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Essais

Le Désir de voir, Laurent Jenny (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 29 Septembre 2020. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts, L'Atelier Contemporain

Le Désir de voir, Laurent Jenny, août 2020, 168 pages, 20 € Edition: L'Atelier Contemporain

 

Des mots aux images – et retour

Laurent Jenny enseigne à l’université de Genève. Il a publié de nombreux travaux sur l’esthétique et l’idéologie littéraires. Dans Le Désir de voir, il glisse vers une forme d’autobiographie (ciblée) en remontant l’histoire de son initiation progressive au regard pictural et photographique. Surgissent les étapes de cette métamorphose. Voir dans le noir, L’instant de voir, Voir en rêve, et Manières de voir, segmentent l’exploration de plusieurs modes de vision, au croisement d’expériences personnelles, d’expérimentations artistiques, de lectures et de « regards ».

Les mots mettent progressivement le feu aux poudres des images. Et tout commence à l’ombre de Michaux et ses peintures-idéogrammes, puis avec et entre autres les œuvres d’Alexandre Hollan et ses dessins d’arbres, les encres de Joan Barbarà, les monotypes de Degas, l’Outrenoir de Pierre Soulages, et des « photographies » d’Oscar Muñoz.

Il nous est arrivé d’être jeunes, François Bott (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 25 Septembre 2020. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La Table Ronde - La Petite Vermillon

Il nous est arrivé d’être jeunes, février 2020, 272 pages, 8,10 € . Ecrivain(s): François Bott Edition: La Table Ronde - La Petite Vermillon

 

François Bott (1935) parle des autres écrivains avec une gourmandise fine, attisant ainsi la (re)lecture des ouvrages et des écritures qu’il présente. Le titre du livre – tout un programme – dessine avec acuité, mélancolie, ces voix (la plupart) éteintes qui ont pu, su le faire vibrer au plus profond. Il parle si bien de la « petite musique » des Sagan et autre Nucéra.

Il nous est arrivé d’être jeunes recense ses coups de cœur : en une, deux pages, il réussit à brosser l’essentiel d’un style, les constantes d’une œuvre. Ses portraits, ciselés, rappellent, ô combien, le critique insigne du Monde des Livres qu’il dirigea un temps. Il n’empêche que jamais les blasons littéraires ne versent dans un lénifiant qui leur ferait perdre éclat et intensité et surtout vérité profonde des œuvres lues. Sachs était infréquentable, Genet guère reconnaissant, Paulhan garde sa stature d’éminence grise de la rue-Bottin, Sartre se voit honoré pour ses portraits nécrologiques d’amis proches.

Le nouveau désordre numérique, Olivier Babeau (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 25 Septembre 2020. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Buchet-Chastel

Le nouveau désordre numérique, Olivier Babeau, septembre 2020, 272 pages, 19 € Edition: Buchet-Chastel

L’essai d’Olivier Babeau analyse les causes et les modalités de l’évolution/révolution numérique internationale, et de ce qu’on appelle couramment la « fracture numérique ».

Un constat s’impose de prime abord dans ce livre très documenté : « Il n’y a pas d’IA pour les pauvres, c’est un business de riches ». Les puissances de calcul requises pour collecter et traiter les « big data » ou développer l’intelligence artificielle sont trop importantes et nécessitent des moyens financiers colossaux. C’est vertigineux, car on passe de la modération si chère aux Grecs anciens à l’excès, du « rien de trop » au « toujours plus » des puissances financières.

Le Nouveau Désordre numérique se place tout d’abord du côté des entreprises, de la production et des GAFAM. Dans les années 1980, c’était les entreprises de production de pétrole qui tenaient le haut du marché mondial ; aujourd’hui, ce sont les GAFAM (acronyme pour Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft). Les profits colossaux de ces entreprises profitent à quelques élus hypercompétents en informatique, et reposent sur la sous-traitance, mal payée, mal considérée, à laquelle elles font appel :

Joseph, Un jeune Hébreu devenu vice-roi d’Égypte, Maurice-Ruben Hayoun (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 21 Septembre 2020. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Christian Bourgois, Hermann

Joseph, Un jeune Hébreu devenu vice-roi d’Égypte, Maurice-Ruben Hayoun, 2018, 256 pages, 25 € Edition: Hermann

Maurice-Ruben Hayoun est professeur de philosophie, mais son livre sur Joseph n’illustre pas cette spécialité universitaire. Il s’agit d’un ouvrage au carrefour de l’exégèse et de ces études de littérature comparée qui examinent la survie (Nachleben) d’un personnage ou d’un mythe à travers les siècles. Louise Vinge et Raymond Trousson ont ainsi publié des sommes érudites sur Narcisse et Prométhée. La vie de Joseph est racontée dans Genèse/Berechit 37 à 50 et le livre se clôt avec sa mort, de même que le Deutéronome/Devarim s’achève à la mort de Moïse.

M.-R. Hayoun part, avec raison, d’un constat qui est souvent négligé : les textes de la Bible sont de grands textes au point de vue « littéraire », par leur sens de la narration et de la construction, indépendamment du fait qu’on y accorde foi ou non. Joseph a vécu l’essentiel de son existence ailleurs que sur la terre de ses pères, en Égypte, la grande puissance de la région, les États-Unis de l’époque, mentionnée à mille cinq cents reprises dans la Bible, une civilisation brillante, monumentale et hantée par la mort, une civilisation à côté de laquelle les Hébreux paraissaient à tous points de vue insignifiants.

Dis-moi la vérité sur l’amour, Roland Jaccard (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 17 Septembre 2020. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Dis-moi la vérité sur l’amour, Editions de l’Aire, mars 2020, 90 pages, 12 € . Ecrivain(s): Roland Jaccard

 

« Auden est mort à Vienne en 1973, une ville idéale pour mourir. J’y suis d’ailleurs mort plusieurs fois. Auden voulait savoir la vérité sur l’amour. Il pensait, tout en présumant qu’il avait tort, que l’amour dure toujours. Ce ne fut pas le cas » (Wystan Hugh Auden, Dis-moi la vérité sur l’amour).

Roland Jaccard met de l’ordre dans sa bibliothèque. Il note quelques brèves remarques éclairantes sur des livres anciens ou récents, qui le troublent, le renvoient à sa vie, à ses souvenirs doux et amers, à ses incertitudes, ses échecs, à ses amours perdus, une rupture entraîne le besoin de revenir sur soi-même, écrit-il, en ouverture de cette confession amoureuse.

Roland Jaccard est un oisif qui écrit de très courts romans, vifs, élancés, nostalgiques, tragiques, amoureux, des courts romans, comme l’on dit des courts métrages, qui flambent comme flambent les aphorismes de son ami Cioran, le journal d’Amiel, ou les pensées acides de Schopenhauer.