 Edition: Tinbad

 

Voici, menées au pas de course alternant avec la sinuosité d’un fleuve pas très tranquille, les mésaventures d’un photographe qui a marié le cancer et une invasion de moucherons chez lui, au moment où sévissait le covid.

Quatre mots-clés donc : photographe, moucherons, covid, cancer. Plus le temps, toujours le temps.

 

Photographe, car c’est avec l’œil précis d’un Leica et la recherche du meilleur angle qu’est analysée une ribambelle de misères, les unes dérisoires, les autres en passe d’être mortelles ;

le souci de la qualité de la prise l’emportant sur l’accablement, ce qui réjouit le lecteur, lequel, cruel, demande toujours à un auteur de traiter avec humour les malheurs qu’il a lui-même quelque jour endurés, les traumatismes qu’il subit, ne permettant pas au livre d’en rajouter.

L’Alephebet – Didier Ben Loulou (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Lundi, 17 Novembre 2025. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Israël

L’Alephebet – Didier Ben Loulou – Arnaud Bizalion Éditeur – 96 p. – 25 euros – 23/09/25. . Ecrivain(s): Didier Ben Loulou

 

« Les lettres, gouttes de semence, deviennent ainsi la trace d’une réalité supérieure. Les écrire, les lire sont une manière de remonter à la source première. Elles véhiculent une énergie divine qui dépasse le simple message. Les photographies ont une façon de poursuivre l’acte créateur de Celui qui a tout créé à partir d’elles. »

 

L’Alephebet est l’alphabet en hébreu, comptant vingt-deux lettres, et selon la tradition kabbalistique, Dieu aurait créé le monde en agençant ces vingt-deux caractères qui composent l’Alephebet. Des lettres carrées  qui vont fonder une langue et plus encore. Ces lettres aux résonances inouïes, au graphisme à aucun autre semblable ; le photographe écrivain les découvre, comme l’on découvre une source miraculeuse, il sait que le temps lui appartient, alors il prend son temps pour les voir, les photographier, les laisser s’imprimer en sa mémoire et dans sa chair.

Où seul chasse le vent, Michel Bourçon (par Philippe Leuckx)

, le Lundi, 17 Novembre 2025. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Poésie

Où seul chasse le vent, Michel Bourçon, Al Manar, 2025, 88p., 20 euros, photographies de l'auteur.

 

Pour le suivre depuis longtemps, je peux dire que Bourçon est un poète singulier, prolifique et égal - ce qui est rare quand la poésie est abondante. Une hyperconscience de ce qui l'entoure anime l'écriture, nourrit les poèmes, amplifie les thématiques.

On reconnaît vite un poème de son cru, parce qu'il densifie le sens des réalités intérieures, la découverte du monde (des arbres, du ciel), et la perception intime, unique des ombres au coeur et dans l'espace.

Il faut attendre la page 67 pour bien comprendre le sens et la portée du titre : "le passé/ où seul chasse le vent".

L'être traqué, torturé, tremble d'être cette conscience agissante qui repère "les éboulis", le peu de savoir (nombre de "je ne sais pas, on ne sait guère"), les pertes, et le profil angoissant de la mort et de celle de la mémoire du monde.