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Essais

Batailles libertines, La vie et l’œuvre de Gabriel Naudé, Anna Lisa Schino (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 09 Mars 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Italie, Editions Honoré Champion

Batailles libertines, La vie et l’œuvre de Gabriel Naudé, Anna Lisa Schino, juin 2020, trad. italien, Stéphanie Vermot-Petit-Outhenin, 340 pages, 55 € Edition: Editions Honoré Champion

 

Gravitant hors du champ de la culture générale, Gabriel Naudé (1600-1653) appartient à la constellation des « libertins érudits », selon la belle expression de René Pintard, par laquelle il ne faut pas entendre un libertinage de mœurs (encore que cette dimension ne soit point exclue, mais elle n’est pas primordiale), mais un libertinage d’idées, Naudé s’étant aventuré dans des secteurs obscurs de la pensée, lesquels eussent bien pu, s’il n’y avait pris garde, être éclairés par son propre bûcher (il naquit quinze jours avant le supplice de Giordano Bruno).

Comme le remarque Anna Lisa Schino dans son beau livre, Naudé fut d’abord et avant tout un médecin, qui effectua une partie de ses études en Italie. Le séjour transalpin constitua pour le jeune Parisien une expérience capitale. En Italie, Naudé découvrit non seulement les intrigues et les plaisirs qui faisaient le sel d’un séjour pareil, mais encore et surtout un fort courant de scepticisme à l’égard des religions, courant qui semblait paradoxalement se faire plus vif encore à mesure que l’on s’approchait de Rome et des palais pontificaux.

Une chose menant à une autre, Joy Setton (par Delphine Crahay)

Ecrit par Delphine Crahay , le Mardi, 02 Mars 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, La Baconnière

Une chose menant à une autre, Joy Setton, novembre 2020, 188 pages, 8 euros. Edition: La Baconnière


Une chose menant à une autre part dans tous les sens. Localement, une idée, un mot, une référence, mène linéairement à une autre – c’est la logique même – mais globalement, cet essai foisonne tous azimuts, du coq à l’âne et du péché originel aux toilettes à compost. Il y est question de littérature, mais aussi de sociologie, de philosophie, de morale, d’histoire, de coutumes, de langue… et toutes ces disciplines, toutes ces perspectives, s’entremêlent en un treillis serré. Deux déambulations s’articulent : celle du corps de l’auteur dans des lieux physiques – le métro, le Jardin des Tuileries… – et celle de son esprit dans les lieux moins tangibles – mais non moins réels – que sont les pensées des autres – Rousseau, Stendhal, Baudelaire, Arendt, Nietzsche…

Camille et Paul Claudel, Lignes de partage, Marie-Victoire Nantet (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Jeudi, 25 Février 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Camille et Paul Claudel, Lignes de partage, Marie-Victoire Nantet, décembre 2020, 240 pages, 19 € Edition: Gallimard

 

Toucher au génie c’est toucher au mystère et c’est bien ce que révèle le livre de Marie-Victoire Nantet qui, d’emblée, unifie la sœur et le frère Claudel à travers le portrait de Paul sculpté par Camille, alors la toute jeune sculptrice de 16 ans.

Les interrogations a posteriori d’un art construit à un moment précis semblent en jeu à vouloir cerner au mieux la relation sœur-frère : « Aussi s’est-on demandé lequel des visages s’offre au regard, celui d’un enfant encore, ou celui d’un adulte déjà ? / …/ Le Jeune Romain transcende toutes les réponses, sa jeunesse est sans âge et sans défaut ».

L’approche est fouillée et on apprend ainsi beaucoup de l’évolution de Paul Claudel et de ses premiers contacts avec la littérature, les Belges Maurice Maeterlinck et Albert Mockel enthousiasmant son génie symboliste par leurs paroles. Le frère et la sœur fréquentent alors les mêmes milieux, le rôle des critiques, tel à l’époque Mirbeau, se faisant essentiel pour révéler les deux génies de concert, mais avec les a priori de l’époque :

Les Cabanes du narrateur, Œuvres choisies, Peter Handke (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Mercredi, 24 Février 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Langue allemande, Roman, Nouvelles, Gallimard

Les Cabanes du narrateur, Œuvres choisies, Peter Handke, Quarto/Gallimard, novembre 2020, 1152 pages, 26 € (1) Edition: Gallimard

 

« En marchant par l’écriture, en écrivant par la marche, Peter Handke a cherché ce paradis en cherchant ces mots, l’un par les autres, et il lui est arrivé de les trouver. Ces livres sont les étapes d’un exploit » (Le chemin se fait en marchant, Philippe Lançon).

« Je marchais, vivifié par le vent debout ; le bleu de la montagne, le brun des forêts et le rouge carmin des corniches de sable, c’étaient mes pistes de couleur » (La Leçon de la Sainte-Victoire).

« Pendant que le ciel se faisait couleur de soufre, une friche verdissait dessous et les sentes à travers les champs de décombres devenait vert mousse. Alors que tout était depuis longtemps plongé dans le crépuscule, un buisson d’églantier traçait un arc lumineux » (Essai sur le juke-box).

Dans les eaux profondes, Le Bain japonais, Akira Mizubayashi (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 22 Février 2021. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Japon, Arléa

Dans les eaux profondes, Le Bain japonais, janvier 2021, 272 pages, 10 € . Ecrivain(s): Akira Mizubayashi Edition: Arléa

 

Variations autour du bain japonais

Quiconque aime passer les frontières, rechercher le dépaysement ou encore souhaite s’orienter dans une autre civilisation notamment d’Extrême-Orient trouvera plaisir à la lecture du livre d’Akira Mizubayashi. L’auteur vit et travaille entre la France et le Japon. Il a fait une partie de ses études en France et a intégré l’Ecole Normale supérieure. Il enseigne à Tokyo et c’est un écrivain d’expression française et japonaise. Il vit dans cet entre-Deux qu’il appelle un « royaume intermédiaire », en reprenant une formule de J.B. Pontalis, qui consiste à aller d’une culture à une autre, friction culturelle ne pouvant être qu’enrichissante.

L’ouvrage est original dans sa forme. Le point de départ est un ancien article sur la particularité du bain japonais, paru dans la Revue Critique, il y a près de 40 ans. Pour approfondir cette question, l’auteur propose ensuite toutes sortes de textes courts faisant écho à cet article. C’est un ensemble composite fait de souvenirs d’enfance, de rêves, d’analyses de films où les scènes de bain sont prégnantes.